Elections en Suisse : l’UDC panique et provoque

Plus l’on s’approche des élections fédérales du 20 octobre, plus les nationaux-populistes de l’Union démocratique du centre (UDC), conscients que leur déclin électoral n’est pas prêt de s’arrêter, semblent céder à la panique, laquelle confine parfois à la provocation. À l’autre bout de l’échiquier, les Verts devraient être les principaux gagnants de ces élections, et le PS conserver ses positions, voire les améliorer quelque peu.
Ces prévisions découlent des sondages les plus récents, mais encore davantage des élections qui ont eu lieu ce printemps dans trois cantons alémaniques et au Tessin. L’UDC a essuyé une grosse défaite, perdant plus de vingt sièges dans ces parlements cantonaux, alors que les écologistes, portés par la mobilisation climatique, ont réussi une percée, gagnant une vingtaine de sièges. Le PS a légèrement progressé, ce qui montre que les socialistes et les Verts sont plus complémentaires que concurrents, raison pour laquelle ils sont alliés dans la plupart des cantons.
La pomme de la provoc’
Cette évolution inquiète les ténors de l’UDC. Certes, leur parti restera le premier du pays, mais il pourrait perdre beaucoup de plumes. Refoulant le sentiment de panique, l’UDC pense pouvoir limiter les dégâts en maniant l’art de la provocation. Au mois d’août, elle a diffusé une affiche choc qui montre une pomme suisse dévorée par des vers. Ceux-ci portent les couleurs de l’Union européenne (UE), du PS, des Verts et des partis du centre et de la droite. Aux yeux de l’UDC, ces bestioles incarnent tout ce qui détruit la Suisse, comme l’accord-cadre avec l’UE et les mesures visant à protéger le climat. Cette affiche a suscité un immense tollé dans le monde politique, y compris au sein de l’UDC.
Législature perdue
À gauche, mais aussi au centre, on s’accorde pour dire que la période 2015-2019 a été une « législature perdue ». Aucune solution véritable n’a été apportée au régime des retraites, la politique climatique a fait du surplace (malgré une forte mobilisation de la jeunesse), la problématique de l’égalité des salaires entre hommes et femmes a débouché sur une législation minimaliste (alors qu’en juin, la grève des femmes a mobilisé plus de 500 000 personnes) et la question des relations entre la Suisse et l’UE n’a toujours pas trouvé son épilogue. C’est pourquoi beaucoup espèrent que les élections du 20 octobre feront tomber la majorité de la droite « dure » (UDC et libéraux-radicaux) au Conseil national.
Pas idyllique !
La campagne électorale se déroule sur un fond social qui n’est pas le reflet d’une Suisse idyllique :
- Le gouvernement entend relever l’âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans, comme pour les hommes, alors que la majorité des candidats veut porter cet âge à 67 ans.
- Les écarts salariaux se sont encore creusés, les dirigeants des deux plus grandes banques (UBS et Crédit suisse) et de l’entreprise pharmaceutique Roche gagnant 250 fois plus que les plus bas revenus.
- 12 % des travailleurs ont un bas salaire, soit une rémunération inférieure à 4 335 francs. Les deux tiers des employés concernés sont des femmes.
- Pour pouvoir vivre, près de 400 000 personnes en Suisse ont plus d’un emploi. Cela représente 8,7 % de la population active, contre 4 % en 1991.
- De plus en plus de délégués syndicaux sont victimes de licenciements.
Dans ce contexte, on ne peut que se réjouir de la récente décision du Tribunal fédéral d’autoriser la communication des données personnelles des détenteurs français de compte UBS en Suisse. Le fisc français va ainsi pouvoir accéder aux informations de quelque 400 000 comptes. Plusieurs milliards d’euros n’auraient pas été déclarés.
Notre ami Jean-Claude Rennwald est ancien député (PS) au Conseil national suisse et militant socialiste. Son article est paru dans le numéro de septembre de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).