GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Actions & Campagnes politiques

12) Qu’est-ce qu’une « mobilité interne sécurisée » ?

Minute d’étonnement : il est parfois présentée comme une grande nouveauté de l’ANI une « mobilité volontaire sécurisée » (sic). On entend cela dans la bouche de journalistes, voire de ministres sans que personne ne regarde de quoi il s’agit. Répétons-le : il n’y a pas de « liberté » en droit du travail, le salarié est subordonné.

De quoi s’agit-il ? C’est inouï, en effet ! Dans les entreprises de plus de 300 personnes, les salariés ayant plus de 2 ans d'ancienneté pourront aller « découvrir un emploi dans une autre entreprise » (sic) tout en ayant l'assurance (!) de pouvoir retrouver leur emploi... après. Combien de personnes cela peut concerner ? Sous quelles contraintes, quelles menaces sur l’emploi ?

Le projet de loi transpose mécaniquement : Article 3 
Au chapitre II du titre deuxième du livre deuxième de la première partie du code du travail, il est créé une section IV intitulée « Mobilité volontaire sécurisée » ainsi rédigée :

  • « Section IV Mobilité volontaire sécurisée 
« Art. L. 1222-9. - Dans les entreprises et les groupes d’entreprises au sens de l’article L. 2331-1 de trois cents salariés et plus, tout salarié justifiant d’une ancienneté minimale de 24 mois, consécutifs ou non, peut avec l’accord de son employeur, bénéficier d’une période de mobilité volontaire sécurisée afin d’exercer une activité dans une autre entreprise.
  • « Article L. 1222-10 (du projet de loi transposant l’ANI) : La période de mobilité volontaire sécurisée est prévue par un avenant au contrat de travail, qui détermine l’objet, la durée, la date de prise d’effet et le terme de la période de mobilité, ainsi que le délai dans lequel le salarié doit informer par écrit l’employeur de son choix éventuel de ne pas réintégrer l’entreprise. 
Il prévoit également les situations et modalités d’un retour anticipé du salarié, qui reste dans tous les cas possible à tout moment avec l’accord de l’employeur.
  • Qui croit à cette baliverne : l’employeur décide de vous « exporter » et vous, vous ne revenez que quand il veut ?

    Maurad Rabhi, négociateur de la CGT :

    Mesure-t-on les conséquences d’une mobilité forcée pour les salariés ? Ils ne pourront plus contester les propositions patronales, même si elles ne sont pas conformes aux clauses de leur contrat de travail. Un refus vaudra licenciement pour motif personnel (et non plus économique), donc sans mesure d’accompagnement possible.

    On vous le dit tout de suite : il vous faudra un « avenant au contrat de travail » avec l’agrément de votre employeur ! Attention, ce sera une « suspension » (ANI article 7) de votre contrat de travail à vos risques et périls ! Vous imaginez faire cela… que ce soit accepté… et que vous serez bien accueilli au retour ? (sauf à ramener des secrets de fabrication malgré les règles de concurrence ! )

    L’ANI prévoit que si vous voulez anticiper, votre retour, il faudra un « accord commun » des deux parties ! Si vous revenez vous avez droit à « un emploi similaire » (sic). Si vous choisissez de rester dans l’autre entreprise… ça équivaut à une démission (perte de droits complets) de la première !

    Article 15 – Plans de mobilité interne

    C’est une nouvelle obligation de négociation triennale dans l’entreprise : cela signifie que cette négociation aura lieu « à froid », sans rapport de force et organisera à l’avance les possibilités de mobilités qui pourront être utilisées par la suite si l’entreprise veut restructurer.

    L’accord devra prévoir les mesures d’accompagnement et les limites imposées à cette mobilité. L’ANI ne prévoit qu’une restriction : pas de diminution du niveau de salaire ou de la classification du salarié.

    En dehors de cela, tout est permis : si le(s) syndicat(s) signataire(s) de l’accord de mobilité l’accepte(nt), un salarié pourra être muté à 500 km et il devra l’accepter ou être licencié.

    Ce licenciement sera alors pour « motif personnel » : pas de licenciement économique même si la raison de la mobilité est d’ordre économique (par exemple: fermeture d’un magasin). Il suffit qu’il n’y ait pas de suppression de poste, mais une réorganisation ; le salarié pourra être promené d’un poste à l’autre, d’un établissement à un autre.

    En faisant dépendre les règles de mobilité d’un accord d’entreprise, on augmente les inégalités entre salariés : il y aura ceux dont les délégués n’ont pas signé d’accord qui seront mieux protégés que les salariés où un mauvais accord aura été signé.

    Document PDF à télécharger
    L’article en PDF

    Inscrivez-vous à l'infolettre de GDS




    La revue papier

    Les Vidéos

    En voir plus…