GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

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Le Rma : un projet indécent

Sur les 3 à 4 millions de personnes qui ont touché le Rmi depuis sa création, en 1990, moins de 100 000 en sont restés allocataires depuis leur première entrée. C'est dire s'il n'y a pas abus, pas " assistance” : la fraude sur le Rmi ne dépasse pas 0,6 % soit 30 millions d'euros alors que celle sur l'impôt atteint prés de 10 milliards d'euros soit près de 20 % du total.

1. Ce projet de Rma est dangereux pour le monde du travail car il instaure des contrats de travail au rabais et remet en cause le Smic.

Le Rma est un contrat dérogeant au droit du travail. (20 heures de travail hebdomadaire pour le tiers du coût du Smic). L'employeur " gagnera " 580 euros par rapport au coût d'un Cdd classique. L'Etat paiera pour que les entreprises disposent de main d'oeuvre à bon marché. Le Rma est un cadeau supplémentaire pour les employeurs qui vont multiplier les effets d'aubaine sans aucun effet sur l'emploi (hôtellerie-restauration, grande distribution...).

2. Le Rma est dangereux car il va fragiliser la situation des personnes les plus précaires.

Limité à 18 mois, le Rma ne garantit pas une insertion durable. Il n'y a pas d'obligation d'embauche en Cdi à l'issue de la période de Rma. Les obligations d'accompagnement professionnel sont réduites. La loi fait l'impasse sur tous ceux, environ 200 000, qui sont dans l'incapacité psychologique et physique d'assurer un emploi.

Les titulaires du Rma n'auront que des droits sociaux réduits (retraite, chômage, santé, formation professionnelle) calculés sur la base du complément versé par l'employeur en plus du Rmi : un an de Rma ne confèrera qu'un trimestre de cotisations retraite.

3. Le Rma est un désengagement de l'Etat qui met à bas la solidarité nationale.

C'est un transfert de charges précipité alors que le financement du Rma n'est pas assuré. Il n'est pas tenu compte de l'augmentation inévitable du nombre des allocataires du Rmi consécutifs aux réformes de l'Unedic et de l'Ass (+ 300 000 ; +20 à 30 % dans certains départements), sauf une vague promesse de régulariser les dépenses réelles des départements en fin d'année 2004.... Les conseils généraux n'auront pas non plus les moyens financiers et humains de mettre en œuvre l'objectif de 100 000 Rma dès 2004.

4. Les garanties d'égalité de traitement et d'accès aux droits sur le territoire national n'existent pas : c'est la porte ouverte aux décisions individuelles arbitraires, au clientélisme et c'est l'abandon de tout contrôle sur les politiques locales d'insertion.

Les présidents de conseils généraux auront tout pouvoir pour nommer les représentants aux commissions départementales et locales d'insertion qui ne seront plus que des organismes consultatifs. Ils pourront suspendre l'allocation du Rmi au bénéficiaire s'il juge qu'il n'a pas rempli ses engagements " sans motif légitime ". Les conseils généraux agréeront seuls les contrats d'insertion, sans aucune modalité d'évaluation de leurs pratiques.

De plus, l'obligation faite aux conseils généraux de consacrer aux actions d'insertion l'équivalent de 17 % des sommes versées au titre de l'allocation du Rmi n'est maintenue que pour l'année 2004. En l'absence de péréquation, les départements avec le plus de Rmistes auront la charge la plus lourde. Faute de ressources suffisantes, ces départements devront augmenter les impôts locaux.

Le Rma nie le droit à un bon emploi. C'est un emploi précaire, mal payé avec des droits sociaux limités. C'est une véritable machine à fabriquer des travailleurs pauvres.

Il est la traduction de la vision étroitement libérale de ce gouvernement qui poursuit un seul objectif : stigmatiser et culpabiliser les plus démunis (il faut sanctionner les fraudeurs, les profiteurs...).

En particulier Fillon qui déclare : " Le Rmi ne doit pas être un alibi à l'inaction. Nous devons répondre à l'exaspération des Français qui travaillent et ont le sentiment qu'autour d'eux beaucoup de gens ne travaillent pas et ont finalement les mêmes conditions d'existence ".

Régis Juanico


Qu'est-ce que ce maudit Rma ?

La loi portant décentralisation du Rmi et création du Rma (Revenu minimum d'activité) est, hélas, entrée en vigueur le 1er janvier 2004.

Quels bénéficiaires ? Les allocataires du Rmi depuis plus de deux ans. Aujourd'hui, 1,1 millions de personnes sont allocataires du Rmi (2,1 millions avec les conjoints et enfants). 10 % perçoivent le Rmi depuis plus de dix ans ; 50 % depuis plus de trois ans.

Quel type de contrat ? Un contrat à durée déterminée (Cdd) à temps partiel, renouvelable deux fois dans la limite d'une durée totale de 18 mois. A l'issue du Rma, l'allocataire conserve ses droits au Rmi.

Quelle rémunération ? Conclu pour une durée minimale de 20 heures par semaine, ce contrat ouvre droit à une rémunération au Smic horaire, ce qui correspond à un salaire net mensuel de 545 euros net (18 euros de mieux que le Rmi).

Quels employeurs ? Dans le secteur marchand, toutes les entreprises qui le souhaitent (sauf les particuliers employeurs). L'employeur ne doit pas avoir procédé à un licenciement économique dans les six mois précédant l'embauche d'un Rma. Il doit être à jour de ses cotisations (Urssaf) et contributions sociales (Csg). La personne titulaire d'un Rma ne doit pas prendre la place d'un salarié en Cdi licencié. Dans le secteur non marchand, les associations ou les collectivités territoriales (à l'exception des services de l'Etat et des conseils généraux). L'employeur perçoit du département une somme correspondant au Rmi et la complète. Il ne paie de cotisations sociales que sur ce complément, seul à être considéré comme un salaire.

Quelle répartition des compétences ? Jusque là, la gestion du dispositif était partagée entre l'Etat, au titre de l'allocation et les départements au titre de l'insertion. La réforme confie au département la responsabilité de décider l'admission, de veiller aux conditions de versement de l'allocation et d'assurer l'insertion.

Quel financement ? Le transfert de compétences aux conseils généraux s'accompagne d'un transfert de ressources sur la base des dépenses de l'Etat liées au Rmi en 2003 (20 % du montant total de la Tipp, soit 4,9 Mds euros)

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