GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

Quelle meilleure « carte d’identité » que celle d’un parti qui tiendrait ses engagements ?

L’objectif des états généraux organisés par le Parti socialiste, du 29 août au 6 décembre, est de « reformuler la carte d’identité du Parti socialiste dans le monde actuel »

Pourquoi faudrait-il « renouveler » notre identité ? Pourquoi y aurait-il une telle urgence à le faire ? La dernière déclaration de principe du Parti socialiste date de 2008, le dernier projet socialiste a été voté en 2011 et tous les socialistes ont défendu, en 2012, les 60 engagements de François Hollande. Le « monde actuel » a-t-il changé à ce point ? La crise bancaire avait pourtant commencé en 2007 et la crise économique qui l’avait suivi, dès 2008. Quant à la crise de l’euro (dont nous ne sommes toujours pas sortis), elle avait commencé en 2010, avec la crise financière grecque.

D’où vient l’urgence de redéfinir l’identité du Parti socialiste si ce n’est pour adapter cette identité à la politique gouvernementale menée depuis 2012 ? Une politique qui aligne notre gouvernement sur ce que proposait Manuel Valls lors des primaires socialistes de 2011 mais qui n’avait recueilli que 5,63 % des suffrages. Une politique qui tourne de plus en plus ouvertement le dos aussi bien au projet socialiste de 2011 qu’aux « 60 engagements » de François Hollande.

Où, dans le projet adopté par les socialistes, en juin 2011, dans quels engagements de François Hollande, figuraient la ratification du TSCG (le traite européen rédigé par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy) le pacte de compétitivité, la loi Sapin de juin 2013 qui sécurise les licenciements et flexibilise l’emploi, l’allongement de six trimestres de la durée des retraites, le « pacte de responsabilité », la stigmatisation des Roms, la stagnation ou le recul du pouvoir d’achat, le jeu de Monopoly de la décentralisation, les attaques incessantes contre le droit du travail, l’arrivée de banquiers d’affaires et de politiciens de droite à l’Elysée, au ministère de l’Economie ou à la « défense des droits » ? Nulle part.

La meilleure « carte d’identité » que puisse avoir le Parti socialiste serait celle d’un parti qui tient ces engagements.

C’est pourquoi les états généraux qui servent déjà de substitut à un congrès qui auraient permis aux socialistes de peser sur l’orientation de François Hollande et de Manuel Valls ne doivent pas, malgré la grande généralité des 12 thèmes proposés à la discussion, servir à éviter un débat de fond. Un débat, non pas sur le socialisme dans 10 ou 20 ans mais un débat concret sur la politique à mener durant les trois ans qui nous séparent de 2017 pour éviter le désastre vers lequel nous nous dirigeons tout droit.

Il faudra, d’abord, pour cela, tirer le bilan des « 60 engagements » deux ans après l’arrivée de François Hollande au pouvoir et débattre du bilan publié (sans trop de publicité, il est vrai) le 6 mai 2014 par le gouvernement de Manuel Valls. Ce document intitulé « 60 engagements pour la France – Deux ans plus tard(1) » explique que presque tous les engagements de François Hollande ont d’ores et déjà été tenus ou seraient en très bonne voie de l’être. Comment, dans ces conditions, expliquer que le Parti Socialiste ait perdu 155 villes de plus de 9 000 habitants lors des dernières élections municipales et que ses candidats soient arrivés, avec seulement 13,98 % des suffrages, loin derrière le Front National (24,85 %) et l’UMP (20,80 %), lors des élections européennes ? Les électeurs de notre pays seraient-ils à ce point incohérents qu’ils aient apporté 10,3 millions de voix à François Hollande et à ses engagements au 1er tour de l’élection présidentielle en 2012 et seulement 2,2 millions de voix au Parti socialiste aux européennes de 2014 alors que les 60 engagements du Président de la République auraient déjà été presque tous mis en œuvre ?

Comment des « socialistes réalistes » comme les dirigeants du Parti socialiste pourraient-ils refuser un débat sur la politique concrète menée par François Hollande et sur ses résultats ?

Il faudra, également, ne pas passer à côté de questions déterminantes, comme le fait le résumé des 12 thèmes qui seront soumis au débat. Il faudrait pour cela aborder (excusez du peu) :

  • La question des origines de la crise économique. Elle nous est présentée comme tombée du ciel sans que soit posée la question, essentielle, de savoir si la politique menée en France et en Europe n’est pas un facteur déterminant de cette crise.
  • La question de la réduction du déficit à marche forcée, imposée par la Commission européenne et le TSCG.
  • La question des résultats calamiteux de la politique menée par François Hollande, en termes de croissance, de chômage et… de finances publiques puisque la dette publique va bientôt atteindre 100 % du PIB et que le déficit public va, selon Michel Sapin, augmenter en 2014.
  • La question de la dette publique : son origine, sa légitimité, la possibilité de restructurer ou non et dans quelles conditions.
  • La question de savoir s’il faut continuer, voire accélérer une politique qui nous même droit dans le mur.
  • La question de la « grande réforme fiscale », promise par le candidat Hollande
  • La question des banques et de la Finance, alors que les bulles spéculatives continuent de se gonfler (la Banque Centrale Européenne va encore déverser, sous différentes formes, des centaines de milliards d’euros qui n’iront pas alimenter l’ « économie réelle » mais la spéculation bancaire), faisant planer le risque d’une nouvelle crise qui serait sans doute pire que celle de 2007-2008.
  • La question du traité transatlantique, déterminante pour nos droits sociaux et environnementaux.
  • La question de savoir si pour battre le FN en 2017, le mieux ne serait pas de mener une politique de gauche, conforme au « 60 engagements ».
  • La question des objectifs et des effets des « réformes structurelles » imposées par la Commission européenne et le Medef, alors que ces réformes, mettent en œuvre, l’agenda de Denis Kessler (ancien vice-président du Medef) : en finir avec le programme du Conseil National de la Résistance et ses acquis sociaux.
  • La question de comment nous opposer, pratiquement, à l’Union européenne d’Angela Merkel et de Jean-Claude Juncker. Le thème 12 nous fait marcher sur la tête en se demandant « quels éléments de souveraineté partagée pour réaliser une Europe plus démocratique, plus dynamique, plus solidaire … » alors que l’UE est de moins en moins démocratique, de moins en moins dynamique, de moins en moins solidaire. C’est en tous les cas, ce qu’ont dit avec une éblouissante clarté les électeurs, le 25 mai dernier.
  • La question de la démocratie et de la représentation, comme le prévoit le thème 11, n’a aucun sens si nous ne tirons pas le bilan de l’engagement de François Hollande d’incarner « un président normal ». Comment serait-il possible d’évacuer le fait que jamais un président de la Ve République ne s’est retrouvé aussi isolé (13 % de Français lui font confiance selon le dernier sondage TNS-Sofres), qu’il n’est plus protégé que par les institutions bonapartistes de la Ve République, que le rôle du Parlement, à coup de caporalisation et, peut-être, d’ordonnances, n’a jamais été aussi réduit et le restera si les députés continuent d’accepter cette caporalisation qui risque fort de mener, au mieux, à la réélection d’une vingtaine d’entre eux en 2017.

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  • (1): Portail du gouvernement (République française - Premier ministre – 06/05/2014) (retour)

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