GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

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Élections : le national écrase le local

Dans le cadre des échanges que nous menons avec Picardie debout !, la formation politique lancée par notre ami François Ruffin dispose d’une carte blanche mensuelle dans nos colonnes. Ce mois-ci, Guillaume Ancelet revient sur une des principales leçons des scrutins de juin-juillet.

La dernière séquence législative n’est toujours pas refermée puisqu’en ce début de mois de septembre, nous n’avons toujours pas de Première ministre issue du Nouveau Front populaire. Nous y avons gagné un sursis, par un sursaut républicain, à l’arrivée à Matignon de l’extrême droite et à sa majorité à l’Assemblée nationale.

Nous voulons le pouvoir

Arrivé en tête, le Nouveau Front populaire doit pouvoir prouver aujourd’hui qu’il peut être utile aux gens dans la perspective d’améliorer leur vie, un peu. Sur l’école, la santé, le travail, la retraite, le sport, etc., il nous faut prouver l’intérêt du vote de gauche, pour matérialiser le discours et les promesses de campagne, pour rompre avec le macronisme et pour endiguer la vague massive de votes RN. Pour cela, il faut imposer partout le résultat du vote démocratique.

Oui, le Nouveau Front populaire n’a pas la majorité absolue, mais il est arrivé en tête. Oui, les Françaises et les Français veulent du changement. Non, les gens ne veulent pas le RN au pouvoir. Voilà, à partir de ces trois prémisses, les raisons d’imposer à Emmanuel Macron la nomination d’un Premier ministre du NFP. Nous en avons terriblement besoin nationalement, mais également localement.

Leçon d’humilité

Un des enseignements de la campagne législative doit attirer notre attention de manière prioritaire : la politique nationale et son expression médiatique écrasent l’échelon local. Naïvement, nous pouvions penser que les figures locales populaires, reconnues, légitimes, ancrées dans leur territoire depuis parfois plusieurs décennies, résisteraient au vote Rassemblement national plébiscité aux élections européennes. Il n’en est rien.

Pour preuve : Fabien Roussel (PCF) et Jean-Louis Bricout (LIOT) ont été éliminés dès le premier tour. Sébastien Jumel (PCF), Sébastien Rome ou Xavier Walter (LFI) battus au second tour par des tocards parachutés avec l’étiquette RN. Faire douter François Ruffin et les centaines de militants de la première circonscription de la Somme avec une candidate fantôme. La droite républicaine non plus n’y a pas échappé. Julien Dive a galéré dans l’Aisne à battre un candidat RN qui n’a mis que deux fois les pieds dans la deuxième circonscription.

Bref, il nous faut combattre pied à pied localement, porte après porte, dans les entreprises, nos associations sportives par exemple, la vague de la résignation, de l’indifférence, du vote RN. Mais c’est envoyé au casse-pipe les militants, même les plus aguerris, si dans le même temps, nationalement, les discours ne collent pas avec les préoccupations de nos concitoyens.

Nous avons constaté durant la campagne législative, ô combien nous devions rassurer, donner des gages de notre crédibilité avant de pouvoir engager une conversation de fond avec les électeurs. Des cristallisations autour des personnalités de sujets clivants, traités sur un ton peu rassurant, ont miné nos conversations et donné du fil à retordre aux équipes en campagne.

Les figures nationales écrasent les figures locales. Les thèmes nationaux écrasent les thèmes locaux. Les politiques nationales écrasent les politiques locales. À Flixecourt, où François Ruffin a fait sa rentrée politique, la municipalité, communiste depuis des décennies, œuvre pour le sport et la culture par une politique d’aménagement de la ville hors du commun. Piscine, patinoire, salle de spectacle, terrain de padel, skatepark, squares et autres espaces musculation offrent à la ville et à ses habitants le plus bel équipement de tout le département. Pourtant, le RN y est désormais surreprésenté lors des élections nationales et européennes.

Articuler les échelles

Retisser le lien permanent entre l’échelon national et l’échelon local doit nous guider. Au risque sinon d’invisibiliser, d’annuler les bénéfices des politiques de gauche dans les mairies, les communautés de communes, les départements, les régions d’en dégoûter les élus locaux et qu’ils et elles choisissent, en 2026, de baisser les bras.

Le pire qui puisse nous arriver : que les élus locaux, militants de terrain, syndicalistes, bénévoles des associations soient dégoûtés des politiques nationales et se résignent à leur tour. Portons nationalement les victoires locales, les réussites des équipes d’élus de gauche, pour les propager partout dans le pays. Que la gauche se fasse aimer pour ce qu’elle fait de bien : changer la vie des gens partout, un peu en mieux.

Cette tribune de Guillaume Ancelet, président de Picardie debout !, a été publiée dans le n°317 de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

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