Suharto, un des pires criminels du monde avec Pinochet
Ah, non, ils ne vont pas nous le "réhabiliter" ? Mais si, ils osent.
C'est basé sur l'ignorance... L'Indonésie c'est loin. On en a moins parlé
que du Chili ! Ce n'était pas en 1973 mais en 1965 ("l'année de tous les
dangers" - le seul film diffusé assez massivement en Occident). France-Inter
l'appelle d'abord "le dictateur musclé" avant de parler quand même, un peu,
de ses crimes... Or ces crimes sont immenses : il liquide près de 500 000
militants de gauche en six mois, il crée des camps de concentration où
croupissent des centaines de milliers de gens pendant deux décennies.
C'est Suharto qui organise la provocation et le coup d'état de 1965 qui sert
à décapiter et à détruire un parti communiste de 3 millions de membres, et
12 millions de sympathisants (l'Indonésie avait 120 millions d'habitants en
1964). Il met fin au pouvoir de coalition de gauche de Sukharno (ne pas
confondre) et enfonce l'Indonésie pendant 32 ans dans une des plus
sanglantes dictatures du monde. Totalement soumise aux USA. Il est corrompu
comme Pinochet et a détourné des millions de dollars. Il est destitué comme
Pinochet, enfin et trop tard... Il meure comme Pinochet, sans être jugé pour
ses crimes.
"Pas de réaction", monsieur Sarkozy ?
Ci dessous :
Extrait du livre "mai 68, histoire sans fin" Ed. JC Gawsevitch, G. Filoche,
23 euros, 480 p.
Suharto : 500 000 assassinats
1965, c'est aussi l'année de tous les dangers en Indonésie. Ce fut pour nous
un des premiers vrais sujets de débat international. Il y avait de quoi :
dans un immense pays où vivaient alors 120 millions d'habitants, jusque-là
gouverné par Sukharno, nationaliste de gauche, un coup d'État militaire
déclencha une vaste tuerie à l'encontre du mouvement communiste qui était
pourtant tout-puissant. Le Parti communiste indonésien comptait 3 millions
de membres et, avec toutes les organisations de masse qu'il animait,
regroupait près de 12 millions de sympathisants. Ce parti était présent dans
l'ensemble des rouages de la société indonésienne, y compris l'armée.
Mais
lorsque l'extrême droite manœuvra pour prendre le pouvoir, il réagit trop
tard et ne sut constituer un front suffisant pour l'en empêcher. Il en
résulta un véritable massacre de tout ce qui comptait comme forces
progressistes dans l'ensemble des îles. Le secrétaire général Aidit, qui
résista les armes à la main dans le nord de l'île de Java, fut éliminé,
ainsi que tous les cadres et des centaines de milliers de militants :
pendant six mois, la chasse aux sorcières sévit. Il y aurait eu 500 000
victimes et autant d'internements en camps de concentration sous un régime
féroce. Pendant plus de trente ans, l'Indonésie devait subir le joug du
nouveau dictateur, Suharto.
En France, on a moins gardé la mémoire de cet événement que du coup d'État
perpétré, sept ans plus tard, au Chili, contre Salvador Allende. C'était
pourtant le genre de massacres que la CIA organisait dans ces années-là. Les
responsables états-uniens qui ont perpétré ces crimes contre la démocratie
et les peuples ne sont, hélas, toujours pas jugés, ni McNamara ni
Kissinger(1) . Nous partagions le malheur qui frappait le mouvement
communiste et, avec lui, le peuple indonésien, et nous nous sentions
impliqués exactement comme s'il frappait à notre porte et que nous en étions
comptables.
(1): Lire l'excellent ouvrage Une histoire populaire des États-Unis
d'Amérique
, de Howard Zinn, Marseille, Agone, 2002. (retour)