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La débâcle du Crédit suisse, un scandale historique

Des milliards pour les banques, rien pour les retraités

La débâcle du Crédit suisse, un scandale historique

Alors que la majorité bourgeoise du Parlement suisse a refusé en mars d’accorder entre 7 et 14 francs* de plus par mois aux retraités, ce sont plus de 250 milliards qui ont été mobilisés pour que la faillite du Crédit suisse (CS) ne menace pas l’ensemble du système bancaire suisse et mondial.

Ces décisions sont d’autant plus choquantes que le Parlement helvétique a non seulement rejeté l’idée d’une pleine compensation du renchérissement au niveau des retraites par répartition, mais qu’il a encore adopté une révision de la loi sur la prévoyance professionnelle (retraite par capitalisation), qui se traduirait par une baisse des rentes. Les partis de gauche et les syndicats ont toutefois lancé un référendum contre ce projet insupportable pour la grande majorité des retraités.

Un mastodonte … 

Certains spécialistes du système bancaire estiment que la débâcle du CS était prévisible depuis une quinzaine d’années. Or, durant toute cette période, ni les pouvoirs publics ni l’autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) n’ont levé le petit doigt pour sonner l’alarme. Résultat : avec la caution du Conseil fédéral et de la Banque nationale suisse (BNS), l’UBS, plus grande banque du pays, a racheté le CS. La nouvelle entité sera un véritable mastodonte, avec quelque 5 000 milliards d’actifs ! Un quotidien a calculé que cela représentait 56 fois le budget de la Confédération ou encore 50 fois les dégâts de la guerre en Ukraine !

… trop grand pour la Suisse

Ce rachat, pour trois milliards de francs, a été possible parce que la BNS a mis 100 milliards de liquidités à disposition en échange d’une garantie, c’est-à-dire de titres jugés sûrs, que le CS a dû déposer. Mais la Confédération a également garanti les 100 milliards supplémentaires mis à disposition par la BNS. Si les affaires tournaient mal, le contribuable pourrait ici passer à la caisse. La Confédération donne en outre une garantie de 9 milliards de francs pour la prise en charge des pertes potentielles de l’UBS, alors que 50 milliards avaient d’abord été mis à disposition du CS pour rétablir la confiance. Au total, ce sont donc 259 milliards qui ont été mobilisés !

À court terme, l’essentiel est sauf, mais l’énorme paquebot qu’est devenue l’UBS, trop grande pour la Suisse, fait peur à beaucoup. Car si la nouvelle UBS devait couler, les conséquences sociales, économiques et financières seraient catastrophiques. Non seulement en Suisse, mais aussi dans bien d’autres pays. Depuis longtemps, la gauche suggère que les grandes banques séparent leurs activités de gestion de fortune et d’investissement. Sera-t-elle entendue ? Il faut l’espérer, car l’une des causes de la débâcle du CS réside dans les risques démesurés en matière d’investissements. Il serait aussi temps de tirer les leçons de la crise bancaire de 2008.

Dizaines de milliers d’emplois menacés

La reprise du CS par UBS aura de graves répercussions sociales. Les caisses de retraite vont perdre 450 millions de francs. Selon l’institut BAK economics, entre 9 500 et 12 000 emplois pourraient passer à la trappe avec la reprise du numéro deux bancaire helvétique par sa rivale historique UBS. En tenant compte des effets indirects, l’Union syndicale suisse (USS) est même d’avis que ce sont des dizaines de milliers d’emplois qui sont menacés.

Une partie de ces employés n’aura pas trop de peine à retrouver un emploi. Mais ce sera moins évident pour ceux qui occupent des emplois subalternes. Fédération de l’Union syndicale suisse (USS), l’Association suisse des employés de banque (ASEB) a d’ores et déjà appelé à la mobilisation. Pour élaborer un plan social, on pourrait notamment utiliser les bonus des dirigeants du CS qui n’ont pas encore été versés, alors que le syndicaliste et socialiste Jean-Christophe Schwaab a proposé un moratoire sur les licenciements jusqu’aux négociations entre partenaires sociaux.

Cet article de notre ami Jean-Claude Rennwald (ancien député PS au Conseil national suisse, militant socialiste et syndical) a été publié dans le numéro 304 (avril 2023) de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).

* Rappelons que le franc suisse est actuellement à peu près à parité avec l’euro (Ndlr).

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