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Pourquoi la question de l'épidémie de légionellose est-elle très politique ?

Pourquoi la question de l'épidémie de légionellose est-elle très politique ?

Parce qu'elle met en jeu des politiques de prévention (inexistantes), de droit du travail (mutilées) et de restrictions budgétaires (éhontées).

Défaut d'information et de prévention :

Tous les spécialistes savent que la « légionellose » n'est plus seulement une épidémie qui a frappé brutalement une convention d'anciens légionnaires aux Etats-Unis en 1976. C'est, en France, au moins depuis dix ans, une maladie en expansion constante : de quelques dizaines de cas en 1988 on atteint mille cas en 2000 et presque 60 morts par an. La presse a fait état des cas de légionellose qui ont retardé l'ouverture de l'Hôpital Pompidou en provoquant quatre morts : parmi les maladies nosocomiales, et les milliers de morts qu'elles provoquent chaque année, la légionellose pouvait passer « inaperçue » mais chacun sait qu'elle est provoquée par des climatisations en mauvais état, et qu'on peut donc aussi bien la rencontrer dans des lieux publics, des lieux de travail ou dans la rue, à côté de n'importe quelle branche bouche d'aération des grandes stations de métro parisien. (Par exemple, l'adjoint à l'urbanisme de la Mairie de Paris, Jean-Pierre Caffet, le jeudi 8 janvier 2004, expliquait que la gigantesque installation d'aération du forum des Halles n'était « pas aux normes » et que 15 millions d'euros seraient investis à parti de fin 2004 pour y remédier. )

Mais, il n'y a pas eu d'alerte, de prévention et d'information suffisante au plan national alors qu'on voit cette bactérie surgir et tuer de plus en plus fréquemment. Pas assez d'information dans les Chsct des entreprises, ni dans les services publics concernés, ni dans les médias.

Défaut de droit du travail :

Normalement les Chsct devraient traiter de ces questions de prévention et d'alerte, et les services de sécurité et d'hygiène devraient disposer de moyens de contrôle élargi. Installations défectueuses et entretien insuffisant sont les principaux responsables. Au premier rang des accusés, les tours aéro-réfrigérantes situées sur les toits des immeubles, utilisées dans les dispositifs à circuit ouvert. Vu la généralisation de ces installations, il faut impérativement des entretiens réguliers et pour cela, une surveillance, une pression et un contrôle systématique.

Les comités hygiène sécurité conditions de travail ont cette tâche dans les entreprises. Mais ils disposent de trop peu de moyens, de temps, de droits. Des règles nouvelles ont été édictées aux articles R. 232-5 à R. 232-5-14 du Code du travail concernant l'aération et l'assainissement des locaux de travail (ventilation mécanique, air neuf, air recyclé, locaux à pollution spécifique, etc.). Le Chsct doit être informé des conditions de recyclage de l'air dans les locaux de travail avec ventilation ainsi que des consignes d'utilisation et des contrôles (R. 232-5-9).

Il semble que dans le Pas-de-Calais, l'usine Noroxo n'a guère abusé de l'usage régulier et préventif de ces devoirs.

Vers le 15 octobre, la direction de l'usine procède à un examen qui, huit jours plus tard, livre des ' résultats préliminaires » alarmants : le nombre de légionelles y dépasse en effet largement le taux qui, selon l'arrêté préfectoral visant l'entreprise, entraîne une fermeture automatique et immédiate du site.

La direction de Noroxo a procédé à une désinfection de son réseau d'eau par choc chimique, mais elle a refusé de fermer, résolue à n'avertir l'administration qu'une fois les résultats définitifs connus. Soit le 27 octobre.

Ni prévention, ni urgence, ni transparence. Pourtant les salariés de l'usine en premier lieu étaient concernés et vulnérables.

Restrictions budgétaires tueuses :

Le gouvernement Chirac-raffarin, fait des économies sur tout : les maisons de retraite, la recherche… Mais aussi, le recrutement, la formation, et l'augmentation du nombre des inspecteurs de contrôle pour les sites dangereux, dits « Seveso ». Il avait pourtant été décidé des mesures exceptionnelles en la matière par le gouvernement Jospin, après la catastrophe d'Azf. Ces mesures ont, pour l'essentiel été « gelées ».

Ainsi, la lettre de l'usine Noroxo, déjà tardive, est-elle arrivée dans une administration en manque d'effectifs. Ce fut le 29 octobre, le pli de Noroxo qui mentionnait un taux de 750000 légionelles par litre d'eau et détaillait les mesures prises - finit par arriver à la Drire, dans la case courrier de l'inspecteur chargé des installations classées du secteur de Harnes. Or la Drire a été obligée de reconnaître qu'il y avait dormi pendant douze jours.

«A cette période, l'ingénieur compétent se trouvait en effet en formation, justifie-t-on à la Drire. Or notre système de gestion du courrier prévoit que seuls les plis dont le caractère d'urgence est spécifié sur l'enveloppe sont ouverts en l'absence de leur destinataire. En l'occurrence, ce n'était pas le cas.»

Loin des ambitions - gelées - qui ont suivi le « choc » d'Azf, il y a toujours aussi peu d'agents de contrôle. Cette administration ne compte nationalement qu'une soixantaine d'inspecteurs capables d'effectuer 600 inspections par an, pour contrôler plus de 2 000 installations classées soumises à autorisation - sans compter les 15 000 sites soumis à déclaration. et l'inspecteur auquel elle était adressée, était en formation.

L'absence de prévention tue. Par la canicule comme par la légionellose. Ou les maladies nosocomiales

70 cas, 9 morts, et ce n'est peut-être pas fini.

C'est ainsi qu'une épidémie commencée le 15 octobre n'a été prise en charge qu'à partir du 10 novembre. Personne, alors, ne juge nécessaire de faire fermer le site - des nouvelles analyses menées début novembre ont montré que la situation s'était améliorée - ni même de dresser un procès-verbal d'infraction.

En revanche, la Drire adresse, le 13 novembre, une liste de questions complémentaires à la direction de l'usine. Il faudra encore une semaine pour accoucher d'un plan de lutte contre la légionelle dans la tour incriminée.

Neuf jours plus tard, des analyses révèlent une nouvelle détérioration de la situation - aujourd'hui jugée en partie responsable de l'extension de l'épidémie. Il semble même que des sujets aient pu être contaminés dans des garages voisins, comme à Harnes, au cours d'opérations de lavage des voitures.

Le Figaro qui relate une partie de ces informations nous dit également que « Roselyne Bachelot… a toutefois implicitement reconnu le besoin de renforcer les inspections sur les sites à risque légionelle identifiés en annonçant hier, l'affectation, dès 2004, d'une dizaine d'inspecteurs supplémentaires à la région Nord - Pas-de-Calais. Façon, peut-être, de répondre aux élus locaux de la région de Lens qui ont dénoncé - à l'instar du maire de Harnes, Yvan Druon, "le manque de moyens et de contrôles ».

Gérard Filoche

Rapport en 2001 :

Objet : Légionellose et maladies nosocomiales, Chsct, suite...

20 ans de Chsct, étude présentée par Gérard Filoche,

cf. Les éditions des Journaux officiels 2001

Avis et rapports du Ces,

Séance du 21 octobre 2001 Mandature 199-2004

p 24

c) Protection vis-à-vis des climatisations, ventilations : risques de légionellose

Encore inconnus il y a quelques années, de nouveaux risques apparaissent, notamment celui de la maladie dite du légionnaire.

Célèbre et ainsi dénommée car elle a été repérée aux Etats-Unis lors d'un congrès d'anciens légionnaires en 1976, elle progresse rapidement et n'a pas seulement été rendue spectaculaire

par les quatre morts survenus lors de l'ouverture de l'hôpital Pompidou.

Encore peu connue, moins sensible dans l'opinion que l'Encéphalite spongiforme bovine (ESB), la légionellose a néanmoins frappé 429 personnes en France en 1999, provoquant directement 23 morts. Les derniers chiffres pour l'an 2000 seraient autour de 950 victimes dont 90 morts : une telle progression régulièrement constatée depuis plusieurs années est inquiétante. La

légionellose est provoquée diffusée par une bactérie multi-résistante (BMR) qui se développe dans des appareils de climatisation, des tours aéro-réfrigérantes, en milieu chaud et humide.

Le diagnostic de la maladie est connu mais difficile car lors d'une incubation courte, les premiers symptômes ne semblent être qu'une fièvre, accompagnée de toux, qui s'aggrave brutalement et qui non soignée, non identifiée, devient rapidement mortelle. La progression de ce risque, révélée par des accidents récemment médiatisés, impose déjà et sans doute davantage à l'avenir, des mesures draconiennes d'entretien, de nettoyage des systèmes d'aération et de climatisation, ce qui rentre encore dans les prérogatives de suivi par les Chsct. Non seulement dans les hôpitaux mais dans aussi toutes les tours climatisées, et les grands ensembles industriels qui dépendent d'une ventilation collective.

Comment faire face à de tels risques nouveaux sans donner davantage de pouvoir c'est-à-dire de moyens, de connaissance, d'information et de formation aux Chsct ?

Des règles nouvelles ont été édictées aux articles R. 232-5 à R. 232-5-14 du Code du travail concernant l'aération et l'assainissement des locaux de travail (ventilation mécanique, air neuf, air recyclé, locaux à pollution spécifique, etc. ). Le Chsct doit être informé des conditions de recyclage de l'air dans les locaux de travail avec ventilation ainsi que des consignes d'utilisation et des contrôles (R. 232-5-9).

D'autres maladies professionnelles nouvelles et des risques de santé encore peu connus surgissent, (par exemple liés au stress dans certaines conditions de surcharge physique ou mentale du surtravail) ou les maladies nosocomiales dans les hôpitaux dont on estime qu'elles provoquent, parmi les malades, près de 10 10 000 morts par an… mais quels sont les risques pour les travailleurs de la santé ?). De même pour tous les risques du travail sur écran, activité puissamment développée sans que la réglementation soit probablement à la hauteur.

Des questions, inconnues à la naissance des CHSCT, il y a vingt ans, prennent de l'ampleur, obligent à des formations, des réactions adaptées, spécifiques. Elles contribuent à étendre d'autant le champ d'action de l'instance et les responsabilités de ses membres.

La légionellose en 10 questions

Qu'est-ce que la légionellose ? D'où vient son nom ? Combien de cas en France? Quels sont les modes de transmission ? Les traitements ? etc...

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