GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Port des charges pour les femmes : " Une approche chiffrée indicative"

Il en a fallu des années et des combats

pour limiter le port des charges par

les salariés. Souvent cela a commencé,

dans le code du travail, par la limitation

des «poids» pour les enfants, les

jeunes et les femmes. A partir de 1840.

Puis cela a été étendu aux hommes.

Le port de charges par du personnel

féminin de 18 ans et

plus était, hier encore,

limité à 25 kg (art. R

234-6 de l’ancien Code

du travail). Cela permettait

d’exiger des

conditionnements de 25

kg, on pouvait, en tant

qu’inspection du travail,

faire renvoyer des

sacs de ciment de 50 ou

100 kg quand on en

voyait dans les chantiers.

Le code du travail

«recodifié» par Fillon,

Larcher, Chirac, Sarkozy

et le Medef, sans

aucune concertation

sociale dans un silence

général, imposé au

Parlement par ordonnance de décembre

2004, promulgué le 12 mars 2007, entré

en vigueur le 1er mai 2008, a totalement

« oublié » cette limitation maxima : le

nouvel article L 4541-1 sur « la manutention

des charges » est vide.

Pourtant le nouveau Code précise, au

nom de l’égalité professionnelle

hommes-femmes, que les femmes pourront

porter le même poids que les

hommes. Bienvenue Mesdames les

salariées, vous pouvez porter le même

poids que les hommes au moment où il

n’y a plus de limites de poids dans la

loi…

Un inspecteur du travail de Paris

confronté à des salariées auxquelles on

fait porter des poids excessifs, vient

d’interroger par mel le ministère sur la

limitation des charges pouvant être

«traînées, poussées, tirées, ou soulevées

»

par des femmes.

« La disparition de l’article R 234-6 est-il

un « acte volontaire » qui sera réparé

dans un prochain décret en attente relatif

aux « oublis et erreurs » de la recodification

? »

L’ingénieur de prévention (bureau CT3

de la Direction générale du travail,

DGT) répond, après un échange avec

les « pilotes » (sic) de la recodification,

qu’il s’agit bien d’une «suppression

volontaire» et qu’il reste à vérifier

«avec davantage de précision les incidences

éventuelles» (sic).

Au moins 11 millions de salariées sont

concernées, dans les usines, les hôpitaux,

les cantines, les commerces,

même les bureaux où il y a des livraisons,

et les incidences sur les hommes

ne seront pas « éventuelles » mais certaines!

Retour barbare ? La novlangue n’étouffe

pas les « recodificateurs » et la DGT

(dirigée par Jean-Denis Combrexelle)

ajoute ses «remarques» : « Les récentes

données scientifiques des physiologistes

et des ergonomes tendent à ne

plus appréhender un seuil indépendamment

du contexte (facteurs aggravants

tels que l’ambiance physique, la cadence,

la durée d’exposition…)».

Ce n’est plus de la novlangue, c’est trop

clair : en matière de manutention

manuelle, il n’y aura plus de seuil maxima

mais « une approche chiffrée indicative

» selon l’environnement !

Qu’est-ce que cela veut dire? Que les

petites femmes de Paris ne devront pas

porter 25 kg mais sans doute que les

solides femmes de banlieue le pourront?

Question d’ambiance physique…

L’un des « recodificateurs

» avait osé

écrire en 2007 dans

la préface de la première

édition du

code passé à l’acide

des exigences du

Medef : « Il faudra

des mois, voire des

années, pour que le

nouveau code révèle

tous ses secrets »

ajoutant : « ce sera

un effort colossal

pour les usagers ».

En matière de port

de charges, en effet,

il va falloir désormais

des femmes

et des hommes

colosses…

Gérard Filoche

(lire aussi Siné Hebdo

du mercredi 11 mars 2009)

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