GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Écologie

Biodiversité : le capitalisme sur le banc des accusés

Début mai, la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a rendu public son dernier rapport faisant état de l’effondrement des espèces et du vivant, partout dans le monde1. Le mode de production dominant en est le principal responsable : écologie et capitalisme sont décidément incompatibles.

Nous sommes au bout de la démarche de sensibilisation aux dégâts environnementaux causés par les activités humaines. Cette démarche était nécessaire : il fallait convaincre largement les femmes et les hommes de leur impact sur le vivant, sur les sols, sur l’air et le climat. C’est chose faite. Et il faut rapidement et radicalement passer à l’action car, oui, la bataille culturelle de l’écologie, en tant que science qui étudie les interactions entre les êtres vivants, est gagnée.

Il restera toujours des réfractaires : ces gens impossibles à convaincre, les climato-sceptiques, ou ces opposants farouches, les capitalistes. Ce n’est pas de bataille d’arguments dont la survie de l’humanité a dorénavant besoin, mais de rapports de force, de contraintes réglementaires... et de victoires politiques.

Une extinction qui s’accélère

Le rapport de l’IPBES, lourd de 1 800 pages d’évaluation scientifique, vient, une fois encore, démontrer ce que nous savons depuis des dizaines d’années. Le constat est sans appel : la biodiversité s’éteint à un rythme effréné. Sur huit millions d’espèces animales et végétales recensées sur terre, c’est un million d’entre elles qui sont maintenant en cours d’extinction. Les zones humides disparaissent. À l’échelle d’une génération (de 1990 à 2015), près de 300 millions d’hectares de forêts vierges ont été rayés de la carte.

Or, la biodiversité est la condition de la survie de l’humanité. Ainsi, tant en matière d’alimentation, de médecine que d’énergie, nous devons notre existence à la richesse de la nature. Deux données en disent long : en 1980, 30 milliards de tonnes de ressources naturelles étaient extraites annuellement. Aujourd’hui, c’est le double qui est détruit, soit 60 milliards de tonnes. Et le rythme s’accélère inexorablement. Idem pour les émissions de gaz à effet de serre qui ont été multipliées par deux. Idem pour les zones urbaines... La liste est longue.

Un autre mode de production est nécessaire

Le rapport pointe du doigt les principales causes de la détérioration du vivant, « par ordre décroissant : les changements d’usage des terres et des mers ; l’exploitation directe de certains organismes ; le changement climatique ; la pollution ; les espèces exotiques envahissantes ».

Il est possible de gagner la bataille. La nature reprendra ses droits dès que nous lui en donnerons la possibilité. Le rapport ouvre des pistes, suggérant de regarder du côté des peuples autochtones, soucieux des rapports qu’ils entretiennent avec les sols et les ressources naturelles. Cette invitation à regarder ce qui peut se faire mieux, ailleurs, est aussi une invitation à revoir entièrement nos modes de production.

Des objectifs précis et des financements possibles

Il est possible de gagner la bataille. En France, nous devons protéger les espaces naturels, augmenter significativement le nombre de ces lieux sanctuarisés. Nous devons décider maintenant de réduire drastiquement notre consommation de surfaces agricoles en fixant une échéance à l’objectif zéro artificialisation nette, contenu dans le plan Biodiversité du gouvernement. Nous devons contraindre à la transition agro-écologique en soutenant les agricultures biologiques, urbaines et les méthodes type permaculture qui ne doivent plus être les marginaux du système de production alimentaire.

Nous devons prendre l’argent là où il est, dans les grandes entreprises, qui sont la source de nombreuses pollutions et impacts environnementaux, via l’impôt, et orienter l’argent public vers la recherche et les comportements vertueux.

Enfin, la gauche au pouvoir, il sera peut-être temps de faire comme toutes ces petites villes en transition2 qui ne font plus reposer les questions environnementales sur une seule personne « adjointe en charge de », en supprimant le Ministère de l’écologie et de la transition énergétique. Comme la question sociale, la question écologique doit être au cœur de l’action publique. C’est à ces deux piliers indissociables que l’on reconnaîtra une politique de gauche, tournant résolument le dos au libéralisme.

Marlène Collineau

  1. En anglais : Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services. Groupe international d’experts, ce « GIEC de la biodiversité » a été créé en 2012. Les principales données sont consultables en ligne : https://www.ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr.
  2. Le réseau villes en transition rassemble des communes ayant pour objectif d’assurer la résilience (capacité à encaisser les crises économiques et/ou écologiques) face aux défis suivants : dérèglement climatique et pic pétrolier.

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