GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Economie Théorie Histoire

Aventis, Alstom, J2M, supermarchés...

Dire que la gauche sous Lionel Jospin s'effrayait à la seule idée de mettre en place une "économie administrée" lorsqu'il était question de mettre en place une nouvelle sorte de contrôle administratif sur les licenciements ! Nous entendons encore Elisabeth Guigou écarter l'idée de contrôler les licenciements : " Non, non, pas d'économie administrée". Nous entendons encore Lionel Jospin nous dire : "L'état ne peut pas tout".

Les libéraux ne jurent que par "moins d'état". Moins d'état dans l'économie. "Libre concurrence". "Concurrence non faussée". Le baron Seilliére, idéologue de MM. Chirac et Raffarin, exige que "la rue, les juges et les lois cessent de s'occuper des entreprises".

Les radios, le matin, nous réveillent avec le ronron de la pensée unique : liberté des entreprises, lever les "blocages", "enlever les freins" qui réglementent la production, faciliter les flexibilités, etc.

Mais voilà que Nicolas Sarkozy convoque dans son bureau tous les "grands" de la distribution pour leur demander de baisser les prix. Selon lui, et c'est évident pour le consommateur, les prix augmentent trop, profitant des conversions en euros. Les "marques" se sucrent au passage. Les monopoles des grands "Carrefour" imposent "leurs lois" (leurs prix) aux clients. Libre concurrence faussée. Est-ce que Sarkozy propose aux "convoqués" de rétablir vraiment le libre négoce : non, il exige d'eux de baisser certains prix, il demande 5 %, il se réjouit d'en obtenir 2 %. Il n'abuse pas de son autorité (il ne veut pas se fâcher avec tous ces grands patrons !) mais il en use : économie administrée ? Voilà le ministre des Finances qui ré-intervient directement dans la fixation des prix.

Est-ce une entorse au "libéralisme" et au "moins d'état" ? Non, car en fait, les libéraux ont un double langage permanent : ce qu'ils veulent déréglementer, c'est ce qui les gène, mais dés qu'ils peuvent ils inventent toutes les réglementations qui leur semblent opportunes. N'est-ce pas ce que fait Bush, en prenant les mesures qui lui chantent pour protéger le marché intérieur des Usa, et violer quand il veut, ce qui a été édicté par l'Omc. Grand battage pour la libre concurrence, réelle pratique de troc au coup à coup selon les rapports de force. Bush administre l'économie.

Nicolas Sarkozy en fait tout autant quand, dans son bureau du ministère des Finances, il règle la fusion entre Avantis et Sanofi-synthélabo, en écartant Novartis. C'est l'état qui décide avec quel groupe, le grand pharmacien français doit s'allier, quitte à mettre en jeu des dizaines de milliards pour permettre la fusion.

N'en est-il pas de même lorsqu'il s'agit de remettre à flots Alstom, en socialisant les pertes après avoir privatisé les profits ? Bruxelles a beau faire mine de mettre des conditions à ces "ingérences" de l'état, cela se fait quand même. Les seules règles qui sont inventées pour la circonstance sont un habillage pour masquer les dérogations "à la libre concurrence".

Et enfin Jean-Marie Messier, dit J6M, ex-"moi-même maître du monde" et Pdg d'Universal, plaide non coupable parce qu'il a fait racheter des actions afin de soutenir les cours de celles-ci avant le bilan annule de son entreprise. C'est de la pure manœuvre qui démasque le caractère artificiel des jeux boursiers ordinaires. Mais les grands groupes eux-mêmes, bien surs, se moquent de la "libre concurrence".N'est-ce pas Denis Kessler, ex-numéro 2 du Medef, responsable de la branche assurance du patronat, qui, après le 11 septembre 2001, et la destruction des Twin Towers, allait mendier auprès de l'état des "sur-assurances" contre les risques encourus par de tels attentats ?

Et puis, on nous avait dit, il y a 11 ans, qu'il fallait privatiser Air France pour "permettre la concurrence", contre l'avis des salariés qui manifestèrent et s'y opposèrent puissamment en novembre 1993. Depuis que s'est-il passé ? Air Lib et Air Littoral sont disparus, le groupe Air France fusionne avec Klm, créant un monopole plus gros et plus puissant encore... Quid de la concurrence et des baisses de prix ?

De toute façon, tous ces groupes, par qui sont-ils dirigés ? par des "conseils d'administration", ce sont des administrations plus rigides encore que celles qui sont construites dans le cadre du service public, sauf qu'elles ne servent que des intérêts particuliers. Ce sont des administrations qui échappent à tout contrôle et dont les bénéfices ne vont pas au public mais dans les poches des seuls actionnaires - lesquels n'en ont jamais assez et se moquent bien de l'intérêt général.

Les prix n'ont pas baissé non plus dans les téléphones, au contraire, les trois bientôt quatre opérateurs s'entendent pour piller les usagers devenus "clients" : les "Sms" sont même l'occasion d'un pillage en règle de l'argent des jeunes, justifié par aucun motif commercial. L'état y a, par contre, perdu des milliards qui, auparavant, alimentaient les caisses du public, du temps du service public et qui, aujourd'hui alimentent sans contre-partie celles de grands financeurs tout puissants. Voilà qu'on veut nous faire le même coup avec l'électricité : partout on sait que la privatisation marche moins bien, coûte plus cher, mais ça ne fait rien, nos libéraux espèrent faire encaisser par leurs amis, de substantiels bénéfices au détriment du secteur public.

Les libéraux n'ont pas de principe, dogmatiques de la libre concurrence en apparence, capables de faire le contraire dès que leurs intérêts sont en jeu, la gauche n'a pas de complexe à avoir : elle doit se prononcer pour un état volontaire qui se mêle d'économie, qui pèse sur les priorités, qui protège et augmente le secteur public, qui administre lorsqu'il faut administrer !

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