La traite humaine en procès
Nous reproduisons ici une chronique de notre camarade Gérard Filoche, chronique qu'il tient hebdomadairement dans l'Humanité-Dimanche.
Parmi les si nombreux scandales de droit du travail détruit par Macron, Pénicaud et Borne, il y a celui des 700 000 « travailleurs détachés ».
Le 17 mai, à Marseille, devait avoir lieu le procès de Terra Fecundis, société d’intérim espagnole qui envoie des milliers de travailleurs dans les exploitations agricoles françaises. C’est le plus gros des dossiers de fraude au travail détaché en cours. Il a, hélas, été repoussé d’un an sous prétexte de Covid.
L’affaire a commencé en 2011 après la mort d’un Équatorien de 32 ans des suites de déshydratation alors qu’il ramassait des melons dans une exploitation d’Eyragues, Bouches-du-Rhône. C’était un système de traite d’êtres humains : les ouvriers ont raconté les journées à 14 h jour sous un soleil de plomb payées moins que le Smic horaire. Des centaines de patrons maraîchers, viticulteurs, producteurs de fruits français ont surexploité cette main d’œuvre.
L’enquête a duré 10 ans pour révéler l’immense fraude de Terra Fecundis. Deux de ses filiales, ainsi que six de ses gérants en France devaient être dans le box des accusés. Les chefs d’accusation sont ceux de fraude au travail détaché et marchandage de main-d’œuvre. Le parquet de Marseille a retenu la circonstance aggravante de « faits commis en bande organisée » et doublé la peine maximale encourue, fixée à dix ans de prison.
La société aurait soustrait 112 millions d’euros à la sécurité sociale pour la seule période de 2012 à 2015. Elle ne payait pas l’Urssaf en France où elle réalisait 80 % de son chiffre d’affaires. Quant au « marchandage » : la justice soupçonne le non-paiement d’heures travaillées, la non-majoration des heures supplémentaires, le dépassement des durées maxima. Un 2eme procès est prévu dans le Gard contre Terra Fecundis. Un autre est ouvert par le parquet de Tarascon suite à des clusters de Covid-19 dans des foyers de travailleurs étrangers de Terra Fecundis.
Mais tout ça s’explique par la vision globale du droit du travail de Macron et son acceptation honteuse de la directive « travailleurs détachés ».