GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Jeunes Antiracisme

Réponse à Attal : la véritable urgence, c’est l’égalité !

Gabriel Attal, fraîchement nommé ministre de l’Éducation nationale, a lancé les annonces de rentrée en déclarant gravement : « L’abaya sera interdite à l’école ». Quel scoop ! Ce n’est pas comme si tout était déjà prévu dans les textes officiels : la loi de 1905, bien sûr, mais aussi la Charte de la laïcité et la fameuse loi de 2004 sur les signes religieux dans les écoles publiques.

Depuis des années, les chefs d’établissements font appliquer ce train de lois, en commençant par le nécessaire dialogue avec l’élève impliqué.e, et parfois aussi avec sa famille. Ils savent faire. La plupart du temps, la situation est gérée rapidement et sans médiatisation.

Alors pourquoi une telle annonce ? Pour quelques situations marginales, peut-être compliquées en effet. On nous parle de 150 situations d’atteintes à la laïcité signalées. C’est dérisoire à l’échelle des 10 000 collèges et lycées en France, et des 5,6 millions d’élèves scolarisés dans le secondaire.

Faire vivre la laïcité

Oui, il est nécessaire de rester vigilants sur le respect de la laïcité. Dans l’École publique, en raison de la spécificité du public concerné, les principes d’égalité d’accès au service public et de liberté absolue de conscience passent par une limitation de la liberté religieuse. On ne doit en effet pas pouvoir déceler l’appartenance religieuse d’un ou d’une élève à son apparence physique – ne serait-ce que pour éviter les conflits et pour placer chaque enfant dans une posture propice au développement de son esprit critique. En retour, ce dernier a, dans l’espace scolaire, la garantie d’être protégé des pressions et de toute forme de prosélytisme.

Tous les élèves ont droit au même traitement et on doit leur prodiguer les mêmes savoirs. La laïcité scolaire, en imposant aux personnels un devoir de neutralité, donne à ce titre confiance en l’École et en la transmission des savoirs qu’elle prodigue. En République, la transmission d’une culture commune, de savoirs scientifiques et objectifs, de repères collectifs est le socle de la société. Et on compte à juste titre sur l’École pour nous réunir autour de ce bien commun.

Se donner les moyens de nos ambitions

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, l’École a besoin d’égalité à tous les niveaux. Il doit y avoir un prof devant chaque classe, dans tous les territoires, en Métropole comme dans les communautés ultra-marines. Une vraie mixité sociale est nécessaire dans les établissements scolaires : la carte scolaire doit être revue, et il faut notamment y associer l’enseignement privé sous contrat.

On le sait depuis longtemps : les inégalités sociales impactent directement les réussites scolaires des élèves. Les enfants souffrant de handicap doivent avoir des accompagnants (AESH) s’ils en ont besoin. Les métiers de l’enseignement (enseignants, assistants d’éducation, AESH, infirmières et médecins scolaires, psychologues, assistantes sociales...) doivent devenir ou redevenir attractifs. Le défi est énorme et il paraît pour le moins hasardeux d’y répondre par la perpétuation de l’austérité budgétaire, la sanctuarisation de la Flat tax, la suppression de l’ISF, etc.

Dangereuse diversion

Attal, il y a des urgences à évoquer en cette rentrée scolaire, oui ! Mais la laïcité n’en est pas une ! Tout du moins quand elle est instrumentalisée comme vous le faites : sans vergogne.

En effet, à quoi sert ce gros coup de com’, si ce n’est à conforter l’alliance du macronisme avec la droite radicale et à alimenter l’extrême droite qui n’a même plus besoin de s’exprimer pour engranger des voix ? Ou à essayer de faire oublier les vraies urgences ? Faire d’un bout de tissu le sujet politique de la rentrée scolaire est à la fois malhonnête et extrêmement dangereux. Cela crée de la confusion et fracture artificiellement la société. S’interroger sur l’effet « mode vestimentaire ou pas » des abayas ou encore des qamis n’est vraiment pas à la hauteur des enjeux.

La véritable urgence, c’est de permettre à l’École d’assurer la formation de l’élève, la construction du citoyen et son émancipation. Avec de vraies mesures, pas avec des coups de com’ ! 

Cet article est à retrouver dans le numéro 307 (septembre 2023) de démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

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