GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Syndicalisme rime avec socialisme et écologie

Nous publions ici la chronique mensuelle de notre ami Jean-Claude Rennwald, militant socialiste et syndical suisse, ancien député (PS) au Conseil national suisse. Cet article est paru dans le numéro 228 d’octobre 2015 de Démocratie&Socialisme, article écrit avant le résultat des législatives qui ont vu le parti national-populiste UDC confirmer sa position de première force politique de Suisse.

Durant la législature du Parlement fédéral qui vient de s’achever (2011-2015), le Parti socialiste (PS) et subsidiairement les Verts ont été les deux formations politiques les plus proches des travailleurs et de leurs organisations syndicales.

À l’inverse, l’Union démocratique du « centre » (UDC), dont certaines thèses sont proches de celles du Front national, est le parti qui s’est le plus opposé aux revendications du monde du travail. C’est ce qui ressort d’une analyse de l’agence de communication Bording Crossing, pour le compte de Syndicom (poste, télécoms, imprimerie) et du SEV (Syndicat du personnel des transports), deux des plus importantes fédérations de l’Union syndicale suisse (USS).

Libéraux à la traîne

Sur 5 000 votes ayant eu lieu au Conseil national (équivalent de l’Assemblée nationale) entre la session d’hiver 2011 et la session d’été 2015, Border Crossing a choisi, au cours de plusieurs étapes, 24 votes déterminants sur des questions de politique sociale, de transports, d’énergie, de service public et de revendications syndicales. A chaque fois, le vote des parlementaires a été comparé avec la position du SEV et de Syndicom.

Dans le classement établi sur cette base, le Parti libéral-radical (PLR), porte-parole du grand patronat, est, après l’UDC, le parti le moins proche des travailleurs et des syndicats, alors que les formations politiques du centre-droit, le Parti évangélique, les Verts libéraux, le Parti bourgeois démocratique (PBD) et le Parti démocrate-chrétien (PDC), occupent une position intermédiaire.

Le PS en pointe

Parmi les 50 députés (sur 200) au Conseil national qui ont voté le plus souvent de manière conforme aux préoccupations syndicales, on trouve 42 socialistes, 7 Verts et 1 représentante du Parti évangélique. A l’autre bout de l’échelle, sur les 50 conseillers nationaux qui s’opposent le plus fréquemment aux propositions des syndicats, il y a 49 députés UDC et l’unique représentant du Mouvement des citoyens genevois (MCG), mouvement national-populiste de Genève. Ce positionnement de l’UDC tord le cou à l’idée que ce parti serait celui des salariés à revenu modeste, des retraités, bref des « petites gens ». Ce qu’on savait d’ailleurs depuis longtemps, puisque son idéologue en chef Christoph Blocher est deux fois milliardaire…

Dans ce classement, les socialistes romands tirent particulièrement bien leur épingle du jeu. Ils occupent en effet près de la moitié (9 sur 20) des vingt premiers rangs du classement. Ce constat n’est guère étonnant, car depuis plusieurs décennies, les liens entre le mouvement syndical et les socialistes francophones sont plus étroits qu’avec leurs camarades alémaniques. Chez les Verts, ce sont aussi deux élues de Suisse romande qui ont le mieux défendu les préoccupations de la classe ouvrière et des syndicats.

Syndicalisme et politique se complètent

Certes, en Suisse comme dans beaucoup d’autres pays du centre et surtout du nord de l’Europe, les conventions collectives de travail (CCT) constituent l’instrument essentiel des syndicats en vue de défendre les salariés et d’améliorer leurs droits. Toutefois, le travail conventionnel ne permet pas de résoudre tous les problèmes que rencontrent les travailleurs, car certains d’entre eux relèvent de décisions législatives et politiques, comme ceux qui ont trait au régime des retraites, à l’assurance-maladie, aux services publics ou à la libre circulation des personnes et aux risques de dumping social et salarial que celle-ci comporte. Et ces quatre prochaines années, les défis ne manqueront pas : réformes des retraites et de l’imposition des entreprises, alternative à l’initiative de l’UDC « contre l’immigration de masse » (laquelle met en péril les relations entre la Suisse et l’Union européenne), pour ne citer que quelques exemples.

Un frein au social-libéralisme ?

Dans ces domaines, il importe donc que les syndicats soient présents à toutes les étapes du processus de décision, raison pour laquelle il n’est pas sans intérêt de savoir quels sont les partis politiques et les élus qui sont les plus proches d’eux, même si les uns et les autres doivent garder leur indépendance et leur spécificité. À l’inverse, le PS et les autres partis de gauche, en Suisse comme dans le reste de l’Europe, ne devraient pas oublier que plus un groupe de population est syndiqué, plus il vote en leur faveur. Un constat, espérons-le, qui devrait mettre un frein aux dérives sociales-libérales, en Suisse comme à l’étranger. Dans cette perspective, la récente élection du député Jeremy Corbin – très lié au mouvement syndical – à la tête du Parti travailliste anglais est un très fort signal d’espoir Avec cette réserve que, dans le cas de la Suisse, les élections fédérales du 18 octobre pourraient déboucher sur un tassement de la gauche (spécialement des Verts) et un renforcement de la droite musclée (libéraux-radicaux et UDC). Au moment de boucler cette chronique, les résultats de ces élections n’étaient pas encore connus, mais nous y reviendrons dans un prochain article.

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