GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

À Gauche

À la recherche de l’unité perdue

Les soutiens successifs de la direction de la GRS à Arnaud Montebourg, puis à Fabien Roussel, a poussé les militantes et les militants les plus attachés à l’unité de la gauche à quitter l’organisation d’Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann. Jérôme Sulim est l’un d’entre eux. Il a bien voulu rédiger un texte à notre intention (D&S).

Dans l’imaginaire de la gauche, l’unité renvoie à des moments historiques où les partis la composant ont su s’allier pour imposer la voix des dominés et des exploités au sein des institutions et dans les mobilisations sociales. De nombreuses conquêtes sociales s’en sont suivies, ancrées dans la mémoire populaire. Viennent immédiatement à l’esprit les périodes du Front populaire en 1936 et de l’Union de la gauche en 1972 qui, après bien des méandres, aboutit à la victoire de 1981.

Un œil dans le rétro

On oublie que ces épisodes furent précédés de concurrence féroce entre les principales organisations du mouvement ouvrier. Et les divergences étaient bien plus fortes qu’elles ne le sont actuellement entre ceux et celles qui se réclamaient pour les uns de la réforme, pour les autres de la révolution.

Et pourtant ils arrivèrent à sceller des accords, à se retrouver autour de propositions communes.

Ils furent poussés à s’unir contre le danger fasciste en 1936. En 1972, ils durent répondre aux attentes du salariat et des mouvements sociaux émergents, comme celui des femmes, qui s’étaient exprimées en mai 1968 par une remise en cause radical du rapport capital/travail sous toutes ses facettes.

Dans ces périodes où les organisations de gauche se renforçaient, les dirigeants des partis ont été poussés au rassemblement par leurs sympathisants et électorats. Ces derniers ressentaient que pour affronter les puissants, il est un impératif catégorique : se regrouper, jouer la solidarité contre les divisions de toute nature. Il en est de même aujourd’hui.

En s’engageant dans la construction de l’unité, en transcendant leurs désaccords, les gauches développent un processus visant à agréger les différentes fractions d’une classe sociale, le salariat, qui est tout sauf homogène, en sujet politique. Ce processus ouvre des perspectives d’alliances plus larges avec des alliés potentiels issus de la paysannerie, du petit commerce, de l’artisanat, des professions intellectuelles. C’est la condition de la préparation des victoires à venir.

Saine réaction

La NUPES est née, dans un tout autre contexte que ceux de 1936 et 1972, comme une réponse à cette attente de rassemblement. Le « peuple de gauche » souhaitait une candidature unique aux élections présidentielles. Il n’a pu en être ainsi. Mais, par leur vote du premier tour, les électeurs et électrices ont envoyé des signaux clairs aux partis se réclamant de la gauche.

- Une majorité populaire se reconstruira sur un projet de réformisme radical, la page du hollandisme doit être tournée.

- En portant leur suffrage sur le candidat de gauche le mieux placé, ils ont dit stop à la division entretenue à coup de déclarations fracassantes grossissant à foison les divergences.

Et à partir de cette expression sans équivoque, tous les partis, à l’exception de quelques micro-formations et de « socialistes dissidents », n’ont pu que répondre favorablement à l’appel de Jean-Luc Mélenchon à bâtir une coalition électorale pour les législatives.

Il était temps. Car la gauche au sens large (partis, syndicats, associations) est sur la défensive. Elle n’a pu totalement contrecarrer les réformes destructrices néo-libérales s’abattant sur le pays depuis des décennies. Elle a été affaiblie par les divisions internes à son camp, elles-mêmes provoquées par le calamiteux quinquennat de François Hollande, dont on ne répétera jamais assez qu’il a engendré Emmanuel Macron.

Structurer pour ménager l’avenir

La NUPES est un sursaut salvateur dans un pays où l’abstention est le premier parti de France, où l’extrême droite n’a jamais été aussi puissante. Tel est le ressort de l’unité lorsque les vents soufflent dans de très mauvaises directions, celles des conservatismes autoritaires.

Elle constitue un outil à consolider pour passer à l’offensive contre un pouvoir naviguant à vue, dont le monarque présidentiel se prépare à dissoudre l’Assemblée nationale quand il jugera l’instant venu.

Sa réussite passe par le prolongement de sa structuration du plan national au plan local. Elle doit continuer à s’ouvrir aux mouvements sociaux dans le cadre de son Parlement populaire. Son intergroupe parlementaire va se faire le porte-voix de ceux et celles qui n’en ont pas pour porter leurs exigences de justice sociale au sein du Parlement.

C’est par une dialectique du bas et du haut qu’elle arrivera à se constituer en l’alternative citoyenne, sociale et écologique du XXIe siècle en France face aux droites modernes et traditionnelles, ainsi qu’à l’extrême droite, pour en finir avec les politiques néo-libérales.

Cet contribution de Jérôme Sulim (ex-adhérent de la GRS, maire-adjoint de Saint-Herblain) a été publié dans le numéro 296 (été 2022) de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS)

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