GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Rapport Machelon : attention danger!

Une lettre du ministre de l'intérieur donnait mission, le 20 octobre 2005, à la commission dite « Machelon » de revoir « l'articulation entre les associations cultuelles régies par la loi de 1905 et les associations culturelles régies par la loi de 1901 ».

Cette commission de 16 membres, tous dévoués à la cause religieuse, a auditionné 45 personnes dont 21 religieux et 2 responsables laïques.

Le rapport Machelon, rendu public le 20 septembre 2006, rend hommage à la mise en place en 2002 par Lionel Jospin d'une commission permanente de concertation entre le gouvernement et l'épiscopat, qui avait « toiletté » en son temps la loi de 1905 dite de Séparation des Eglises et de l'Etat.

La commission Machelon propose la modification de l'article 2 de la loi de 1905 « La République ne reconnaît, ne salarie, ne subventionne aucun culte » .

Elle préconise la création d'un Code administratif des cultes et recommande de renforcer les possibilités d'intervention des collectivités territoriales envers les cultes sans plafond des montants des aides et subventions et d'assouplir le statut des associations cultuelles.

Réinstaller le religieux dans l'espace public ?

Ainsi, elle rappelle l'idée posée dans la circulaire du 21 avril 2006 : le développement des baux emphytéotiques administratifs pour toutes les associations à connotation religieuse avec possibilité de rachat en fin du bail.

Le rapport propose aussi que les associations « à objet religieux » (loi de 1901) puissent devenir des associations cultuelles (loi de 1905) pour bénéficier d'avantages fiscaux. Il faudrait pour cela modifier l'article de la loi de séparation attribuant le terme de « cultuel » aux associations « qui exercent exclusivement des activités religieuses » en remplaçant « exclusivement » par « principalement »...

Ce rapport s'attache donc, conformément aux vœux du Ministre de l'intérieur, à étioler l'article 2 de la loi de 1905 et à réinstaller confortablement le religieux dans l'espace public. Il insiste notamment sur les possibles formes de financement public de construction des lieux de culte. Il élargit la notion " d'association cultuelle " jusqu'à celle " d'association culturelle et sociale " et réaffirme au passage l'intérêt du statut concordataire de l'Alsace-Moselle laissant entrevoir qu'il serait souhaitable de l'étendre à l'ensemble du territoire par le biais d'accords Etat-Eglises.

Le même jour, André Rossinot, Radical et membre de l'Ump, Maire de Nancy, remettait aussi un rapport insistant sur la nécessité de réaffirmer la laïcité dans les services publics, sans jamais se référer à la loi de 1905, renvoyant à la mise en place d'une « charte » sur laquelle, localement, les fonctionnaires pourraient s'appuyer. Le texte est plus enveloppé, revient sur les notions de principes et de valeurs de la laïcité tout en avalisant la proposition réitérée depuis des années par les cléricaux : renforcer l'enseignement du fait religieux à tous les étages de la scolarité.

Et dans notre parti ?

Le 28 juin dernier, Jean Glavany a déposé une proposition de loi visant à promouvoir la laïcité dans la République ; à y regarder de près, l'esprit du texte est proche de celui de Rossinot.

Républicain et socialiste, j'ai toujours défendu l'idée que la question sociale et la question laïque ne se séparent pas.

Rappelons-nous en effet ce combat historique qui lie les deux questions : à la fin du XIXe siècle, le mouvement ouvrier a lié son combat d'émancipation sociale à celui pour la laïcité de l'école puis de l'état :

  • liberté syndicale en 1884, les ouvriers s'organisent pour défendre leurs intérêts contre ceux de la classe dominante ;
  • en 1880 les représentants des « influences sociales » (en particulier les ecclésiastiques) sont exclus du Conseil supérieur de l'Instruction publique ;
  • en 1881 : gratuité des écoles primaires publiques, des écoles normales et des écoles maternelles,
  • 1882 : enseignement obligatoire pour les enfants des deux sexes de 6 à 13 ans, laïcisation des programmes, les ministres du culte perdent leur droit d'inspection,
  • en 1886 l'enseignement dans toutes les écoles publiques est confié à un personnel laïque ;
  • 9 décembre 1905 : vote de la loi de Séparation des Eglises et de l'Etat , fin de plus d'un siècle de concordat.
  • Défendre la loi de 1905 :

    Proclamant en principe institutionnel que « La République assure la liberté de conscience », la loi interdisait le financement direct et indirect des religions selon l'article 2 :« La République ne reconnaît, ne subventionne, ni ne salarie aucun culte ».

    Pour Jean Jaurès: « La loi de séparation, c'est la marche délibérée de l'esprit vers la pleine lumière, la pleine science et l'entière raison ».

    Pour Ferdinand Buisson, président de la Commission parlementaire « La séparation n'est pas le dernier mot de la révolution sociale, mais elle en constitue indéniablement le premier ».

    Les religions, qui relèvent de choix privés de mode vie et reposent sur des données irrationnelles, ne doivent ni pouvoir imposer leurs dogmes à tous, ni régir la société, au prétexte qu'elles s'inscrivent dans une réalité historique. Et ce y compris lorsque des communautés s'organisent en association.

    C'est pourquoi nous devons nous prononcer sans ambiguïté pour l'application de la loi de 1905, l'abrogation du Statut clérical d'Alsace-Moselle, l'attribution des fonds publics aux seuls établissements scolaires publics.

    Eric Tollenaere, Responsable FMDS 54, membre de la coordination nationale.

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