GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

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Quel sérieux budgétaire ?

Le chômage n’a jamais été aussi élevé en France. 3,22 millions de personnes étaient sans aucune activité à la fin du mois de mars (11 % de la population active). Le nombre des demandeurs d’emplois des catégories A, B et C dépassait 5 millions. La France sera en récession économique en 2013 et chaque dixième de point de croissance en dessous de 1,5 % entraînera des dizaines de milliers de chômeurs supplémentaires.

25 ans après François Mitterrand, François Hollande reprend pourtant son fameux « ni, ni », devenu « ni austérité ni relance, mais sérieux budgétaire ».

Quelle différence entre austérité et sérieux budgétaire ? François Hollande l’expliquait le 10 avril « L’austérité c’est quand on baisse les salaires, quand il y a récession, quand il y a un chômage qui atteint 15 à 20 % de la population active ». Le 12 avril, Jean-Marc Ayrault renchérissait : « Parce ce que ceux qui emploient ce mot austérité, il faut aller voir ce qui se passe en Espagne (…) il faut aller voir au Portugal ce qu’est l’austérité… »

L’austérité commencerait donc quand il y aura, comme au Portugal 17,6 % de la population active au chômage en France, c’est-à-dire 8 millions de demandeurs d’emplois. Ou pire quand le chômage frapperait, comme en Espagne, 27,2 % de la population, c’est-à-dire que la France compterait plus de 12 millions de demandeurs d’emploi ! François Hollande aurait-il eu la moindre chance de figurer au second tour de l’élection présidentielle s’il avait tenu de tels propos avant le 22 avril 2012 ?

Quant à la baisse des salaires réels, elle est déjà effective dans la Fonction publique avec le gel du point d’indice. Dans le secteur privé, c’est la funeste loi Sapin sur l’emploi (l’Ani) qui l’organise.

Le rapport de forces entre le salariat et le patronat détermine le niveau des salaires. Tout ce qui affaiblit ce rapport de forces aboutit forcément à la baisse des salaires. La loi Sapin qui mélange une alouette de sécurisation des salariés et un cheval de sécurisation des licenciements organise la « baisse du coût du travail ». Le Code du travail ne protégera plus les salariés qui devront subir le rapport de forces (souvent beaucoup plus défavorable) dans chaque entreprise. Le chantage à l’emploi s’exercera à plein et le patronat pourra imposer la baisse des salaires.

Cette baisse organisée du coût du travail, la Commission européenne lui donne le nom très technocratique de « réformes structurelles ». François Hollande, le 3 mai a promis que la France les mènerait à bien. Ces réformes organisent la baisse du coût du salaire direct mais aussi celle du salaire indirect : les cotisations patronales aux caisses de retraite, d’allocation familiale ou d’assurance-maladie.

Le « ni, ni » de François Hollande n’est pas tenable. Son « sérieux » budgétaire entraîne une stagnation économique alors que la dette publique a augmenté de 86 % à 90,2 % du PIB entre fin 2011 et fin 2012. Ce « sérieux » budgétaire n’a donc rien du tout de « sérieux », il nous mène droit dans le mur. La baisse organisée des salaires finira de casser ce qui reste de demande salariale et de possibilité de croissance économique.

Le véritable « sérieux budgétaire » serait d’assurer une double croissance : une forte croissance des impôts sur le revenu des très riches, pour augmenter les recettes de l’État, et une forte croissance des salaires, pour augmenter la demande solvable.

C’est cette relance de la production, en France et en Europe, qu’il faut massivement mettre en œuvre, pour sortir de l’impasse sociale, économique et financière où nous met cette politique d’austérité qui ne veut pas dire son nom.

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