GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Contre la détention administrative

Nous reproduisons ici la chronique mensuelle de notre ami Philippe Lewandowski parue dans la revue Démocratie Socialisme n°203 de mars 2013 ».

Le 17 avril prochain, Addameer (association non gouvernementale palestinienne pour la défense des prisonniers et des droits de l’homme)(1) lancera une nouvelle campagne pour l’abolition de la détention administrative, prenant par là même le relais de la grève de la faim des prisonniers palestiniens qui en sont victimes. Il convient de nous en faire l’écho dans la mesure de nos possibilités.

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CONTEXTE JURIDIQUE

S’il est vrai que le droit international admet un usage limité de la détention administrative dans des situations d’urgence, il précise toutefois que des conditions minimales sont requises pour cette décision, comprenant notamment une possibilité équitable pour les personnes concernées de contester les raisons de cette mesure. De plus, l’emploi de cette détention est subordonné à un état d’alerte générale menaçant la vie de la nation, et la mise en détention ne peut être prononcée que dans des cas individuels, sans discrimination d’aucune sorte (Convention internationale sur les droits civils et politiques, article 9). Selon la Quatrième Convention de Genève (article 78), la détention administrative ne peut être employée contre les populations de territoires occupés que pour « des raisons impératives de sécurité ».

INTERPRÉTATION ISRAÉLIENNE

Dans la pratique, Israël ignore délibérément l’ensemble de ces limitations en alléguant être en état d’urgence depuis sa propre fondation en 1948. De surcroît, et en contradiction directe avec le droit international, la détention administrative y est fréquemment utilisée comme punition collective plus que comme une prévention contre un danger futur. Enfin, les détenus administratifs, y compris les enfants, ne sont pas séparés de ceux qui sont officiellement condamnés.

Les forces d’occupation israéliennes sont autorisées à faire usage de la détention administrative envers les civils palestiniens en vertu de l’article 285 de l’ordre militaire 1651. Cet article permet aux commandants militaires d’emprisonner des individus pour des périodes de 6 mois renouvelables s’ils ont « des bases raisonnables de penser que la sécurité du territoire ou la sécurité publique exigent cette détention ». Ces dernières ne sont pas définies, et il n’y a aucune limite au nombre de renouvellements, ce qui ouvre la voie à des détentions dites légales indéfinies.

APPLICATIONS CONCRÈTES

La mise en œuvre de ces mesures prend également des aspects pour le moins contestables. C’est ainsi que les ordres de mise en détention sont généralement prononcés au moment même de l’arrestation, si ce n’est ultérieurement, et sont souvent basés sur des « informations secrètes » dues aux services de renseignement israéliens. Dans la grande majorité des cas, les raisons de l’arrestation ne sont communiquées ni aux détenus ni à leurs avocats, et ils n’ont pas accès à ces « informations secrètes ».

Les détenus sont d’ordinaire informés de la prolongation de leur emprisonnement la veille de leur libération théorique après une (chaque) période de 6 mois.

La détention administrative constitue une barbarie moderne ; elle menace la vie de tous les Palestiniens, puisque chacun d’entre eux peut représenter une « menace » dès lors qu’il exprime un refus de l’occupation.

DERRIÈRE LES BARREAUX, LA LUTTE CONTINUE

L’initiative de la lutte pour abolir la détention administrative est née parmi les prisonniers après l’opération d’échange d’octobre 2011, lorsqu’il est devenu évident que l’État israélien bafouait les accords passés en arrêtant dès décembre certains des Palestiniens qui venaient d’être libérés. Ceux-ci entamèrent alors des grèves de la faim, actions reprises en solidarité par des membres de leurs familles ainsi que par d’anciens prisonniers. Certaines d’entre elles sont parvenues à des libérations, parfois assorties à des mesures conditionnelles d’éloignement. Mais selon les statistiques recueillies par Addameer, il restait 178 personnes en détention administrative au mois de janvier 2013. Les prisonniers les plus résolus sont décidés à lutter jusqu’au bout.

FACE À L’INIQUITÉ, LA SOLIDARITÉ DOIT S’ÉTENDRE

Face aussi au silence éloquent des grands médias et des dits grands défenseurs occidentaux des droits de l’homme, nous ne pouvons pas nous taire. À nous de relayer cette campagne, à nous de faire en sorte que personne ne puisse plus tard prétendre qu’il ne savait pas.

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(1): Mot arabe signifiant « conscience ». Ce post-it doit beaucoup au site de l’association, consultable sur : http://www.addameer.org/index.php (retour)

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