GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

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"Nationalisation" n’est pas un gros mot !

A gauche et dans le mouvement syndical, les interrogations sont nombreuses. Au sein du Parti socialiste, aussi. Car le débat existe au sein même du gouvernement, et c’est normal face aux pressions de la finance internationale, face aux exigences du Medef.

Les engagements pris au cours de la campagne électorale ne suffisent pas pour déterminer comment mettre au pas un Lakshmi Mittal. Oui, comme nous l’avions défendu dans le texte de la motion « Maintenant la gauche, le social au cœur » lors du congrès de Toulouse, la question de la nationalisation est légitime. Il serait paradoxal que ce soit Mittal qui paraisse gagnant malgré la lutte de longue haleine des sidérurgistes lorrains et le soutien affiché du gouvernement. Sans parler du chantage qu’il exerce contre d’autres sites et contre d’autres gouvernements européens.

Or il est manifeste à la lecture attentive de l’accord signé avec Mittal que l’emploi n’est pas conservé de façon pérenne, que le fonctionnement des hauts fourneaux n’est pas assuré au delà d’avril 2013, que la filière de l’acier est incertaine (même sous future éventuelle version Ulcos, projet européen lointain – a échéance de 5 ou 6 ans ? - pour lequel Mittal n’a toujours pas postulé alors que la date limite de dépôt à Bruxelles est le 20 décembre 2012).

Donc la nationalisation est devenue le seul moyen, en la circonstance, de reprendre la main sur le dossier et de sauver à la fois l’emploi et la filière acier. Nationalisation n’est pas un "gros mot" encore moins un "mauvais signe", come l’affirment les néolibéraux : c’est au contraire une orientation positive, dans le sens du bon vent qui souffle contre le libéralisme ! Nationalisation, c’est à la fois une sanction, un sauvetage, une nécessité et un exemple ! Il y a une majorité d’idées dans notre pays pour une telle nationalisation, nos concitoyens veulent un état volontaire.

Et soyons clairs, il ne s’agit pas d’une nationalisation « temporaire » superficielle sorte de tour de passe-passe, visant à nationaliser les pertes et à privatiser ensuite les profits lorsqu’ils seront de retour… Cela doit entrer dans une grande politique, dans un grand plan de redéveloppement de l’économie contre le marasme destructeur qu’impose la finance. Par exemple, il faut inclure Petroplus dans cette même démarche. Rappelons que la « déclaration de principe fondamentale » rédigée, discutée, approuvée par le PS sous l’égide de François Hollande en 2008, prônait « une économie mixte ». Nous sommes pour une économie mixte ! Et des nationalisations peuvent être des « modalités » mais aussi des « finalités » car il faut rebâtir un grand périmètre de secteur public cohérent pour protéger, faire vivre l’industrie, l’énergie, un grand pôle financier public, les transports, les communications, les équipements essentiels, la protection sociale, la santé, l’école…

Il est tout aussi naturel que de nombreux députés socialistes s’interrogent sur la voie suivie quant au crédit d’impôt de 20 milliards accordé à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, leurs bénéfices, leur exposition à la concurrence internationale. Et tout cela, pour l’instant, sans aucune contrepartie exigée en termes d’emplois par exemple. « Une mesure trop sélective serait considérée comme une aide d’Etat » dit Pierre Moscovici en réponse aux députés socialistes demandant que ne puissent pas bénéficier de ce crédit d’impôt les entreprises cotées en bourses qui ont distribué 37 milliards de dividendes à leurs actionnaires en 2011. Cette réponse ne peut pas nous satisfaire. Tenir tête à Bruxelles et à ses règles lib&eacu te;rales doit être un des marqueurs de la gauche ! Déjà Mme Parisot réclame 20 autres milliards pour l’année suivante, toujours sans la moindre contrepartie.

Il est d’autant plus naturel que de nombreux députés socialistes s’interrogent sur le « pacte de compétitivité » que, quelles que soient les contreparties qui pourraient être accordées, les 20 milliards d’euros accordés au patronat seront le fruit d’une augmentation de 7 milliards d’euros par an de la TVA (l’impôt que le PS a toujours considéré comme le plus injuste) et d’une diminution de 10 milliards d’euros des dépenses publiques. La diminution des dépenses de l’Etat : la RGPP sous un autre nom. La diminution des dépenses de l’assurance-maladie alors qu’en 2011, 25 % des habitants de notre pays ont dû renoncer à des soins faute de moyens financiers. La diminution des dépenses des collectivités territoriales qui représentent 70 % de l’investissement public, qui sont e n première ligne pour le versement des prestations sociales et sans lesquelles nombre d’associations seraient appelées à disparaître.

Plus que jamais, le Parti socialiste doit rester un lieu de débats et d’actions pour accroître le rapport de forces social. Il n’est pas possible de se contenter de reproduire les communiqués de l’Elysée ou de Matignon : ce fut pourtant le seul argument pour ne pas mettre le mot « nationalisation », mardi 4 décembre dans le communiqué du Bureau national sur Florange. Tout le monde dit que le PS ne doit pas être un parti godillot. Alors à quand une campagne du PS pour une loi contre les licenciements boursiers ?

Plus que jamais, dans toutes les réunions socialistes (sections, instances fédérales ou nationales), la discussion est légitime, elle est même indispensable. Animée par la volonté réaffirmée de voir l’action gouvernementale réussir, elle doit mobiliser activement notre électorat en faisant contre feu à la droite et à ses déboires.

Plus que jamais, le débat à gauche est nécessaire. Il doit être formalisé. Bien sûr parce qu’il faut commencer à préparer les prochaines échéances électorales, notamment municipales. Mais pas seulement ! Il faut faire avancer réflexion et unité sur les mesures immédiates et suivantes à prendre par la gauche. Un comité de coordination a été inauguré entre les Verts d’EELV, le MRC, le MRG et le PS, c’est positif mais il faut travailler à ce qu’il s’étende à toutes les forces de la gauche.

Plus que jamais, la question sociale reste déterminante pour faire reculer le chômage de masse et hausser les salaires. En ce sens, l’issue des négociations entre les syndicats de salariés et le Medef sera décisive. Au PS, avec les autres partis de gauche, d’être aux côtés des syndicats dans le bras de fer en cours. Il ne faut pas que le Medef puisse imposer la flexibilité du travail, c’est-à-dire libertés pour les patrons et contraintes pour les salariés, telles qu’il les exige !

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