GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Féminisme

Les Polonaises contre l'interdiction de l'avortement

Face à la mobilisation des Polonaises descendues en masse dans les rues pour protester contre une nouvelle restriction du droit à l’avortement, la promulgation de la décision est suspendue, mais jusqu’à quand ?

En avril 2020, le vote au Parlement et la mobilisation féministe avaient déjà écarté une proposition de loi visant à interdire l’un des cas d’avortement encore légalement autorisés. Mais, le 22 octobre, la Cour constitutionnelle a jugé que, dans la législation existante largement restrictive, l’article autorisant l’IVG en cas de « malformation grave et irréversible » du fœtus ou d’une « maladie incurable ou potentiellement mortelle » était « incompatible » avec la Constitution du pays.

Si cette décision est entérinée, ne resterait autorisé que l’avortement en cas de danger de mort pour la femme enceinte et de grossesse résultant d’un viol ou d’un inceste.

Selon les données officielles, la Pologne a enregistré en 2019 environ (et seulement) 1 100 cas d’IVG, dont l’écrasante majorité était autorisée à cause de la malformation irréversible du fœtus. Par ailleurs, selon des associations, le nombre d’IVG pratiquées clandestinement en Pologne ou dans des cliniques étrangères atteindrait près de 200 000 par an.

Les manifestations qui ont immédiatement eut lieu dans tout le pays ont été spectaculaires, mobilisant des centaines de milliers de femmes et d’alliés à leur cause et ont pris chaque jour un peu plus d’ampleur malgré l’interdiction des rassemblements et le risque causé par la pandémie.

Les Polonaises avaient déjà su organiser des manifestations de grande ampleur en 2016 comme en 2018. Celles de ces dernières semaines ont entraîné de nouvelles couches sociales notamment les jeunes ; les revendications portées par les initiatrices de Strajk Kobiet (la « grève des femmes ») vont largement au-delà du droit à l’avortement et portent notamment sur la séparation stricte de l’Église et de l’État, une amélioration du système de santé, les droits LGBT, l’application de la Convention d’Istanbul – le traité sur les violences faites aux femmes dont la Pologne a annoncé vouloir se retirer en juillet dernier.

Plus largement, les manifestations ont servi de catalyseur pour l’ensemble des secteurs hostiles au pouvoir ultraconservateur dont le principal parti, Droit et Justice (PiS), à l’origine de l’indigne requête auprès de la Cour constitutionnelle, a vu sa cote de popularité chuter de dix points en quelques jours.

Devant l’ampleur des manifestations et de la contestation, le 4 novembre, le gouvernement a suspendu la publication du jugement du tribunal, ce qui sursoit à son entrée en vigueur. Il cherche une échappatoire et devrait proposer un nouveau projet de loi. La discussion reviendra donc sans tarder devant le Parlement dont les travaux devraient reprendre le 18 novembre.

Cet article de notre camarade Claude Touchefeu a été publié dans le numéro 279 de novembre 2020 de Démocratie&Socialisme, l a revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

 

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