GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Reconnaissance internationale de l’Etat palestinien

« La position de la France est claire. Elle veut un cessez-le-feu immédiat et durable ». C'est ainsi que Laurent Fabius a rappelé ce matin sur France Culture l'implication du gouvernement et de François Hollande dans la recherche haletante d'une trêve à Gaza. Et pourtant... La situation du guerre reste prégnante entre Israël et la Palestine. Le bilan humain s'alourdit d'heure en heure et le nombre de victimes a dépassé le nombre fatidique de 100. D'ailleurs, chaque jour nouveau voit le nombre de victimes quotidien augmenter alors qu'au même moment, on matraque dans tous les médias l'assurance d'une trêve prochaine. La vie est ainsi faite au Proche-Orient : plus on parle de paix et plus on fait la guerre. Malgré les avis des experts qui annoncent tous les jours l'imminence d'un cessez-le-feu que tout le monde recherche, c'est au contraire la situation de guerre qui est en train de s'installer définitivement sous nos yeux. Déjà, le va-t-en-guerre Liberman explique que la paix ne sera possible que si les « terroristes » du Hamas rendent les armes, déjà on évoque de moins en moins discrètement dans les chancelleries occidentales le rôle de l'Iran dans l'armement des Palestiniens, déjà Obama distribue les bons points aux Israéliens. Rien de tel pour encourager les frénétiques qui dirigent Tsahal et qui ont pour pêché mignon de prendre en otage pas seulement un, mais deux peuples depuis trop longtemps. Retour sur un ascension résistible de la violence où les armes ont finalement moins joué que certaines déclarations publiques hasardeuses.

Gaza contre Goliath

«L’armée est prête à étendre significativement l’opération. Les soldats sont parés à toute éventualité», a affirmé dimanche dernier le sinistre Netanyahou, le seul premier ministre israélien qui nous ferait presque regretter Ariel Sharon... Tsahal, cette machine infernale organiquement liée à l'appareil d’État hébreux et au complexe militaro-industriel américain, s'est encore emballée et a une nouvelle fois dicté sa loi à deux peuples. Car si la violence d’État déchaînée par Tsahal continue de déferler avant tout sur les habitants de Gaza qui sont évidemment en premières lignes, elle est en passe de s'abattre également sur les citoyens d'Israël qui vont retrouver avec un enthousiasme tout relatif les joies de la mobilisation, de l'union sacrée, du bourrage de crâne et de la privation des libertés fondamentales. Le 18 novembre au soir, déjà, Israël avait positionné, selon Libération, « des milliers de réservistes, des transports de troupes blindés, des bulldozers et des chars » à la frontière de la bande de Gaza. Le gouvernement d'union sacré Netanyahou-Liberman-Barak n'a pas hésité à rappeler 75 000 réservistes pour préparer l'amplification des opérations à Gaza.

La France parle d'or quand elle milite pour un cessez-le-feu immédiat et pour des négociations sans préalable. Mais Laurent Fabius a ce matin pêché par excès d'objectivité. Le Ministre des Affaires étrangères d'une grande puissance ne peut pas éviter à prendre position. Or, sur France Culture, le chef de la diplomatie hexagonale n'a eu de cesse de rappeler le droit absolu d'Israël à se défendre, sans rappeler avec une même insistance le droit des Palestiniens à vivre en paix. Pire, le Ministre a justifié la position européenne qui veut que l'on ne discute pas avec le Hamas présenté comme une organisation terroriste d'autant plus infréquentable qu'elle ne dénie à Israël le droit à l'existence. Mais assez parlé du Hamas ! Qui est responsable de la marche à la guerre que nous venons de vivre ? Contrairement à ce qu'a expliqué doctement Laurent Fabius ce matin, ce n'est pas 50-50 ! Cela faisait plus d'un an qu'aucun civil israélien n'était tombé, dans le Sud du pays, sous le coup d'une roquette palestinienne. D'ailleurs, Israël n'a pas riposté à une agression soudaine pour la simple et bonne raison que cela fait des mois que le ciel israélien est parcouru par des projectiles venus de la bande de Gaza. Ce n'est pas un casus-belli, c'est malheureusement le pain quotidien des deux peuples depuis bien longtemps.

Les coulisses d'un massacre

La réalité, comme souvent, est ailleurs. Dans les faits, les 3 Israéliens, qui ont eu la malchance de servir post mortem de casus-belli aux faucons hébreux le jeudi 15 novembre, ne sont pas les premières victimes du conflit. En effet, la veille, Tsahal avait assassiné un chef militaire du Hamas : Ahmed Jabari. Pourtant, selon un article du Point.fr daté du 20 novembre, il semblait bien « qu'une certaine accalmie était en place entre les deux camps depuis le 24 octobre dernier, date à laquelle 20 roquettes palestiniennes avaient été tirées sur le sud d'Israël, après la mort de trois combattants palestiniens tués lors de raids aériens. La fragile trêve n'aura duré que deux semaines ». En effet, le jeudi 8 novembre, une incursion terrestre israélienne a provoqué la mort d'un jeune palestinien de 13 ans. Deux jours plus tard, des combattants palestiniens ripostent en lançant une roquette contre une jeep israélienne. Le samedi 10 novembre, un obus israélien atterrit sur un terrain de football dans la banlieue de Gaza City, causant la mort de deux autres mineurs. Puis, le 14 novembre, Tsahal s'en est pris à Jabari, initiant l'escalade qui lui a permis de lancer l'opération « Pilier de défense » après la mort tant attendue de 3 Israéliens le lendemain.

Mais qui est cet Ahmed Jabari qui gênait tant l'appareil d’État hébreux ? Un fou de Dieu ? Un chef proche des mouvances djihadistes ou salafistes ? Rien de tout cela ! C'est même plutôt tout le contraire... Jabari était en réalité un responsable favorable à l'établissement d'une trêve durable entre Palestiniens et Israéliens. Il servait d'intermédiaire dans le cadre des négociations entamées il y a peu. C'est Gershon Baskin, l'homme qui a servi de médiateur pour la libération du soldat franco-israélien Gilad Shalit, qui l'a confirmé au New York Times. Le négociateur israélien n'a en effet pas hésité à expliquer au journal américain que « des négociations indirectes avec Ahmed Jabari ont été conduites par l'intermédiaire de [s]on homologue du Hamas, Ghazi Hama, chef adjoint de la diplomatie du Hamas, qui avait reçu l'autorisation de M. Jabari pour négocier directement » avec lui.

Gershon Baskin et Ghazi Hama semblaient tout prêts à aboutir à un cessez-le-feu durable lundi 12 novembre, car Jabari n'était pas un original. Il représentait en réalité un groupe en passe de devenir majoritaire au sommet du Hamas convaincus que l'envoi de roquette sur le Sud d'Israël constitue à la fois une stratégie perdante, puisque causant peu de dégâts à l'ennemi, et une fuite en avant dans la violence, puisqu'elle donnait prétexte à Tsahal pour riposter avec une efficacité fort différente. Toujours selon Baskin, « Ahmed Jabari n'était pas prêt à abandonner la stratégie de résistance, c'est-à-dire combattre Israël, mais il a[vait] senti le besoin d'une nouvelle stratégie et était prêt à accepter un cessez-le-feu de longue durée ». Ces espoirs d'apaisement sont partis en fumée avec le chef du Hamas, qui s'était aventuré dans les rues de Gaza, mercredi dernier, sûr que les pourparlers avançaient et persuadé que la visite de Netanyahou et d'Ehud Barak sur le plateau du Golan prouvait qu'Israël avait décidément d'autres chats -persans, en l’occurrence !- à fouetter. « En instaurant ainsi un climat de relâchement, Netanyahou et Barak ont fait sortir Jabari et ses amis de leur trou et rendu possible une attaque-surprise », a d'ailleurs affirmé au quotidien israélien Yedioth Ahronoth Alex Fishman, spécialiste des questions militaires.

Que peut la France ?

L'opération « Pilier de défense » n'a au final rien d'une réaction spontanée ou d'une décision prise sous le coup de l'émotion. Il s'agit en réalité d'une opération mûrement réfléchie par l'appareil d’État israélien qui a profité du relâchement de la tutelle US du fait des élections américaines pour mettre comme en 2009 la « communauté internationale » devant le fait accompli. Autant dire que Tsahal n'acceptera de reculer que quand les objectifs qu'elle s'est fixée auront été atteints. Faut-il pour autant lever les bras aux ciels et se lamenter de notre impuissance ? Bien au contraire, la France peut et doit parler d'une voie forte.

Cela commence dans les prochains jours, à l'Assemblée Générale des Nations Unies, par un vote favorable de notre pays à la demande de reconnaissance de l’État palestinien qui y sera formulée par Mahmoud Abbas. Hier, Laurent Fabius a déclaré lors de sa conférence de presse qu'il fallait « regarder avant qu'est ce qui fait ou non progresser la paix ». Puis d'ajouter que « le vote, au moment où il va intervenir, peut aboutir à des conclusions qui seraient inverses à celles que l'on souhaiteraient ». Beaucoup de circonvolutions pour rien, camarade Laurent ! Trop de tactique quant il s'agit là d'une question de principe. Et même d'une question de respect de la parole donnée. En effet, dans sa 59e proposition, le candidat Hollande proclamait qu'une fois élu, il prendrait « des initiatives pour favoriser, par de nouvelles négociations, la paix et la sécurité entre Israël et la Palestine [et qu'il] soutiendrait la reconnaissance internationale de l’État palestinien ». C'est par le biais de la reconnaissance d'un État palestinien, même embryonnaire, que pourra se frayer un chemin une solution proprement politique jusque-là refusée par les deux camps en présence et en priorité par l'occupant israélien. La France honorerait son rôle de puissance éprise de paix si elle votait pour cette reconnaissance et si elle refusait de joindre sa voix aux abstentionnistes qui, les États-Unis en tête, n'ont pas leur pareil pour parler de trêve sans pour autant agir pour la résolution concrète du conflit à court et à moyen terme.

Des pétitions existent pour soutenir la reconnaissance d'une État palestinien et pour faire pression sur les gouvernements en perspective du vote de l'Assemblée Générale des Nations Unies :

  • www.avaaz.org/fr/independence_for_palestine_fr
  • www.petitions24.net/letat_palestinien_cest_maintenant
  • Document PDF à télécharger
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