GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Écologie

Climat : nous ne pouvons plus attendre !

Le deuxième volet du sixième rapport du GIEC, adopté par les gouvernements de 195 pays, a été publié le 28 février, juste après l’éxplosion de la guerre en Ukraine. « Ce rapport est un terrible avertissement contre les conséquences de l’inaction », a déclaré Hoesung Lee, le président du GIEC.

Dans cette étude fondée sur 34 000 publications, les scientifiques du GIEC ont étudié les risques climatiques et les niveaux d’adaptation des pays. Il s’agit donc des conséquences du changement climatique et des façons de s’y adapter, question trop souvent délaissée par les politiques.

Un constat sans appel

Le GIEC constate que, depuis son rapport précédent en 2014, les effets du changement climatique se sont accentués et sont aujourd’hui très visibles. Il note que « des impacts plus violents, souvent irréversibles, et plus précoces ont affecté toutes formes de vie sur Terre ».

Au-delà de la multiplication des incendies géants, des tempêtes tropicales et des inondations déjà très alarmants, les pénuries d’eau (la moitié de l’humanité en a souffert l’an dernier !), les impacts sur la faune et la flore, les vagues de chaleur plus intenses sur les villes, l’accentuation des pics de pollution, les impacts sur l’agriculture et certaines infrastructures clés, sont notamment pointés. Et ces phénomènes vont considérablement s’amplifier désormais. Surtout si l’empreinte humaine continue à s’accentuer : croissance démographique et urbaine, de la consommation non durable, des inégalités et de la pauvreté, dégradation des terres, pollution des océans, perte de biodiversité.

Le GIEC reconnaît ainsi davantage les interdépendances entre climat, nature et société, et nous dit également que, face à ce constat, une politique des petits pas ne suffira pas aujourd’hui. « Les demi-mesures ne sont plus une option » !

Il y a donc urgence à mettre en œuvre des politiques ambitieuses face au changement climatique, particulièrement pour une réduction drastique de nos émissions de gaz à effet de serre, mais également pour adapter nos sociétés.

Pour le GIEC, la préservation des écosystèmes, mais aussi leur restauration, ont un rôle décisif à jouer dans la réduction des risques et l’amélioration de la vie des populations touchées par la crise climatique. Cela permet de mieux bénéficier de la capacité de la nature à absorber et stocker le carbone, de mieux assurer nourriture et eau potable…

Tout est lié !

Les scientifiques ont particulièrement travaillé sur la question des villes, où vit plus de la moitié de la population mondiale. Le constat est sans appel : la santé et les conditions matérielles de vie des citadins, les infrastructures (énergie, transports) sont fortement exposées aux risques liés aux canicules, tempêtes, inondations, à l’élévation du niveau de la mer. Et ce sont les plus pauvres qui pâtissent et pâtiront le plus de ces effets, particulièrement dans le Sud.

Pour François Gemenne, un des auteurs principaux du rapport, les travaux scientifiques démontrent de plus en plus clairement comment les questions de justice sociale, de migration, de développement et de conflits sont étroitement imbriquées dans le changement climatique. Ce sont des problématiques éminemment politiques, que les climatologues ne peuvent pas prédire avec leurs modèles mathématiques, et selon lui, les décideurs ne veulent pas forcément qu’elles soient abordées par GIEC, d’où l’intérêt de cette nouvelle étude, qui leur donne une place réelle.

Armelle Le Comte, d’Oxfam France, le dit autrement : « Les inégalités sont au cœur de la crise climatique actuelle. Dans les quelques cent jours qui ont suivi la COP 26, les 1 % les plus riches ont émis autant de carbone que la population de l’Afrique en une année entière. »

Ainsi, de nombreux conflits géopolitiques résulteront des difficultés d’accès aux ressources, de l’inhabitabilité de certaines régions, de la croissance des inégalités. C’est déjà le cas dans certaines régions du monde, y compris en Ukraine où la volonté d’accès stratégique aux ressources naturelles et aux terres agricoles n’est certainement pas étrangère au conflit. Les migrations climatiques sont déjà d’actualité. L’eau est aujourd’hui considérée comme ressource stratégique...

L’heure est à la mobilisation !

Les engagements actuels pour la réduction des GES nous placent sur une trajectoire de réchauffement de l’ordre de 2,5° C. Cela ne nous met pas à l’abri de risques auxquels nous ne pourrons nous adapter. Et nous sommes en outre loin de respecter les engagements ! Dans certaines zones, si les températures dépassent certains seuils, la vie humaine n’est plus possible. De même, si le niveau des océans monte de plus d’un mètre, certaines côtes ne pourront plus être protégées.

Il y a donc des limites à l’adaptation, qui n’est par ailleurs pas une alternative à la réduction des GES. Mais il faut mener les deux de front : réduire plus pour s’adapter mieux. Mais, aujourd’hui, les stratégies d’adaptation sont largement sous-financées. Seulement un quart des financements accordés aux pays vulnérables leur sont consacrés. Le coût de l’adaptation dans ces pays devraient atteindre 140 à 300 milliards en 2030. Mais les pays riches ont été incapables, lors de la COP 26, à tenir leur promesse d’assurer 100 milliards par an d’aide climatique aux pays du Sud.

Car ce sont bien ces pays qui subissent de plein fouet les effets et les coûts d’une crise climatique qu’ils n’ont pas créée. Aujourd’hui, les pays d’Afrique dépensent jusqu’à 5,6 % de leur PIB pour leur adaptation. L’écart entre la production économique des pays les plus riches et les plus pauvres est de 25 % plus important qu’il ne l’aurait été sans le réchauffement climatique. La mortalité due aux sécheresses, inondations, tempêtes, est quinze fois plus élevée ces dix dernières années dans les pays les plus exposés (Afrique, Amérique centrale…) qu’en Europe.

Des milliards de personnes ont besoin de systèmes d’alerte rapide, d’un accès aux énergies renouvelables et d’une amélioration des récoltes dès maintenant. Il faut prendre à bras le corps cette question de l’adaptation et traiter les déséquilibres historiques. Donc engager rapidement un changement de modèle de développement.

Cet article de notre camarade Christian Belinguier a été publié dans le numéro 293 de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

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