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Victoire de Lula au Brésil !

La nouvelle a de quoi nous réjouir toutes et tous : Lula est sorti victorieux de son duel face au sinistre président de l’agrobusiness, des militaires et des évangélistes !

Après un intermède de quatre ans marqué par les ravages conjoints de l’ultra-libéralisme et de l’obscurantisme, le Brésil revient enfin à gauche. Mais que la victoire fut longue à se dessiner !

Le danger des droites radicalisées

En septembre, les sondages, unanimes, plaçaient invariablement l’ancien leader syndical loin devant le président sortant. La seule incertitude portait sur l’ampleur du triomphe du candidat pétiste : victoire haut-la-main dès le 1er tour ou large succès au second ? On le sait, la réalité fut tout autre. Au soir du 1er tour, Lula plafonnait en-dessous de 48,5 % et, surtout, Bolsonaro dépassait largement les 43 %, ce qu’absolument aucune étude d’opinion n’avait vu venir.

Cette « résilience » de la droite extrême brésilienne, après le fiasco de la gestion pandémique et plus généralement à l’issue d’un mandat calamiteux à tout point de vue, interroge. Après Trump, Bolsonaro prouve que les droites radicalisées font florès sur fond de crise systémique du capitalisme.

Elles tance en quelque sorte sur leur droite les secteurs « progressistes » de la bourgeoisie pour mieux assurer la domination de cette dernière en tant que classe.

Pour une partie de la petite bourgeoisie, mais aussi – hélas ! – des nôtres, le sentiment que tout va de mal en pis, au lieu de se muer en légitime colère contre les véritables responsables de leurs difficultés, est dévié, en raison du poids de l’idéologie dominante, mais aussi des manquements de la gauche, vers divers boucs-émissaires : étrangers, « bobos des centres-villes », écolos, syndicalistes, militantes et militants féministes… C’est sur des discours intolérants et mensongers que se fondent la force électorale des droites radicalisées. Gramsci avait décidément raison quand il écrivait : « Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et, dans ce clair-obscur, surgissent les monstres ».

Une « vraie » victoire à savourer !

La campagne menée par la droite et l’extrême droite chilienne contre le projet de constitution rédigée par la gauche l’a prouvé tout début septembre. Les populistes et les obscurantistes – qui sont souvent les mêmes – sont prêts à manier l’insulte et les fake news de manière tout aussi vicieuse qu’efficace pour arriver à leur fin. Avec les conséquences que l’on peut imaginer en terme de qualité du débat démocratique !

Il convient donc d’inverser le discours médiatique dominant sur la victoire de Lula. Il n’a pas fait « que » 50,9 %. Il ne l’a pas emporté que « d’un cheveu » ...

Il a en réalité réussi, grâce aux centaines de milliers de militants de gauche qui l’ont soutenu et aux millions de salariés qui ont voté pour lui, à battre l’appareil d’État qui s’était dressé contre son retour : la caste militaro-bureaucratique, les mafias qui infestent les couloirs du pouvoir central, les Églises les plus réactionnaires, les médias de caniveaux, les administrations provinciales corrompues, ainsi que les magnats de l’agrobusiness.

Quoi qu’on pense du programme et du discours « au-dessus des classes » de Lula dans cette campagne, c’est bien ce Brésil qui a été défait, malgré les millions de reals versés à Bolsonaro par ses donneurs d’ordre, malgré les mensonges véhiculés sans vergogne par les pires tabloïds et les barrages montés en toute hâte par la police routière à proximité de certains bureaux de vote pour dissuader l’électorat populaire de participer au scrutin.

Par delà l’océan

Face à cette droite revancharde et fanatisée – qui se croit vraiment le seul « porte-parole » du « peuple » aux prises à des « élites » déconnectées –, la gauche ne doit pas baisser la garde. Sur les réseaux sociaux, quelques heures après la victoire de Lula, circulaient déjà les rumeurs sur un éventuel coup d’État militaire appuyé sur les nervis du pouvoir. Les souvenirs de l’improbable invasion du Capitole sont encore dans toutes les têtes. Quoi qu’elle entreprenne contre les bolsonaristes les plus fanatiques en cas de remise en cause de la chose votée, que la gauche brésilienne sache qu’elle a notre soutien inconditionnel.

Que la victoire de Lula au Brésil nous serve par ailleurs de leçon. Face au bloc des droites que dessine le vote de LR en soutien à la macronie lors des différentes motions de censure soumises par la Nupes ces derniers jours comme face à la montée du péril extrémiste incarné par le RN, la gauche française doit, au-delà de ses différences – parfois légitimes – , se rassembler sur l’essentiel : hausse des salaires, baisse du temps de travail, reconstruction d’une Sécu digne de ce nom, bifurcation écologique, absolue vigilance féministe et VIe République parlementaire et citoyenne. La clarté sur ces principes est le gage de nos futures victoires communes.

A (re) lire un article de Démocratie&Socialisme n°298 (septembre 2022) : "le retour de Lula et les contradictions du lulisme"

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