GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Jeunes

Blanquer, l'excellent élève du néo-libéralisme

Parce qu’il « détruit les valeurs de l’École, brise le métier d’enseignant, bloque la réussite des jeunes issus des milieux populaires », le ministre de l’Éducation nationale est sommé de quitter la rue de Grenelle par un collectif d’intellectuels et de professeurs réuni par la Fondation Copernic1. À ce réquisitoire, ajoutons sa conception particulièrement étriquée de la laïcité. Pas étonnant qu’avec Macron, ils s’entendent comme larrons en foire...

La longévité de Blanquer à son poste ministériel n’est pas une bonne nouvelle. Elle autorise cependant une analyse approfondie de l’action de celui qui se réjouissait à l’idée qu’il n’y aurait pas de « réforme » portant son nom ! Pas de « réforme » avouée, certes, mais une impressionnante série de décisions qui, à tous les niveaux du système éducatif, se révèlent porteuses de graves dangers et conséquences.

Un état des lieux pour le moins inquiétant

À l’École primaire, des orientations et de véritables « nouveaux programmes » inavoués, mais particulièrement réactionnaires dans leur contenu même (réhabilitation du redoublement, mise en exergue de la méthode syllabique pour l’apprentissage de la lecture...). Notons par ailleurs des velléités de réformer le statut des directeurs d’école2 en un sens non voulu par les intéressés eux-mêmes, de sacrifier l’indispensable liberté pédagogique des enseignants au nom d’une prétendue « école de la confiance » et de casser ce qui reste de mixité et d’égalité sociales en proposant de créer des établissements élitistes.

Au niveau du secondaire, réformes du lycée général et du bac qui tournent délibérément le dos aux impératifs d’égalité et de justice sociale. Au lycée professionnel, suppressions massives d’heures d’enseignement de Lettres et d’Histoire pour mieux priver les jeunes issus des milieux populaires des repères pourtant indispensables. Et, encore, de nouveaux programmes en Sciences économiques et sociales d’où sont bannies, jugées trop subversives, les notions de profits, d’extorsion de la plus-value et de reproduction sociale pour accorder davantage de place à celles qui glorifient le capitalisme (le marché, l’entreprise privée...).

Les universités et grandes écoles enfin, lesquelles seront totalement soumises aux besoins du patronat et d’où on voudrait exclure les étudiants étrangers et les enfants des classes populaires.

Le tout dans un contexte général d’économie de moyens (saignées successives de postes), d’enseignants sous-payés et malmenés, de quartiers délaissés, de familles sacrifiées, d’élèves abandonnés à leur sort.

L’homme de paille du Medef

Sous prétexte d’ordre, de contrôle, de hiérarchie, le fidèle lieutenant de Macron entend réorganiser le système éducatif pour mieux l’adapter aux besoins des entreprises tels que le Medef les définit et les transmet au gouvernement.

On ne saurait comprendre ces nouvelles orientations si on ne les mettait pas en perspective avec les autres axes du pouvoir (réforme des retraites, casse des services publics, précarisation généralisée...), si on n’en définissait pas le carcan idéologique qui les inspire.

Tout entier soumis à l’autorité du libéralisme et particulièrement sensible à ses sirènes, Blanquer (ex-patron de l’ESSEC, puis ancien recteur de choc), tel le renard dans le poulailler, divise, stigmatise, précarise et vide l’institution dont il a la charge de sa substance, de ses valeurs et de sa raison d’être.

Une laïcité à géométrie variable

Sur le terrain de la laïcité, qu’il occupe sans cesse face aux médias complaisants, l’action du ministre se développe selon une vision particulièrement étriquée.

Alors qu’il avait annoncé en arrivant à son poste que la laïcité serait « le plus essentiel des combats », Jean-Michel Blanquer s’illustre depuis lors en se saisissant de n’importe quel prétexte (petit garçon de maternelle refusant de donner la main à une petite fille, mamans voilées dans les sorties scolaires...) pour mieux « noyer le poisson ».

Son « action », se résumant à toute une série d’interdictions et ne visant qu’une seule religion particulière, est en effet dépourvue de tout contenu réel. Et, plus grave encore, tandis que rien n’avance sur les questions essentielles, telles que la persistance du Concordat en Alsace-Lorraine, et que le financement des écoles privées continue de plus bel !

Comme le loup dans la bergerie

Fidèle vassal de Macron, élève zélé du patronat, chantre du libéralisme, Jean-Michel Blanquer mène sur le long terme une politique notoirement néfaste à l’École publique, laïque, républicaine et démocratique.

Renforçant, à tous les niveaux, les logiques de ségrégation et d’exclusion, tentant de formater au maximum les consciences pour mieux les assujettir aux besoins des entreprises, tournant définitivement le dos à la concertation et à l’écoute, choisissant l’ordre, le contrôle, la hiérarchie, la docilité contre la confiance et l’autonomie, Blanquer sacrifie sur l’autel du néolibéralisme les valeurs fondatrices, les savoirs émancipateurs, les personnels, les élèves et leurs familles.

Blanquer ne partira pas de lui-même. Luttons tous ensemble pour qu’il parte !

Cet article de notre camarade Guy Vermée, inspecteur de l’Éducation nationale à la retraite, est à retrouver dans le numéro de novembre de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

(1) Voir ci-contre. La pétition-appel est en ligne à l’adresse suivante : https://www.change.org/p/enseignants-blanquer-doit-partir?recruiter=1010847616&utm_source=share_petition&utm_medium=copylink&utm_campaign=share_petition

(2) On attend toujours, après le suicide de Christine Renon, directrice d’école aux Lilas (voir notre article dans le dernier numéro de D&S), des propositions sérieuses !

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