GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Syndicats

Plaidoyer pour le syndicalisme, outil du salariat

Notre société politique fait comme si le syndicalisme ne devait pas exister. Pourtant l’histoire comme l’actualité récente montrent combien il est déterminant pour la politique et la « gouvernance » du pays.

On veut parler ici d’un syndicalisme de combat, qui ne se contente pas d’accompagner les actes des gouvernants. D’un syndicalisme qui entend encore façonner la société par des actions concrètes s’enracinant dans une pratique riche, diverse, liée au réel de façon indissoluble. Cette pensée pratique est commandée non seulement par la complexité des situations, mais aussi – en un temps de capitalisme triomphant qui broie la nature et les hommes – par la nécessité de la résistance.

Garants de la solidarité

Le syndicalisme qu’il faut défendre s’attache à sauver l’idée de la solidarité incarnée notamment, mais pas seulement, par une Sécurité sociale attaquée de toute part par les zélateurs d’un secteur privé qui en veut toujours davantage. Dire qu’il faut baisser les « charges » sociales, le répéter à l’envi, pour que ce mantra rentre dans le crâne de celles et ceux pour qui réfléchir est devenu un luxe : tout cela est le fait d’une classe dominante aujourd’hui parée de tous les pouvoirs. Ce sont ces oligarques aux fortunes de plus en plus exorbitantes qui font la loi au travers d’une représentation politique qu’ils mettent à leur service.

Ainsi en est-il, idée relancée par le gouvernement Macron, d’une énième réforme des retraites comme si cet enjeu politicien devait dépasser en importance la question de l’emploi laissée en friche depuis des décennies.

Cette sempiternelle réforme des retraites, véritable instrument idéologique, a pourtant été mise en échec par la mobilisation des syndicats, la CGT au premier chef, mais aussi la FSU, Solidaires et même FO. Le Covid n’a pas grand-chose à voir avec ce recul du gouvernement même s’il a pu servir de prétexte. La CFDT, quant à elle, malgré sa consécration comme « premier syndicat de France », semble désormais incapable, à force de capitulations et de compromissions, de mobiliser ses adhérents contre les attaques significatives et caractéristiques contre le monde du travail.

Ferments du débat public

L’action syndicale reste donc primordiale. Les syndicats, dans une société malade à cet égard, restent des lieux privilégiés d’une démocratie attachée aux réalités sociales. Mieux que les « think tanks » qui éclosent ici ou là dans le paysage politicien, les organisations syndicales, qui n’abandonnent pas a priori la pensée critique, restent des lieux d’élaboration d’une réflexion collective indispensable à une transformation sociale modernisée.

Cela contribue à alimenter les partis ou mouvements politiques qui se revendiquent de la gauche ou qui en ont conservé l’esprit historique. C’est le cas, indubitablement, de la France insoumise qui puise son programme et sa conscience politique dans sa proximité avec des militants appartenant aux syndicats dits « de transformation sociale ».

Il fut un temps pas si lointain où les adhérents du Parti socialiste devaient obligatoirement appartenir à une organisation syndicale, comme le prévoyait l’article 10 de ses statuts votés au congrès d’Épinay. Cette obligation fut retirée, sans débat ou dans un silence complice, alors que François Hollande était le Premier secrétaire du parti. Le fait a sans conteste accompagné le glissement du parti dans un néo-libéralisme teinté, pour sauver les apparences, de quelques traces de social. Décidément s’agissant de la décrépitude du PS, rien n’aura été fait au hasard.

Expressions du monde du travail

Les organisations syndicales sont par nature chevillées au monde du travail ; elles en sont l’expression multiple et démocratique. Nier les syndicats, les mépriser comme on a tendance aujourd’hui à mépriser les corps intermédiaires, n’est pas de bonne politique. Si on avait davantage écoutés l’ensemble de son personnel au travers de leurs organisations, l’hôpital public, pour prendre cet autre exemple crucial, ne serait pas au point de rupture où il se trouve aujourd’hui.

Les syndicats, parce qu’ils mettent la notion d’organisation au centre de l’action, parce qu’ils sont enracinés dans les forces productives de ce pays, ont également une fonction de lanceurs d’alerte. C’est pourquoi il est crucial d’agir contre les discriminations syndicales dont sont victimes les militants. Ces pressions parfois violentes sont l’une des causes de l’affaiblissement et de la vulnérabilité des syndicats.

Si le syndicalisme est affaibli, c’est aussi qu’il a trop souvent, ces dernières années, subi des échecs cinglants, en butte à des pouvoirs politiques inconscients et rétrogrades qui désespèrent ainsi le monde du travail. Le syndicalisme est un ferment démocratique propre à défendre et renforcer la république sociale.

De par sa situation de proximité naturelle avec le monde ouvrier, il est au cœur des problématiques et des débats sur la réindustrialisation du pays, sur les relocalisations des entreprises et sur la défense des services publics. Faisons donc le vœu d’un syndicalisme suffisamment fort et autonome, fondé sur une réflexion politique de défense de l’intérêt général, pour proposer et construire le progrès social et démocratique.

Cet article de notre camarade  Jean-Marc Gardère a été publié dans le numéro de février 2022 (n°292) de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

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