GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Écologie

Climat et profits : l’enfumage est Total !

Il y a tout juste un an, Patrick Pouyanné, le président de Total, annonçait qu’il entendait que son groupe atteigne « la neutralité carbone en 2050 ». La firme spécialisée dans la déforestation, en raison de ses importations massives d’huile de palme, est donc devenue une adepte du reboisement. Drôle de façon de se mettre au vert ! S'appeler TotalEnergies n'y change rien.

Selon le journaliste du Monde Jean-Michel Bezat, Pouyanné « a décidé de planter des acacias sur les plateaux Batéké, en République du Congo. Cette forêt de 40 000 hectares piégera dix millions de tonnes de CO2 sur une vingtaine d’années, s’ajoutant aux autres plantations d’un ambitieux programme forestier de 80 millions d’euros par an ».

Il est piquant de mettre en regard cette touchante attention du PDG de Total en direction de la planète avec le projet d’oléoduc de près de 1 500 km, promu par son groupe entre le lac Albert (Ouganda), où a été découvert en 2006 un gisement pétrolier, et Tanga, le grand port du nord de la Tanzanie. Selon un rapport publié conjointement en septembre dernier par la Fédération internationale des Droits de l’Homme et OXFAM, ce projet pharaonique aura des répercussions sur « des écosystèmes extrêmement sensibles dans une région dont la biodiversité est une des plus riches au monde ». Planter des arbres sur des plateaux sableux très faiblement occupés et exploiter éhontément les sociétés et la terre d’une des zones les plus densément peuplées d’Afrique : voilà l’amibitieux programme de Total ! De là à parler, comme de nombreuses associations, d’« écoblanchiment » en République démocratique du Congo d’un véritable « climaticide » perpétré en Afrique de l’Est, il n’y a qu’un pas…

Et les accords de Paris ?

Malgré les discours des dirigeants d’entreprise étalant autant leur sincère repentance que leur brutale prise de conscience, malgré les annonces qui font la part belle au greenwashing, les faits sont têtus. Au-delà du seul cas de Total, l’industrie pétrolière, soumise à l’instar des autres activités capitalistiques à la loi d’airain du profit et des actionnaires, est loin de tenir les engagements climatiques qu’elle avait pris, la main sur le cœur en 2015, au lendemain des accords de Paris.

Ainsi, selon un sondage de Procensus (un fournisseur de données pour les investisseurs institutionnels) auprès de soixante-quatre fonds d’investissement gérant 11 000 milliards de dollars d’actifs, seuls « 17 % jugent les compagnies capables de se réinventer », nous apprend Jean-Michel Bezat. Pire : une autre enquête révèle que « 62 % des investisseurs leur demandent de privilégier les hydrocarbures plutôt que les énergies vertes » !

Les compagnies pétrolières sont loin d’être les mauvaises élèves d’une classe par ailleurs prometteuse. Toujours selon le journaliste du Monde, la coalition d’investisseurs Climate Action 100 +, qui regroupe des firmes pesant 54 000 milliards de dollars d’actifs, vient de reconnaître que « les engagements de 159 de ses 167 entreprises adhérentes, toutes très émettrices de gaz à effet de serre, ne permettront pas de respecter l’accord de Paris ».

Cet article est à retrouver dans le numéro 285 de Démocratie&Socialisme, la revue de la gauche démocratique et sociale (GDS).

Source : Jean-Michel Bezat, « Les géants du pétrole restent sourds aux discours des gouvernements et des écologistes. Seul l’avis des actionnaires compte », 17 mai 2021

Inscrivez-vous à l'infolettre de GDS




La revue papier

Les Vidéos

En voir plus…