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Macron vend l’aéroport de Toulouse Blagnac

Nous publions ci-dessous un article de notre camarade Virginie Houadec, paru dans Démocratie&Socialisme n°220 de décembre 2014.

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Le 4 décembre, dans une interview exclusive à La Dépêche du Midi, « journal de la démocratie », Macron annonce le rachat de l’aéroport par un consortium chinois. Allié aux Canadiens, le groupe chinois Symbiose, composé du Shandong Hi Speed Group et Friedmann Pacific Investment Group (FPIG), rachète 49,9 % du capital.

Le ministre de l’économie affirme qu’il tient « à préciser qu’il ne s’agit pas d’une privatisation mais bien d’une ouverture de capital dans laquelle les collectivités locales et l’état restent majoritaires avec 50,01 % du capital. On ne vend pas l’aéroport, on ne vend pas les pistes ni les bâtiments qui restent propriété de l’État » Le prix de cette transaction est de 308 millions d’euros.

Depuis le 27 novembre, on peut lire sur le site de Médiapart un article de Laurent Mauduit qui détaille les dessous de cette vente annoncée.

Le groupe chinois acheteur est détenu par un oligarque, Poon Ho Man, et se nomme Capella Capital Limited, une holding immatriculée aux îles Vierges britanniques. Ce groupe a pour filiale Friedmann Pacific Asset Management Limited, immatriculée aux îles Vierges britanniques, qui s’est alliée au groupe canadien SNC-Lavalin Inc. Celui-ci immatriculé aux îles Caïman et sous le coût de sanctions de la Banque Mondiale pour corruption.

Sous le titre « La Banque mondiale radie SNC-Lavalin Inc. et ses filiales pour dix ans » et le sous-titre « la plus longue période d'exclusion jamais fixée dans un règlement de la Banque mondiale », voici ce que l’on peut lire dans un communiqué (rapporté par Mediapart) en date du 17 avril 2013 : « Le Groupe de la Banque mondiale annonce ce jour la radiation de SNC-Lavalin Inc. – en plus de ses 100 filiales – pour une période de 10 ans, suite à une faute professionnelle commise par cette société dans le cadre du Projet de construction du pont multifonctionnel du fleuve Padma et d'un autre projet financé par la Banque. SNC-Lavalin Inc. est une filiale du Groupe SNC-Lavalin, une société canadienne dont elle représente plus de 60 % des opérations. Cette radiation s’inscrit dans le cadre d’un Accord de règlement négocié entre la Banque mondiale et le Groupe SNC-Lavalin, à l'issue d'une enquête menée par la Banque mondiale sur des allégations de complot de corruption impliquant SNC-Lavalin Inc. et des fonctionnaires au Bangladesh. »« Alors que l'enquête suivait son cours, une autre faute professionnelle commise par SNC-Lavalin Inc. a été portée à l'attention de la Vice-présidence de l’Intégrité de la Banque mondiale en rapport avec le Projet de transport et d'électrification rurale au Cambodge, financé par la Banque (…). La faute commise par SNC-Lavalin incluait un complot visant à verser des pots-de-vin et à faire de fausses déclarations dans le cadre de la soumission à un appel d'offres pour des contrats financés par la Banque, et ce en violation des directives de la Banque mondiale concernant la passation des marchés. »

Selon Médiapart toujours, il y avait d’autres investisseurs plus fréquentables mais qui n’ont pas été retenus par Macron. En effet, pourquoi les Chinois ?

On ne pose pas de question. Macron menace : « ceux qui, à Toulouse, sont attachés à l’emploi et au succès d’Airbus, doivent réfléchir à deux fois aux propos qu’ils tiennent. Notre pays doit rester attractif car c’est bon pour la croissance et donc l’emploi. »

À ceux qui s’inquiètent de la très mauvaise réputation de SNC-Lavalin Inc., Macron minore les faits reprochés et affirme qu’ils sont très anciens (NDLR Avril 2013) : « Ce groupe qui, je le répète, n'est pas membre du consortium retenu, a en effet été condamné voilà plusieurs années pour des faits de corruption au Bangladesh. Il a depuis mis en place en son sein un plan de remédiation et la plupart des dirigeants ont été changés. Il dispose d'une compétence reconnue dans les infrastructures et gère une quinzaine d'aéroports en France, notamment ceux de Francazal, de Vatry ou de Rouen. » Il parait urgent d’informer le ministre de l’économie de la France que SNC-Lavalin Inc est sous le coup d’une interdiction de la Banque Mondiale jusqu’en 2023.

Dès le 5 décembre, le Président de Région dans un communiqué de presse, où il parle de « privatisation partielle » de l’aéroport précise : « nous n’avons été consultés ni sur le montant proposé par chacun des pétitionnaires, ni sur le choix ». Il se félicite que, dans la situation, la Région détienne une minorité de blocage qui le moment venu : « permettra soit d’initier, soit de refuser des projets qui nous sembleraient contraires à l’intérêt général. »

L’intérêt général ! C’est bien de cela dont il est question. L’aéroport de Toulouse Blagnac est le 6e de France. C’est l’aéroport d’Airbus. Il réalise plus de 10 millions d’euros de profit par an. Pourquoi le vendre ?

On peut aussi légitiment s’interroger sur ce gouvernement qui ne consulte, ni les députés, ni le président de Région et qui décide seul, sans concertation, de brader à des délinquants sociaux et financiers un bien public.

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