GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

L’école publique au risque du projet libéral

Suppression de postes dans les collèges et les lycées, refonte des programmes du primaire, redéfinition du statut des enseignants, extension de la culture du résultat et du mérite aux établissements scolaires, annonce de nouvelles règles pour la carte scolaire. Le service public d’éducation est au cœur d’une remise en cause fondamentale dont les moteurs sont facilement repérables : la réduction des dépenses publiques en premier lieu. Elle semble devenir l’alpha et l’oméga de toute politique éducative à droite ; le discours ultra conservateur de quelques associations qui fantasment à l’idée d’un retour à un âge d’or de l’école.

La préparation de la rentrée 2008 se fait dans un contexte national de réduction des moyens de la fonction publique d’Etat: 11200 postes en moins cette année, qui s’ajoute aux suppressions des années précédentes (en 2007, 5000 postes ont été supprimés pour la rentrée).

Ces suppressions se traduisent désormais concrètement dans les dotations horaires globales des établissements. Elles s’accompagnent de la multiplication ingérable des heures supplémentaires qui n’arrivent pas à être toutes consommées (refus des enseignants au-delà de quelques heures), du recours croissant à des contractuels et des vacataires (parfois même à des retraités); du développement des postes partagés sur deux, voire trois établissements (dynamiques d’équipes et de projets cassés), de la réduction des dispositifs d’aide aux élèves repoussés à la marge du système (accompagnement éducatif en collège, soutien individualisé), de dispositifs sous-traités (réussite éducative donné aux collectivités territoriales de proximité, plan espoir banlieue géré par un autre ministère…), de suppressions d’options afin de garantir les horaires obligatoires et à terme de réductions de ces même horaires obligatoires.

Les conditions de travail des personnels et les conditions d’études se dégradent dans une société dans laquelle les places pour les «exclus de l’école» deviennent infinitésimales.

C’est l’origine du mouvement lycéen. D’ici à 2012, ce sont 60000 à 80000 postes d’enseignants que le gouvernement à prévu de supprimer. Privé de marges de manœuvre, il est amener à s’attaquer à la redéfinition du statut enseignant et à la réforme du lycée. Le nombre d’heures supplémentaires prévus pour la rentrée prochaine ne peut s’effectuer que si le texte en vigueur aujourd’hui est remis en cause : exiger plus d’une heure supplémentaire par semaine pour tous les enseignants.

Cette politique s’accompagne de l’extension aux établissements de la « culture du résultat et du mérite ».

Les personnels deviennent responsables des performances de l’établissement. Les inégalités sociales et les politiques publiques ne sont plus responsables de rien !

Le triomphe du passé

antérieur ou la diligence

revient sur les rails du TGV

15% des élèves sortent de l’école sans maîtriser les contenus qui permettent de réussir au collège, l’école ne progresse plus dans la réduction des écarts sociaux. Dans une société ou l’échec scolaire vaut un billet pour l’exclusion sociale, ces faits, largement médiatisés, interrogent évidemment les parents. Les nouveaux programmes du primaire visent à répondre à ces interrogations par un retour aux fondamentaux et à la morale. Très influencés par les ultras conservateurs, ils ne s’appuient sur aucune concertation. Aucune évaluation de l’application des programmes de 2002 ne les a précédée.

Concoctés en quelques mois, par quelques idéologues, ils sont une négation complète de la professionnalité des enseignants du primaire. Comme le système actuel dysfonctionne, il faut revenir au système antérieur. En bref, si les TGV ont des retards, on remet des diligences sur les rails. Elles, au moins, ont fait leurs preuves !Le choix est idéologique, en rupture avec la tradition républicaine et en cohérence avec l’ultra-libéralisme du gouvernement : la société des gagnants et le loto de l’égalité apparente des chances. Il aboutit à la stigmatisation des faibles, à la culpabilisation des enfants et de leurs parents, à l’idée de la fatalité de l’échec. De la rigueur, de la morale, de la discipline et les élèves en difficulté vont disparaître par miracle. En réalité, nous allons vers la généralisation de l’échec pour les élèves les plus fragiles qui sont aussi ceux des catégories les plus défavorisées. Le soutien à l’école privée est, lui, sans états d’âme.

Les pédagogues, les experts, les syndicats d’enseignants et d’inspecteurs, les anciens ministres, l’association française des psycholinguistes, les mouvements d’éducation populaire, l’association des enseignantes des classes maternelles, les mouvements pédagogiques, les historiens de l’éducation, la FCPE, l’Académie des sciences, l’AFEF (association française des professeurs de français)… expriment leur indignation et leur mise en garde; rien n’y fait, le gouvernement passe en force.

Réformer la carte scolaire

Le projet de suppression de la carte scolaire se met en place. Dans le programme de Nicolas Sarkozy, son corollaire est la suppression du collège unique, c’est-à-dire de la mixité sociale et de la réussite de tous. Pour la rentrée 2008, il ne s’agit que de donner des critères prioritaires à l’acceptation des dérogations: élèves handicapés, élèves boursiers… L’image publique est celle de l’élitisme républicain (tant pis pour les élèves en difficulté qui seront relégué dans les ghettos). En réalité, on fait croire aux familles populaires qu’elles pourront choisir leurs établissements alors que ce sont les établissements qui choisissent leurs élèves. Le résultat est une polarisation sociale croissante des établissements et l’accentuation de la ségrégation sociale avec des possibilités marginales de mobilité.

Démocratisation des savoirs

ou école sélective

La politique du gouvernement peut trouver un écho dans la population qui, confrontée au risque d’échec, cherche une solution pour ses enfants. Le Parti socialiste a la responsabilité de proposer une alternative progressiste et collective: la démocratisation scolaire comme projet. Cela signifie de sortir de l’opposition factice entre quantitatif et qualitatif.

Il y a, à la fois, besoin de moyens supplémentaires et de démarches pédagogiques. Cette politique doit s’appuyer sur les personnels chargés de la conduire et non se faire contre eux.

L’assouplissement de la carte scolaire et la suppression du collège unique vont induire une croissance catastrophique de la fracture sociale dans l’enseignement. La «liberté de choix» comme la «sélection précoce» produisent de l’inégalité. Ces choix seront confirmés et amplifiés par l’ensemble des réformes gouvernementales.

Amplifier les mobilisations

La jeunesse, plaque sensible de notre société, est en mouvement. La mobilisation des lycéens donne un second souffle à celle des enseignants sur les questions de moyens. Elle a le soutien des parents d’élèves. Elle a notre soutien.

Philippe Verdier,

Secrétaire fédéral à l’éducation du département de la Somme

Document PDF à télécharger
L’article en PDF

Inscrivez-vous à l'infolettre de GDS




La revue papier

Les Vidéos

En voir plus…