GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

Ce parti mue en profondeur et, après la victoire de Martine Aubry, sa gauche a une chance de l’emporter

Ce congrès de Reims du parti socialiste est un des plus passionnants et des plus politiques qui soient. Il passionne dans le parti. Il passionne hors du parti. Les enjeux politiques sont énormes : le sort de toute la gauche !

Contrairement aux présentations qu’en font la droite et les grands médias, ce n’est pas une bataille de personnes, c’est une des plus grandes batailles d’idées qu’ait connu ce parti dans la grande tradition socialiste. Même si ces idées s’expriment de façon déformée, elle sont là, éclatantes : un choix entre un cours à gauche, ou un cours droitier. D’où la lutte vivante au coude à coude, à rebondissement : une mue ne se fait pas sans souffrance.

Pour la première fois depuis longtemps, la direction sortante ne s’auto reproduit pas

C’est la première fois depuis longtemps que la direction sortante ne s’auto reproduit pas. Elle s’est éclatée en trois : une aile droitière avec Gérard Collomb - Jean Noël Guérini - Ségolène Royal (courant complexe, tiraillé mêlant le plus vieux de l’appareil et des aspirations impatientes neuves mais mal formulées), deux morceaux du “centre” profondément usés d’avoir hésité sempiternellement entre compromis et radicalité.

Il s’est dégagé avec la motion C une gauche socialiste unie, à contre courant d’abord, puis qui profite de la crise du capitalisme pour polariser le débat, mais qui est encore minoritaire, repoussée par les médias, avec une sympathie progressive mais encore une incrédulité chez les militants les plus légitimistes.

Même avec 42 voix d’avance pour martine Aubry le 21 novembre, il y a un résultat, il est serré mais il existe. On comprend qu’il soit contesté, mais il y a une majorité écrasante au CN. Une majorité moins contestable celle de Ségolène Royal. Le vote sur des motions et plus important que celui sur des personnes. Il y a contradiction entre un vote proportionnel et un vote plébiscitaire majoritaire. (Il faut supprimer ce vote plébiscitaire personnalisé, présidentialiste et en revenir à une premier secrétaire désigné au sein des instances) Derrière tout cela, il y a de la politique vivante. Et une chance d’influer ce parti vers la gauche.

Une chance d’influencer ce parti vers la gauche

D’abord si Ségolène est montée à ce niveau, et quoiqu’elle soit droitière (refus du smic à 1500 euros, de la retraite à 60 ans, des 35 h, pas un mot pour défendre le code du travail…) elle exprime aussi une partie du puissant besoin de gauche chez les militants. Elle était candidate, elle a eu, en notre nom à tous, 17 millions de voix, et même si elle renié des éléments clefs de sa campagne l’électorat de gauche n’en voit toujours pas d’autre :

Le paradoxe existe en effet :

  • d’une part la candidate délibérément provocatrice et messianique qui déclenche des phénomènes passionnels, se fraye un chemin à l’esbroufe, et une partie de ses supporters la magnifie en “sauveuse” d’où la dynamique dont elle bénéficie. Il y a, mêlé à cela, des désirs positifs, une impatience de battre Sarkozy, de dépasser les “querelles” complexes du parti, de changer vite : elle réussit à masquer, en se présentant pour le renouvellement, le fait qu’elle roule dans les allées centrales du pouvoir depuis 1983, cinq fois ministre, une des plus anciennes de la direction depuis 25 ans, partie prenante de toutes les politiques majoritaires jusqu’à 2007 inclus. Qui ne voit qu’elle doit, au départ ses voix, sur les plus vieux secteurs conservateurs de l’appareil ?
  • d’autre part l’effondrement du “grand bloc central” que François Hollande aspirait de ses vœux. Les deux morceaux de ce défunt “bloc central”, les motions A et D, se sont affaissés tour à tour, divisés chacun en leur sein et se divisant l’un face à l’autre. C’est la fin de la gestion Hollande post-Jospin. Ils n’ont jamais voulu trancher entre un choix droitier, et un retour aux fondamentaux de gauche, ils ont perdu.
  • Bertrand Delanoë d’abord qui a écouté ses conseillers pour se présenter à contre courant en social et libéral et qui a perdu ses chances de ce fait. Martine Aubry ensuite qui a payé le prix d’un attelage contradictoire derrière elle. Incapables de s’unifier ils ont fait le lit de la dynamique adverse : comment Ségolène Royal ne progresserait elle pas, après une absence d’entente pareille ?

    La seule solution eut été de jouer tous ensemble aussi franc et clair que Royal, en lui opposant un candidat vraiment neuf défendant un cours plus à gauche, Benoît Hamon : les deux morceaux de l’ex bloc central A et D n’ont pas su s’y résoudre. En maintenant division et impasse le 16 novembre à Reims, ils ont nourri les votes des 20 et 21 novembre. Cela aurait pourtant été un tournant et un renouvellement plus fort, plus attractif de soutenir Benoit Hamon : ils l’ont freiné, ils ne pouvaient pas plus l’accepter que la main mise sur le parti par Ségolène Royal. Ce n’est qu’avec + 0,04 % que Martine Aubry bénéficiant des voix de l’aile gauche, motion C, l’emporte. Mais rien n’est fini avec cela, la mue va continuer, érodant inexorablement le “centre” sortant et la polarisation va continuer son chemin.

    Les exigences sociales vont pousser à la clarification vers la gauche

    Tant mieux, ça ne pouvait plus continuer comme avant, il faut clarifier. Il faut fortement lutter contre tout découragement militant hâtif, nous vivons un moment passionnant. Toute haine irrationnelle doit être balayée. Nous devons aider à mettre en lumière le choix politique qui se pose derrière tout cela. Hé, oui, les chemins de la transformation sociale, ne sont pas limpides, en ligne droite. Il y a des méandres, des obstacles, des sursauts et des coups de théâtre.

    En fait, c’est toute la société, derrière le PS qui cherche une issue à gauche au sinistre sarkozysme ! La politique suivie depuis mai 2007 est une politique arrogante, totalement réactionnaire, socialement explosive, entièrement tournée vers 2 % de privilégiés. Le pays entier va bientôt connaître une mue lui aussi, liée à cette crise aiguë du capitalisme dans laquelle nous sommes. Le libéralisme est désormais discrédité. Nous allons connaître d’immenses mouvements sociaux.

    Cette crise, ce débat aigu, cette mue du PS sont totalement d’actualité, et reflètent et anticipent ces grands événements. La gauche du parti a une grande chance si elle est constante, sérieuse, unie et plus profondément sociale, de l’emporter : “ceux qui vont à contre courant arrivent parfois avant les autres !” Or nous n’allons plus à contre courant, nous sommes devenus indispensables à la direction et nous sommes moteurs dans le débat d’idées.

    Vivent la redistribution des richesses, les 35 h, la hausse massive des salaires, le Smic à 1500 euros, la retraite à 60 ans a taux plein, la Sécu pour tous, un code du travail protecteur, les services publics, une fiscalité directe et progressive ! Vive une VIe République sociale, laïque, démocratique, parlementaire.

    Gérard Filoche

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