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La Cour de cassation à rebours du droit du travail !

Dans cet article écrit au lendemain de l'avis de la Cour de cassation du 17 juillet 2019 sur le "barême Macron", nous contestions les arguments mis en avant par cet avis. D'ailleurs quelques jours seulement après l’avis de la Cour de cassation, le conseil de prud’hommes de Troyes s’est de nouveau opposé à ce barème, dans un jugement rendu le lundi 29 juillet dernier. Signe que le combat continue !

Tandis que les entreprises déstabilisent leurs salariés (procès France Télécom, hausse des accidents du travail et des maladies professionnelles), la Cour de cassation a décidé, elle, de sécuriser ...les employeurs.

Jamais le droit du travail n’avait été conçu depuis son apparition pour sécuriser les employeurs. Le droit du travail c’est une contrepartie gagnée pour protéger les salariés de leur situation de subordination à l’employeur.

Alors que toutes les entreprises sont prises de la fièvre de l'individualisation (rémunération, évaluation de la performance), l'indemnisation du préjudice en cas de licenciement abusif est lui « barèmisé ».

Avis favorable au barème Macron pour les prud’hommes …

L'avis de la Cour de cassation du 17 juillet 2019 vient d'indiquer que le barème Macron n'est pas, contraire à la convention 158 de l'OIT. Concernant la Charte sociale européenne qui était elle aussi mobilisée, la Cour de cassation répond qu'elle n'est pas d'application directe. Et elle précise enfin que le barème Macron n'est pas contraire à l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'Homme qui prévoit le droit à un procès équitable.

L'Assemblée plénière précise en premier lieu qu'elle va rendre un avis, ce qui n'était pas forcément acquis, puisque jusque là elle s'était refusée à rendre un avis lorsque des normes internationales étaient invoquées. La Cour de cassation admettait en revanche depuis les années 90 que certains textes internationaux d'application directe soient invoqués utilement devant elle dans le cadre de litiges individuels.

… mais un avis, n'est pas un arrêt.

Cet avis ne s'impose pas aux juridictions de fonds (CPH et Cours d'appel). Pour les conseils de prud'hommes, il est donc possible que certains persistent, tant est vif le sentiment des juges d'être dessaisis de leur pouvoir d'évaluer la juste réparation du préjudice.

L'Assemblée plénière indique en premier lieu que l'article 6§1 de la CEDH ne s'applique pas à ce qui relève de l'ordre matériel (les dommages-intérêts versés en cas de licenciement abusif) et reste réservé à ce qui relève de l'ordre procédural. Le droit matériel aurait donc comme « ADN », selon la Cour de cassation, d'être moins bien protégé que le droit procédural. Lorsqu'a fortiori le droit matériel concerne la réparation du préjudice, on peine à admettre la pertinence de cette distinction.

La Cour de cassation, considère ensuite que la Charte sociale européenne, et précisément son article 24 qui prévoit en cas de licenciement « une indemnité adéquate ou toute autre réparation appropriée » n'étant pas d'application directe, elle n'a pas à statuer sur cet argument. C'est notamment sur le fondement de cet article que la Finlande s'est vue condamnée pour le barème qu'elle avait cru pouvoir mettre en œuvre pour les licenciements abusifs et nuls.

Enfin, la Cour estime que l'article 10 de la convention 158 de l'OIT  qui prévoit une indemnité adéquate ou toute autre réparation considérée comme appropriée en cas de licenciement, doit s'apprécier comme une disposition qui laisse une marge d'appréciation à l’État, dont l’État français a fait usage en établissant le barème Macron. Un bel exercice de distinction qui donne au terme « adéquate » une signification étonnante qui n'emporte pas la conviction.

Depuis l'adoption du barème Macron, les contentieux devant les conseils des prud'hommes ont baissé de 40 % (la pratique de la rupture conventionnelle n'est pas non plus étrangère à cette baisse) et  les études réalisées dans deux cours d'appel ont montré que les indemnités perçues par les salariés avaient baissées de 65 % (ici le barème a un effet direct).

Revenir sur la législation Macron

La CGT et la CGT-FO ont formé des recours devant le Comité des droits sociaux et devant l'OIT. Les solutions devraient être prononcées à la fin de l'année 2019 et pourraient venir s'opposer à l'avis rendu ce 17 juillet par l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation.

Dans ce cas le gouvernement pourrait être obligé de revenir sur sa législation. Les distinctions de la Chambre plénière apparaîtraient alors pour ce qu'elles sont : des contorsions. C'est ce que GDS souhaite.

En période de chômage de masse, la réparation intégrale du préjudice de chaque salarié, considéré dans sa singularité, doit triompher.

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