GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Palestine Insécurités

L’avez-vous remarqué ? Les questions dites de sécurité servent souvent de prétexte ou de paravent pour tenter de justifier des interventions et des déploiements militaires que les béni-oui-oui de la diplomatie occidentale regrettent parfois officiellement tout en s’empressant d’assurer leurs auteurs de leur compréhension. L’invocation du droit à se défendre fait office de bouclier rhétorique dont le bien-fondé ne ferait pas de doute.

Comment pourtant ne pas s’interroger sur le fait que ce sont des armées parmi les plus puissantes du monde (États-Unis, Israël, Turquie) qui y font recours pour imposer leur présence là où elle n’est guère désirée, au grand dam des populations locales ?

Et, plutôt que de discourir sur les risques supposés encourus par des États que personne de sensé ne songerait à agresser, pourquoi ne pas poser le problème de la sécurité des populations ainsi encadrées ? Quelques exemples concrets permettent d’illustrer la situation des Palestiniens.

Familles et enfants

De quelle sécurité disposent les écoliers de Hébron pour aller en classe ? Ils risquent chaque jour d’être caillassés par les enfants de colons élevés dans la haine, sous le regard gêné ou goguenard de soldats des forces d’occupation israéliennes dont la fonction semble se limiter à la protection des colons et ne s’étend pas jusqu’à celle des Palestiniens du lieu, loin de là ; il peut leur arriver d’entraver eux-mêmes le chemin des écoles palestiniennes, que ce soit avec ou sans prétexte.

Autre particularité source d’inquiétude, de stress, voire de traumatisme grave : celle de faire irruption au cœur de la nuit dans les logements palestiniens pour y procéder à des arrestations d’enfants en plein sommeil ; les appartements sont bien sûr saccagés au passage ; et, par des pressions qui peuvent s’apparenter à des tortures, l’on s’efforcera de contraindre l’enfant arrêté à reconnaître qu’il a jeté des pierres, un délit qui peut valoir plusieurs années de prison à son auteur. Rien à voir, bien entendu, avec les jets mentionnés dans le paragraphe précédent. Et ici, le tribunal est militaire.

Habitat

Le droit au logement et la sécurité d’un toit relèvent à maints égards de la fiction. Trois variantes sortent du lot. La première, c’est lorsqu’un groupe de colons s’engouffre dans un appartement palestinien et en prend tout bonnement possession sous la protection des soldats qui l’accompagnent. Ce cas se présente notamment à Jérusalem, qui fait l’objet d’une campagne de « judaïsation » forcenée. Il y a bien parfois un emballage juridique, mais est-il encore indispensable ? On peut se le demander.

La seconde variante, c’est l’ordre de destruction de l’habitation, sous prétexte qu’elle a été édifiée sans autorisation officielle (rarissimement accordée aux Palestiniens). Les victimes sont souvent amenées à le faire elles-mêmes, pour ne pas être obligées de payer un tarif exorbitant à l’entreprise chargée des travaux. Pour les bédouins, cette variante s’applique à des villages entiers.

La troisième variante est d’ordre familial : si un membre de votre famille s’est trouvé impliqué dans un acte de résistance considéré comme terroriste, votre maison sera détruite sans autre forme de procès ; et tant pis si ce type de représailles est condamné par le droit international.

Travail

Malheur au paysan gazaoui dont le champ se situe en bordure du mur de sa prison à ciel ouvert : ici, les travaux agricoles ne se font qu’au péril de sa propre vie.

Malheur au paysan des territoires occupés dans lesquels fleurissent des implantations de colons : là, des bandes armées n’hésitent pas à les empêcher de parvenir à leurs parcelles de terre, à détruire des oliviers centenaires, ou, plus simplement, à en voler les fruits.

Et que dire des denrées périssables destinées à l’exportation, bloquées des semaines durant par les douanes israéliennes ?

Quant aux pêcheurs de la bande de Gaza, chacune de leurs sorties en mer reste sous la menace d’agressions des marines de guerre israélienne ou égyptienne, d’arrestations arbitraires, de destruction ou de confiscation des embarcations.

Intégrité corporelle

Cet article resterait incomplet s’il ne citait pas également les occurrences où des  civils se retrouvent transformés en cibles par des tireurs qui, lorsqu’ils ne les abattent pas d’emblée, s’évertuent à leur infliger des blessures les condamnant à une invalidité permanente : faire éclater leurs genoux semble un exercice particulièrement prisé.

Il est dès lors permis de se poser une question d’ordinaire tue : comment est-il possible de montrer de la compréhension pour un présumé droit de se défendre basé sur l’oppression de populations vouées à l’insécurité ? Ignorance ou complicité ?

Cet article de notre ami Philippe Lewandowski a été publié dans le numéro 272 (mars 2020) de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

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