GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

En défense des amendements de la Motion 3

Les militants socialistes sont appelés à voter le 6 juin prochain. Nous publions ici, à partir d’argumentaires rédigés par nos camarades dans différentes fédérations, un dernier texte en faveur des amendements défendus par les socialistes partisans de la motion 3 (« Maintenant la gauche, le social au cœur »).

Amendement 4 : TSCG et budget

1 - Renégocier ou adapter le Traité Merkel-Sarkozy, le TSCG.

Ce traité a fait la preuve de sa nocivité. La généralisation de l’austérité généralise la récession. Les uns après les autres, les pays européens voient leur croissance s’effondrer.

Le chômage de masse atteint des sommets. 20 millions de salariés de la zone euro sont demandeurs d’emplois (catégorie A). En France, plus de 5 millions de personnes sont au chômage (catégorie A, B et C). L’Unedic prévoit 178 000 demandeurs d’emplois (indemnisés) supplémentaires en 2013.

2 - Un budget européen égal au minimum à 5 % du PIB européen.

Le budget actuel de l’Union européenne est dérisoire : 1 % du PIB alors que le budget des États-Unis s’élève à plus de 20 % de son PIB.

Un budget de 1,1 % ne changerait rien au fait que l’Union européenne serait toujours l’Europe de la sanction. Un budget de 5 % est la taille minimum pour permettre à l’Union de devenir une Union solidaire.

Cette augmentation du budget européen est nécessaire car elle est à la mesure de la crise de l’Union européenne dont le texte du bureau national sous-estime dramatiquement l’ampleur.

Amendement 8 : BCE et euro cher

1 - La Banque centrale européenne (BCE) n’a pas le même statut que les autres banques centrales

Toutes les banques centrales du monde (Réserve fédérale des États-Unis, Banque d’Angleterre, Banque du Japon…) ont une double mission : limiter l’inflation et stimuler la croissance. La BCE n’a qu’une seule mission : limiter l’inflation, elle n’a à se soucier ni de la croissance, ni du chômage.

2 - Toutes les banques centrales du monde peuvent acheter les titres de la dette publique de leur État dès leur émission.

Ce n’est pas le cas de la BCE qui subit une double contrainte.

- Elle ne peut acheter ces titres de la dette publique que sur le marché secondaire (en bourse). Ce sont donc les banques (abreuvées de liquidités au taux de 1 % par la BCE) qui les achètent lors de leur émission. Elles financent ensuite les États à des taux allant jusqu’à 7 % !

- Elle ne peut acheter ces titres de la dette publique que si les États demandeurs en passent par les « conditionnalités » du Mécanisme européen de stabilité (MES).

3 - Les « conditionnalités » imposées par le MES sont les plans de destruction sociale qui ont frappé la Grèce, le Portugal, l’Espagne et l’Irlande.

Ils ont entraîné une triple catastrophe.

Une catastrophe économique. Le PIB de la Grèce a diminué de 6,4 % en 2012, celui de l’Espagne de 1,4 % et celui du Portugal de 1,9 %.

Une catastrophe sociale. Le taux de chômage (catégorie A) atteint 15 % de la population active en Irlande ; 17,6 % au Portugal ; 27, 2 % en Espagne et 27,6 % en Grèce.

Une catastrophe financière, enfin. Loin de reculer, comme l’avait annoncé José Manuel Barroso et Angela Merkel, la dette publique s’envole. Entre 2007 et 2012, la dette publique a bondi de 25 % du PIB à 117 % en Irlande. De 37 % à 84 % en Espagne. Entre 2009 et 2012, la dette publique est passée de 70 % à 120 % du PIB au Portugal et de 113 % à 157 % en Grèce. Un échec tragique dont le texte de la majorité du bureau national ne dit pas un mot.

Nous proposons que la BCE, comme toutes les banques centrales du monde se voit confier la mission de stimuler la croissance et qu’elle puisse acheter directement, sans conditions, les titres des dettes publiques des États européens.

4 - L’euro est un euro cher

Entre 2000 et 2010 il a été réévalué de 40 % par rapport au dollar. Le coût des exportations de la zone euro hors de la zone euro ont donc augmenté de 40 % dans le même temps. Comment être « compétitifs » dans ces conditions comme le réclame à grands cris Angela Merkel ? En baissant les salaires ?

La politique de change de l’Union européenne ne doit plus être laissée aux marchés mais doit faire l’objet (comme aux États-Unis) de décisions politiques de l’Union.

Amendement 10 : arrêter les négociations en vue d’un accord de libre-échange transatlantique

L’ «exception » culturelle sur laquelle se focalise le texte de la majorité du bureau national n’est que la pointe émergée de l’iceberg. Ce projet de traité de libre-échange pose des problèmes d’une toute autre importance.

1 - Les barrières douanières

Les droits de douanes protégeant l’industrie européenne feront les frais de l’accord. Ce serait la fin de ce qui reste d’industrie en France. Les protections tarifaires sont élevées sur les produits agricoles : 45 % pour la viande, 42 % pour les produits laitiers. Les « équivalents droits de douane » sur les services sont très importants. Ils atteignent 61,7 % pour l’assurance. Leur suppression serait dangereuse pour l’emploi.

2 - Les normes

Ces « protections après la frontière » sont les plus importantes. Elles concernent nos choix de vivre ensemble. L’accord remettrait ces choix en question dans plusieurs domaines fondamentaux. En voilà quelques exemples.

L’environnement. Les États-Unis extraient le gaz de schiste sans se soucier de l’environnement. L’UE l’interdit. Est-il possible d’imaginer un seul instant que ce sont les États-Unis qui s’aligneraient sur l’Union européenne ?

L’alimentation. Les États-Unis n’ont aucun problème pour tolérer le poulet à la chlorine, le bœuf aux hormones ou la culture des OGM. Ce n’est pas le cas de l’Union européenne. Mais, la Commission a déjà indiqué clairement quelles normes l’emporteront : elle vient d’autoriser le nettoyage des carcasses de bœuf à l’acide lactique pour s’aligner sur la norme des États-Unis.

Nos mutuelles et les avantages fiscaux attribués aux contrats de complémentaire santé qui ne prennent pas en compte l’état de santé des souscripteurs s’aligneraient sur les normes des États-Unis où tout est permis en matière d’assurance.

Les services publics (enseignement, santé…) seraient soumis à la concurrence et aux normes des services privés des États-Unis.

3 - Les États-Unis contre l’Union européenne : un porte-avions contre un chalutier

Les États-Unis n’hésitent pas à aider massivement leurs industries quand ils l’estiment nécessaires. Alors que les articles 107 à 109 du traité de Lisbonne interdisent aux États européens d’aider leurs entreprises. L’industrie sidérurgique des États-Unis est protégée par le « Buy American Act ». En Europe, c’est Arcelor-Mittal qui décide.

25 % des marchés publics de l’État fédéral et des 50 États américaines sont réservés aux PME des États-Unis. La Commission européenne interdit cette pratique au nom de la « concurrence libre et non faussée ».

Les États-Unis ont une politique de change agressive et n’hésitent pas à agir pour faire baisser le cours du dollar et stimuler leurs exportations. L’Union européenne n’a aucune politique de change et l’euro cher entrave les exportations de la zone euro.

4 - Le nivellement par le bas pour les salariés

L’accord de libre-échange entre les États-Unis, le Canada et le Mexique (Alena) n’a pas amélioré les salaires et les conditions de travail des salariés mexicains. Il a, au contraire, tiré vers le bas les salaires et les conditions de travail des salariés du Canada et des États-Unis.

L’élargissement de l’Union européenne aux Pays d’Europe centrale et orientale (Peco), sans que le dérisoire budget européen permette de financer l’adaptation par le haut de leurs économies sur celle de l’Europe des 15, a entraîné un redoutable dumping salarial et un chantage constant à la « délocalisation ».

Avec l’accord de libre-échange transatlantique, ce serait la pression des salaires et des conditions de travail des salariés mexicains et des salariés des Peco qui s’exercerait sur tous les salariés d’un côté et de l’autre de l’Atlantique. Les seuls gagnants seraient les actionnaires des firmes transnationales.

Il ne faut donc pas mettre le petit doigt dans l’engrenage des négociations et ne pas donner de chèque en blanc à la Commission européenne qui aurait mandat de négocier cet accord.

Amendement 13 : réorienter la politique européenne

Cet amendement reprend l’ensemble des propositions faites dans les 4 amendements précédents.

Il ajoute la nécessité d’un traité social européen, avec notamment un Smic européen par étapes, pour mettre fin au dumping social.

Il précise les moyens pour réorienter l’Union européenne.

1 - La question du traité de Lisbonne

Le texte du bureau national ne précise nulle part que, pour que les propositions qu’il avance soient prises en compte, il faudrait négocier un nouveau traité européen.

L’Union européenne restera un nain politique tant que sa politique étrangère ne pourra être décidée qu’à l’unanimité (article 28-a du traité de Lisbonne).

Il est interdit aux États de l’Union d’aider leurs entreprises (articles 107 à 109).

Il ne sera pas possible de mettre fin au dumping fiscal et social tant que les articles 113 et 114 du traité de Lisbonne obligeront à ce que toute décision dans ces domaines soit prise à l’unanimité des 27 États de l’Union.

Pourquoi le texte du bureau national n’en souffle-t-il pas un mot ? Pourquoi ne pas reconnaître que c’était une erreur de donner à Nicolas Sarkozy les moyens constitutionnels de signer le traité de Lisbonne ? C’est pourtant ce qu’avait fait la majorité des parlementaires socialistes en février 2008, au congrès de Versailles.

La majorité des députés socialistes a laissé, en 2008, se fermer une énorme porte blindée. Maintenant, le texte du bureau national propose de frapper timidement à cette porte sans reconnaître son erreur. Nous prendrions le risque de le payer très cher aux élections européennes de 2014, si le texte du bureau national n’était pas amendé.

2 - Le consensus avec Angela Merkel est mortel pour l’Europe

La réorientation de l’Union européenne est urgente si nous voulons la sauver.

La crise sociale et économique est extrêmement profonde. Elle ne pourra se dénouer que sur le terrain politique. La droite a échoué à la dénouer. Ou la gauche pourra dénouer la crise, ou ce sera l’extrême-droite qui la dénouera en mettant fin à l’Union après avoir rallié à sa cause une partie de la droite.

Seule une alternative de gauche, rompant résolument avec la droite européenne, permettra de créer le rapport de forces pour réorienter l’Union européenne. On ne peut pas faire progresser l’Europe par consensus avec les néo-libéraux. François Hollande doit rompre l’accord qui le lie à la droite européenne. Il doit prendre la tête de cette alternative, en s’appuyant sur toutes les forces de gauche, les syndicats et les mouvements sociaux de plus en plus puissants en Europe.

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