GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Rapport de Virville : Des pas de plus pour la destruction du droit du travail

M. Fillon est le contraire incarné du dialogue social. Sa méthode commence à être connue : un prétendu rapport d'experts, une pseudo concertation, puis une loi au pas de charge au Parlement à majorité Ump. Il l'a pratiqué pour les retraites, pour la suspension de la loi de modernisation sociale, pour le contournement des 35 h, pour la destruction de la hiérarchie des sources de droit du travail, pour la mise en concurrence du service public de l'emploi, et voilà qu'il recommence avec la commission dite de Virville, qui propose 50 pistes pour mieux réduire le droit du travail.

Quel contraste avec les discours de Chirac promettant une « grande loi pour l'emploi ». Avec Fillon-De Virville, ce sont des petites lois pour le désemploi.

D'un côté le bonimenteur présidentiel, de l'autre le petit désosseur de droits.

Avec Fillon-de Virville, c'est tout pour le Medef, rien pour les salariés, rien pour l'emploi.

Car de quoi nous parle t on ? De « contrats de mission » ou de « projets » que le Medef réclame depuis des années. C'est-à-dire une précarité prolongée au gré du seul employeur qui va décider s'il vous prend pour 3 ou 5 ans, comme il veut.

Ce ne sera plus seulement les jeunes qui n'auront pas d'avenir, mais des moins jeunes, des cadres, des adultes qualifiés, embauchés à horizon borné : problème pour le loyer, problème pour un emprunt, problème pour s'installer, problème pour une famille, pour la naissance d'un enfant… C'est long cinq de précarité et d'incertitude.

Et si vous être ré embauché pour 5 autres années, c'est une vie d'instable qui s'annonce pour les « salariés qualifiés ». Mais qui est visé ? En quoi cela permettra t il plus d'embauche, alors qu'il est si facile de licencier pour motif économique à n'importe quel moment ?

Est-ce que le Parlement et M. Fillon vont alléger les primes de précarité, les contraintes horaires, rendre plus difficile la contestation de la fin du contrat, de son motif ? Va t on vers des contrats de « loueurs de bras » ou « loueurs de cerveaux » qui remplaceraient le droit courant du contrat de travail en Cdi ?

Et puis cette troisième forme de rupture du contrat de travail , ni licenciement, ni démission, qu'a t elle à voir avec l'emploi et la modernisation du code du travail ? Il s'agit de faciliter des transactions, généralement avantageuses pour l'employeur, obtenus sous la contrainte ou le chantage, dans le secret, évitant les prud'hommes, contournant le droit, de gré à gré ! Là encore, c'est passéiste, dérégulateur, ca va contre les normes collectives et l'ordre public social.

Après avoir suspendu la loi de modernisation sociale qui permettait un contrôle plus important des licenciements, après avoir proposé de faire exploser la hiérarchie des normes du droit du travail et annoncé que, par accords d'entreprise, les accords de branche pourraient être mis en cause, et le « principe de faveur » battu en brèche, Fillon en rajoute inlassablement !

Qu'est-ce que ces « conseils d'entreprise » sinon un moyen pour réduire encore les « délégations du personnel unique » mises en place par la loi quinquennale de MM Balladur-Giraud en décembre 1993 ? Le but est qu'il y ait moins d'élections, moins d'élus et moins d'heures de délégations : ce, dans des petites entreprises où déjà il n'existe que peu d'élus, peu de syndicats, peu d'activité par exemple, des Chsct, pourtant si indispensables en matière de sécurité (légionellose, AZF, maladies nosocomiales, maladies professionnelles en hausse, stress accru…)

Qu'est-ce que ces « commissions paritaires d'interprétation des accords » ? Alors que là où elles sont prévues, elles fonctionnent peu, du fait du refus général du patronat de négocier ?

Quid des 50 autres mesures envisagées par de Virville (le licencieur de Renault-Vilvoorde, ancien du cabinet de MM Fabius et Soisson) ? Des contrats écrits pour tous ? Bien, ca ne peut pas faire de mal. Jusqu'à présent c'était plutôt la droite qui le refusait en prétextant que cela faisait trop de paperasse pour les petits employeurs… .Ce qui compte de toute façon, ce sont les contrats écrits atypiques (Cdd, intérim, temps partiels, saisonniers, etc.…) Le Cdi peut aussi le devenir, mais le bulletin de paie est jusqu'à présent le meilleur instrument pour détailler tous les éléments de ces contrats-là…

M Fillon est l'homme qui a cassé en décembre 2002, un accord pourtant majoritaire dans la restauration, (lésant gravement 750 000 salariés) qui a piétiné après le 9 janvier 2003 un vote majoritaire et une opposition syndicale majoritaire à Edf, qui a signé un accord minoritaire le 15 mai dernier sur les retraites, qui a étendu deux fois, le 26 juin et le 13 décembre, un accord minoritaire sur les intermittents du spectacle, qui a imposé le 5 décembre, un décret sur l'affaiblissement de la médecine du travail contre l'avis majoritaire écrasant de 6 syndicats nationaux... se fait le soudain prosélyte des "accords majoritaires".

Dans un des ses derniers projets de loi, il impose donc un principe "d'accord majoritaire" où il suffit d'être 3 syndicats sur 5 pour que l'accord soit valable ! C'est aussi ridicule et aussi stupide, aussi grotesque, aussi inadmissible que si, à l'Assemblée, au lieu de compter le nombre de députés, on comptait le nombre de partis pour décider s'il y a ou non une "majorité" en faveur d'une loi.

Défendons le droit du travail. C'est la déréglementation qui crée du chômage !

Quand vous déréglementez, vous faciliter l'exploitation, le surtravail, et donc, vous faites travailler chacun deux fois plus, et c'est cela qui évite d'embaucher

Défendre le droit du travail, c'est défendre le droit au travail !


A lire aussi :

Toilettage canin au salon du Medef sur le site CQFD

Les membres de la Commission :

Michel de VIRVILLE

Secrétaire Général et DRH du groupe RENAULT

Paul-Henri ANTONMATTEI

Professeur à l'Université de Montpellier

Gilles BELIER

Avocat

Jean BESSIERE

Direction Départementale du Travail, de l'Emploi

et de la Formation Professionnelle du Rhône

Sylvain BREUZARD

Norys - Président du CJD

Hubert FLICHY

Avocat

Pierre LANQUETIN

Ancien Conseiller à la Chambre Sociale de la Cour de Cassation

Anne de RAVARAN

Directeur Juridique RH du groupe THALES

Jean-Dominique SIMONPOLI

Directeur de Lasaire

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