GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Kanaky , Nouvelle Calédonie

Cette île, ou plutôt ces îles “du bout du monde”, à 17 000 km de Paris, sont protégées par une barrière de corail de 1600 km, patrimoine mondial de l’humanité. Paradis des dauphins, des baleines, des tortues et des requins, ce territoire n’est occupé par l’homme, venu sur de frêles embarcations, que depuis 3000 ans.

L’île, découverte par l’anglais James Cook en 1774, c’est seulement à partir de 1840 que s’installent des communautés religieuses catholiques et protestantes avec l’accord des chefs de tribus. Le catéchiste remplace le sorcier. Les indigènes sont obligés de s’habiller, la « robe mission » s’impose aux femmes. L’arrivée des religieux précède de quelques années la colonisation officielle de ce territoire par la France en 1853. Le gouverneur a tous les pouvoirs. Il choisit les chefs, active les rivalités entre tribus, interdit la circulation des kanak hors de leur territoire et leur impose le travail obligatoire.

A partir de 1864, le bagne permet de peupler la colonie et de bénéficier d’une main d’œuvre gratuite pour construire les premières infrastructures (routes, ports, ponts…). L’administration pénitentiaire va récupérer 260 milles hectares essentiellement du peuple kanak et les transférer ensuite pour partie en concession aux anciens bagnards.

1878, la grande révolte kanak !

Après l’écrasement du soulèvement, en Kabylie, de la grande révolte des Mokrani en mars 1871 contre l’occupation de l’Algérie, et celui, au même moment, de la Commune de Paris, un contingent important de communards et de kabyles condamnés arrive sur le territoire.

Si beaucoup restent neutres vis-à-vis des kanak, une partie d’entre eux participera en 1878, aux côtés des troupes françaises, au massacre de la révolte conduite par le grand chef Ataï.

Seule Louise Michel soutiendra ce soulèvement, et aurait même déclaré « peuple kanak, peuple parisien, même combat ».

Cette première grande révolte, refusait l’occupation de ses terres par les colons blancs, parfois ex-bagnards. Ce soulèvement quasiment inconnu en métropole, sera écrasé dans le sang avec plus de 1 000 victimes kanak (et 200 européens). La tête tranchée du grand chef Ataï sera conservée dans le formol et exposée dans les musées français. Aujourd’hui, elle est au musée de l’Homme et, légitimement, les kanak revendiquent qu’on leur restitue cette tête, symbole de leur résistance.

Après la découverte des gisements de nickel – l’or vert – commence le début de l’exploitation minière. Elle attire de nouvelles populations européennes qui veulent profiter de cette richesse.

Pendant la 1ère guerre mondiale, des kanak sont envoyés au front. En 1917, éclate une révolte dans le nord de l’île contre la conscription dans les tribus. Elle sera matée dans le sang, au même moment où éclatent les mutineries dans les tranchées. On meurt au front ou parce qu’on refuse d’y aller !

Pendant la 2e guerre mondiale, la Nouvelle Calédonie sert de base arrière à l’armée américaine qui y construit l’aéroport.

En 1946, le régime de l’indigénat est supprimé, la Nouvelle Calédonie devient un territoire d’Outre-mer (TOM).

Exigence de l’indépendance.

Après 1968, l’idée indépendantiste grandit. En 1979, est créé le front indépendantiste qui deviendra le FLNKS (Front de Libération National Kanak Socialiste). L’assassinat en 1981 de Pierre Declerck, secrétaire de l’Union Calédonienne, marque le début des troubles. En 1984, 10 militants kanak, dont 2 frères de J.M. Tjibaou, sont assassinés par des caldoches (les blancs de Nouvelle Calédonie) qui seront acquittés par la justice.

En 1985, ce sont 2 leaders indépendantistes, Eloi Machoro et Marcel Nonaro, qui sont abattus par le GIGN. En mai 1988, après une prise d’otages de gendarmes dans l’île d’Ouvéa, l’assaut est donné et 19 militants indépendantistes sont liquidés.

Malgré tout, Jean-Marie Tjibaou, au nom du FLNKS, signe les accords de Matignon en juillet 1988 avec Jacques Lafleur, représentant du RPCR. L’année suivante, Jean-Marie Tjibaou est assassiné par un indépendantiste opposé aux accords de Matignon !

1998, les accords de Nouméa.

Sous l’égide de Lionel Jospin, les accords de Nouméa, en 1998, transfèrent de nouvelles compétences à la Nouvelle Calédonie. Seules restent sous la responsabilité française la défense, la sécurité et la justice. Les accords prévoient un référendum d’autodétermination entre 2014 et 2018. C’est aussi la reconnaissance officielle de la colonisation de ce territoire par la France et de la spoliation du peuple kanak, de ses libertés, de sa culture et de son territoire. « La pleine reconnaissance de l’identité kanak » est enfin reconnue. Le territoire est partagé en 3 provinces. Un congrès élu (parlement) choisira le gouvernement. Un sénat coutumier représentant les tribus est institué. Le rééquilibrage entre territoires est prévu, et la priorité à l’emploi local est actée. La mise en place de signes identitaires comme le nom, le drapeau ou la monnaie est décidée. Aujourd’hui, 2 drapeaux flottent d’ailleurs sur les bâtiments publics, celui de Kanaky et celui de la France. La Nouvelle Calédonie devient un pays d’Outre-mer (POM).

L’échéance de 2014 approche. Quel sera l’avenir de ce territoire de 250 000 habitants, dont 40 % sont d’origine kanak, 30 % européenne, le reste se partageant entre vietnamiens, wallisiens, chinois ou métis… ? Va-t-il devenir un petit pays indépendant comme d’autres (Nouvelle Zélande) et garder de grandes inégalités sociales et territoriales, ou va-t-il choisir une autre voie ? Ce sont tous les débats actuels, l’action et les choix du peuple kanak qui le détermineront. Tous les anticolonialistes se doivent d’être à ses côtés.

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