GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Féminisme

Gisèle Halimi : un grand personnage

Et voilà ! Personnage : nom masculin ; Personne qui joue un rôle social important.

J’aurais préféré écrire « une grande personnage », car c’est bien un hommage féminin que je veux lui rendre, mais l’injustice, qu’elle a combattue toute sa vie, se loge aussi dans la langue. N’en déplaise à celles et ceux qui ne pourraient s’empêcher de formuler promptement des critiques, voire les accusations d’exagération à l’encontre d’une telle remarque, pourtant de bon sens.

Car, comme le souligne Laurence Rossignol, « à l’heure où disparaît Gisèle Halimi, le féminisme est sous les critiques. Ses excès ont pourtant été autant de victoires pour la cause des femmes ».

Dans un interview accordé au Monde diplomatique en 2003, Gisèle Halimi dénonçait déjà les procès faits « aux exagérations qui desserviraient la cause ». Elle y explique avec clarté le « continuum de la violence ».

« Impossible de ne pas l’avoir vu, entendu, lu, remarqué. Feu nourri de toutes parts. Tirs à boulets rouges. La cible ? Le féminisme d’aujourd’hui : “une escroquerie, une entreprise de victimisation des femmes, qui fragilisent les hommes, les transforment en objets de leurs nouveaux maîtres, les féministes. Des livres, des manifestes bruyants et un relais hégémonique, obsédant, dans les médias.

Pour les accusateurs d’aujourd’hui, l’accusée, c’est la femme battue. Elle qui sait que les diverses formes de violence n’ont pas de frontière, sauf sur le froid papier des rapports. Entre l’acharnement d’un interrogatoire (Je t’avais interdit de voir cette amie, Où étais-tu quand j’ai téléphoné ?...), le mépris qu’on lui jette à la figure et qu’elle finit par intérioriser (Tu es moche..., Tu es conne...), la bousculade ou la gifle qui suit, suivies elles-mêmes, si elle se rebiffe, d’un véritable passage à tabac, suivi enfin de la violence sexuelle, elle ne vit qu’une différence de degré, pas de nature. Le continuum de la violence. En plus ou en moins, dit-elle. Interrogez-la, c’est la même souffrance, celle de l’inexistence comme être humain. [...] Le fondement en reste commun, l’existence d’une domination masculine qui inscrit dans la définition de l’être humain des propriétés historiques de l’homme viril, construit en opposition avec les femmes (Pierre Bourdieu). »*

Personnage, oui, parce que le rôle qu’a joué Gisèle Halimi dans les grandes évolutions contemporaines est non seulement indéniable, mais colossal. Pour la cause des femmes, bien sûr, mais aussi contre le colonialisme, pour l’émergence d’une intelligence partagée de la compréhension d’un universalisme paritaire et mixte.

Personnage, oui, parce que la personnalité de Gisèle Halimi est éblouissante, pleine d’enseignements de messages, de passions, de certitudes et de questionnements.

Droits des femmes, universalisme, égalité : continuons à explorer les chemins qu’elle a contribué à ouvrir.

NE NOUS RÉSIGNONS JAMAIS !

Cet article de notre camarade Claude Touchefeu est paru dans le numéro de septembre de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

*« Le “complot” féministe », août 2003, https://www.monde-diplomatique.fr/2003/08/HALIMI/10360

À lire ou relire :

Gisèle Halimi, Le lait de l’oranger, Gallimard, 1988

Gisèle Halimi, Ne vous résignez jamais, Plon, 2009

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