GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

Intervention de Gérard Filoche : quel « Pacte » de responsabilité avec LES entreprises ?

Juste trois points parce que j’ai peu de temps et ne peux rester. Deux petits et un plus gros.

1°) Le premier petit, c’est à propos du fait que nous soyons majoritaires dans presque toutes les institutions du pays, les communes, les départements, les régions, l’assemblée et le Sénat : est-ce le moment alors de gouverner par décrets et ordonnances ? Une pratique que nous avons combattue en d’autres temps ? Et si cela devait être fait, alors cela aurait dû l’être au tout début pour régler plus vite des questions comme le mariage pour tous ou le cumul des mandats, ou le droit de vote des étrangers.

2°) Le second, c’est qu’il y a un an lors de l’ANI du 11 janvier, on m’a dit que « le contrat devait l’emporter sur la loi » et qu’il fallait défendre ce qui avait été signé avec le Medef à ce moment-là, par 4 syndicats sur 8, pourtant, minoritaires. Et puis voilà que c’est par décret que l’on donne l’autorisation d'ouvrir le dimanche à des patrons fraudeurs. Et contre l’opposition de 8 syndicats sur 8. Ces patrons ont fraudé, sont en infraction et il leur est donné raison, alors qu’on refuse toujours d’amnistier les syndicalistes, qui sont même poursuivis avec acharnement comme à Roanne, il y a plusieurs choses, là derrière, qui ne peuvent pas être bien comprises ni admises.

3°) Plus gros point, c’est le « pacte de responsabilité avec les entreprises ». Je sais bien qu’il n’y a pas de « tournant » là-dedans, c’est la continuité… amplifiée. D’ailleurs s’il y a eu un « tournant » un jour, c’est quelque part quand il a été décidé d’augmenter le TVA et pas le Smic.

Que va-t-on faire de différent avec un « Pacte de responsabilité » qu’on n’a pas fait avec un « Pacte de compétitivité » depuis le rapport Gallois (lequel n’a rien donné depuis 14 mois ni en embauche, ni en dialogue social) ?

Pacte avec quelles entreprises ? Avec qui dans les entreprises ? Avec le patronat ou avec le salariat ? Quel contenu ? Quel but ?

Moi, j’avais critiqué le numéro de notre « Revue socialiste » il y a six mois qui titrait « l’Entreprise » avec un grand « E ». Ça ne veut rien dire. Il n’y a pas d’Entreprise, ça n’existe pas. Il y a 1,2 million d’entreprises très différentes et pas UNE Entreprise. Il y a 1 000 entreprises de plus de 1 000 salariés qui produisent 48 % du Pib et font travailler 3,5 millions de salariés. Et un million d’entreprises de moins de 11 qui en font travailler autant. Mais ce n’est pas le même monde. Rien à voir entre les unes et les autres. Si vous voulez passer un « pacte », elles ont même des intérêts antagonistes… Car les unes sont les sous-traitantes des autres qui abusent d’elles, les « grosses » manipulent les « petites ». La moitié des PME dépendent d’un seul donneur d’ordre qui a pouvoir de vie et de mort sur elles, qui fixe les tarifs au moins disant social. Quant il y a des aides, des allégements de cotisations, (en fait quand l’État paie les salaires à la place des actionnaires) ce sont les « grosses » qui raflent la mise… et ce, pour rien, elles n’embauchent pas ! Elles licencient, pour plaire aux banques et ramasser la mise pour leurs actionnaires.

Si vous voulez convaincre les PME et TPE, faire un « pacte de responsabilité »… moi, je vous dis comment faire : commencez par réguler la sous-traitance.

Profitons du scandale de la question des « salariés détachés » où le gros patronat abuse de 350 000 salariés « détachés », en guise d’esclavage moderne, pour tirer nos salaires vers le bas.

Rendons responsable systématiquement le donneur d’ordre pour tout ce qui se passe sous ses ordres, juridiquement, pénalement, économiquement, financièrement. Ce sera un « pacte de responsabilité », moi, je vous dis, et on aura la sympathie d’un million de petits patrons.

Décidons qu’un marché pour la sous-traitance ne peut se faire en cascade au moins disant social, que le sous-traitant doit être aligné le temps du marché sur la convention collective du donneur d’ordre, que la sous-traitance doit être motivée par la spécialité, le savoir faire, mais pas par le trafic de main d’œuvre à plus bas coût…

Décidons de faciliter la reconnaissance des unités économiques et sociales, des groupes, et la « responsabilité » de leurs dirigeants contre les fausses et coûteuses franchises, les fausses sous-traitances, les prêts illicites de main d’œuvre, les domiciliations bidon…

Vous verrez, comme ça, on se fera une majorité dans le petit patronat, ils nous en seront reconnaissants, cette fois. Mais évidemment ce sera plutôt du côté de la CGPME que du MEDEF… Faut avoir le courage d’affronter les « gros ».

D’ailleurs, il faut régler cette question de la représentativité patronale, parce que le Medef est un groupuscule, en vérité. Et Gattaz se comporte comme un ennemi, il lui est donné 20 milliards de CICE et 65 milliards supplémentaires d’assistanat public aux entreprises, il en réclame 100 milliards. Il ne se lassera jamais de nous couler, nous la gauche. Et tout ça sans contrepartie, car il n’a aucun intérêt à nous aider ni à inverser la courbe du chômage, pacte ou non. Pourquoi ? Parce que la finance rapporte plus aux « grosses », elles ont plus intérêt à spéculer qu’à investir, à licencier qu’à embaucher, cela leur rapporte plus de placer aux Iles Caïman que dans nos industries.

Il faut les CONTRAINDRE à sortir de cette logique sinon elles ne le feront jamais d’elles-mêmes. Il faut se saisir des profits pour les orienter vers l’emploi pas vers les « caves a subprimes ». C’est un mélange de choix fiscaux et de contrôle des licenciements qu’il faut. Il faut contraindre les grosses, il faut contraindre Gattaz qui baigne dans un système qui nous est ennemi, et assouplir, simplifier, si vous y tenez, pour les petites, afin qu’elles puissent honorer leurs salariés sans les réduire en esclavage.

Sur ce excusez-moi, je dois partir en avance, bonne année 14. Des jardins, du soleil et du pain… on aura nos dimanches.

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