Des millions de personnes dans les rues, près d’une dizaine de jours de mobilisation nationale, des organisations syndicales combatives et unies, des secteurs en pointe de la grève, un soutien populaire sans faille, une opposition de gauche offensive, à l’Assemblée nationale comme au Sénat… C’est un bloc massif et puissant qui s’oppose au gouvernement sur sa réforme des retraites.

Bloc contre bloc

En face, le mépris d’un Président isolé comme jamais En face, les atermoiements et les revirements de ministres dont les propos se contredisent et s’annulent. Au Parlement, des procédures mesquines, qui abîment la démocratie, et des droites unies – le groupe Renaissance main dans la main avec Retailleau, Ciotti et consorts –, bien décidées à faire adopter, quoiqu’il en coûte, une réforme punitive qui frappera vite et fort la majorité de la population, à commencer par les plus fragiles.

Pas étonnant que la mobilisation sociale soit inédite et que son ampleur les fasse tergiverser là-haut. Car ils rêvent de nous prendre, non pas deux ou trois années après 60 ans, mais bien cinq, six, voire sept… Les plus belles années passées à la retraite, et les pires au travail ! C’est du bonheur en barre que le bloc des droites et le patronat veulent nous voler sans vergogne ! Il en faut du cynisme, après avoir versé des larmes de crocodile sur les « premiers de corvées », pour prendre tant à celles et ceux qui ont déjà si peu.

Après le 49.3 : tout est possible

Que Macron se méfie : la mobilisation a permis bien plus de réflexions, de partage d’expériences et de résolution qu’il n’imagine. Les organisations syndicales ont convaincu ; elles annoncent des milliers d’adhésions. L’intersyndicale tient bon et porte la voix d’une majorité qui reprend confiance, retrouve le chemin de l’action collective et qui n’acceptera jamais le passage en force auquel le pouvoir aux abois a été acculé.

La bataille est en effet loin d’être finie. Suite à l’adoption de la contre-réforme Borne-Dussopt via l’article 49.3, la crise sociale et politique que nous vivons est amenée à s’approfondir encore davantage. La riposte populaire sera à la hauteur de cet énième et ô combien cruel déni de démocratie. Ayons bien en tête qu’un texte voté peut ne jamais être appliqué. Le combat contre le CPE (2006) l’a prouvé : c’est la mobilisation sociale qui tranche in fine.

Obtenir le retrait par tous les moyens !

Si la motion de censure n’a pas abouti, le pouvoir, par le seul recours au 49.3, a reconnu qu’il n’avait pas la majorité pour faire passer sa réforme scélérate. Ils sont minoritaires, illégitimes et autoritaires : alors qu’ils partent ! Dehors, ce gouvernement ! Cet aveu de faiblesse apporte à n’en point douter au mouvement social une précieuse provision de confiance en soi et de combativité.

Tout doit être tenté pour obtenir le retrait des 64 ans. À nous de déferler par millions dans les rues à l’appel de l’intersyndicale. Parallèlement, il faut pousser pour que, dans les entreprises, le mouvement gréviste s’étende et se généralise. En la matière, le 49.3 peut devenir l’étincelle qui embrasera la plaine. Nous avons par ailleurs d’autres fers au feu, et c’est tant mieux ! Le temps venu, il faudra peut-être les en sortir et les utiliser promptement pour infliger la plus cuisante des défaites à ce pouvoir tenté par la stratégie du pourrissement et de la répression. Le Conseil constitutionnel pourra ainsi être amené à retoquer ce texte si bancal. Et une campagne de signatures pourra également aboutir, via la procédure du RIP et avec le soutien de la NUPES, à une issue référendaire, dans l’hypothèse où la mobilisation dans la rue et dans les entreprises ne suffise pas.

Macron doit comprendre une chose : il ne pourra rien faire, ne serait-ce que bouger le petit doigt, tant qu’il ne retire pas sa loi. Soyons des millions, en grève et dans les cortèges, pour le lui faire comprendre et pour arracher le retrait !

Cet article est l'éditorial du numéro 303 (mars 2023) de Démocratie&Socialisme, la revue mensuelle de la Gauche démocratique et sociale (GDS)