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24 h pas chrono : temps partiels, l’ANI, la loi 2013 vidés de ce qui reste de leur contenu par la prochaine « ordonnance »

Il y a 2 ans, le 11 janvier 2013, était signé l’ANI (« accord national interprofessionnel ») entre le Medef et la CFDT.

Les promoteurs de l'ANI organisaient dans les médias une campagne qui magnifiait les « avancées de ce texte » : ainsi Nadjat Vallaud-Belkacem publiait une tribune inouïe – encore plus à la relecture 2 ans après – pour valoriser « une avancée décisive. Un seuil minimal horaire de travail s’imposera désormais dans la signature du contrat à temps partiel. Il a été fixé à un niveau élevé : 24 heures par semaine. Cette disposition est une conquête sociale de premier plan » pour les femmes car 3,7 millions de françaises travaillent à temps partiel, soit un tiers de l’emploi féminin. Elle le qualifiait d’historique : « Que les partenaires sociaux se soient attelés à améliorer les droits de ces femmes précaires est en soi un changement historique qu’il faut saluer pour ce qu’il est : la conséquence d’une volonté de faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes au travail. »

À l’époque, nous avions critiqué ici cet accord dans son entier et en particulier sur la question du seuil de 24 h, en démontrant que cela ne se ferait pas, qu’il existait 6 dérogations majeures, et que le patronat l’empêcherait en pratique. (Cf. le texte publié alors pour information et preuve : il date du 28 janvier 2013 : L’ininformation sur le prétendu progrès à propos des femmes et des « temps partiels »).

Depuis qu’est il arrivé ?

Les négociations pour mettre les 24 h en œuvre, devaient se tenir avant la loi du 14 juin puis leur terme fut fixé au 31 décembre 2013.

Comme aucune branche importante de la distribution, du nettoyage, de la santé, de l’enseignement, de la chaussure… n’avait signé d’accords le 31 décembre, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a été obligé de faire une « saisine rectificative » le 22 janvier 2014 pour changer la loi, a posteriori, le 7 mars 2013 et reporter le délai du 1er janvier 2014 au 30 juin 2014.

Mais rien n’était encore signé le 30 juin 2014. Or en théorie, les contrats de moins de 24 h étaient devenus « interdits »… sauf 6 dérogations et l’hostilité de plus en plus proclamée du patronat.

Le « plancher » de 24 h était en fait, depuis le début une « passoire » : la loi prévoyait que les salariées pouvaient d’elles-mêmes,

  • à l’embauche, renoncer au plancher de 24 h,
  • que les salariés des « particuliers » n’étaient pas concernés,
  • que les moins de 26 ans n’étaient pas concernés,
  • que les branches où il y existait plus de 30 % de temps partiels, pouvaient négocier des dérogations « en dessous » du plancher de 24 h,
  • que les salariées déjà en poste garderaient leurs contrats horaires existants en dessous de 24 h jusqu'au 1er janvier 2016,
  • que les employeurs pourraient décider de « paquets de 8 heures complémentaires » à leur gré,
  • que la majoration des heures complémentaires qui étaient à 25 % redescendrait à 10 % mais dès la première heure,
  • que les salaires seraient lissés,
  • que les délais de prévenance en cas de modification des horaires, seraient raccourcis,
  • que le principe d’une seule coupure de moins de 2 h en une journée serait renégocié.
  • Avec ces dérogations, le plancher de 24 h n’avait déjà plus de portée.

    Coup de grâce :

    Mais voilà qu’un projet d’ordonnance Valls-Rebsamen, prévu en février 2015, annule ce qui reste de ce que le patronat avait pourtant signé en janvier et ce que la loi avait confirmé en juin 2013.

    Au 10 décembre 2014, il paraît que 40 branches, dont 30 recourant à du temps partiel massif, ont signé des accords dérogatoires – inférieurs - aux 24 h et cela couvrirait 78 % des salariés concernés. (selon Les Échos, 24 décembre).

    Le patronat a réussi ainsi à renier dans 80 % des cas prévus, ce qu’il avait signé et qui avait été présenté comme une « avancée historique ».

    Mais coup de grâce, un projet d’ordonnance prévoit aussi :

  • que les salariées qui auraient accepté de travailler moins de 24 h à l’embauche ne pourront pas imposer de « revenir en arrière ».
  • De même les salariées déjà en poste en dessous de 24 h ne pourront pas exiger que le plancher leur soit appliqué en 2016 comme prévu.
  • En cas de remplacement d’une salariée absente, sa remplaçante aura la même durée de travail (et non pas 24 h).
  • Enfin la durée de 24 h ne s’imposera pas aux CDD de moins de 8 jours.
  • On savait que le Medef pouvait se moquer de sa propre signature et de la loi - dont il avait pourtant exigé qu'elle soit fidèle au « contrat » qu'il avait signé ! Il démontre qu'il peut se moquer du gouvernement, du ministre du travail, du ministre des droits des femmes, des médias, des citoyens, des salariés, des partenaires sociaux, (il fait pareil sur la « pénibilité »).

    Mais comment des syndicats peuvent ils se prêter à cela ?

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