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Services publics : tout le monde descend !

Sans surprise, Emmanuel Macron emboîte le pas à la doxa bruxelloise et réduit drastiquement les dépenses publiques. Les Français ne peuvent être surpris : le candidat libéral avait proclamé haut et fort durant la campagne qu’il visait 60 milliards d’euros d’économie sur cinq ans, dont 25 milliards dans la sphère sociale. Et comptait bien sabrer dans les services rendus au public et les biens communs.

Élu, l’ancien banquier d’affaires passe à l’action : il réduit les dépenses budgétaires et les emplois dans des secteurs à forte utilité sociale (éducation, logement) et s’évertue à confier de larges pans de l’activité publique à des intérêts privés, explicitement (avec les privations d’Engie et autres Aéroports de Paris) ou implicitement, à travers son programme de promotion des retraites par capitalisation.

« Rentabiliser », le nouveau mot pour « détruire » ?

La situation du service public en France n’est pourtant pas si glorieuse : surexploitation des agents et sous-allocation des besoins en matière de santé, école impuissante à réduire les inégalités sociales, tribunaux engorgés, prisons insalubres, etc. Ouvrir (encore plus) à la logique marchande tout ou partie de ses activités expose avec quasi-certitude à réduire de manière potentiellement spectaculaire la qualité des prestations, ainsi que leur accessibilité pour les plus défavorisés, et à en augmenter les coûts pour la collectivité : l’exemple des assurances privées à l’étranger ou les précédents français de privatisation des (auto)routes ou de transfert de la gestion de l’eau aux requins Veolia et Suez l’ont bien montré.

Au-delà, ce sont les fondements même de la solidarité nationale, laborieusement organisée après la Seconde Guerre mondiale, que l’on s’efforce de saper. Et la politique d’Emmanuel Macron, comme avant lui Margaret Thatcher et leurs camarades du groupe de Bilderberg, ne vise qu’à une chose : augmenter la part de richesse nationale détenue par le privé et réduire le patrimoine partagé. Avec tout ce que cela implique en termes de croissance des inégalités, y compris territoriales, de relâchement du lien civique ou de dommages irréversibles causés à la planète au profit de quelques capitalistes nés entre 1900 et 2000.

Pourtant les Français restent attachés à leurs services publics. Et on les comprend ! Qui niera l’importance de services hospitaliers de bon niveau, des places en crèche en nombre suffisant, d’un système éducatif performant, de la tranquillité publique ou de l’accès à des espaces de loisirs et de sports bien entretenus ?

Dans le « nouveau monde », pas de droit au bonheur...

La question est : pourront-ils, et surtout voudront-ils les défendre ? Car le sacrifice de l’intérêt général à quelques intérêts particuliers passe aussi et peut-être surtout par une remise en cause du statut de fonctionnaire, plusieurs fois tentée, encore jamais atteinte. Le gouvernement annonce des réformes pour le printemps prochain et le pire n’est pas à exclure : le rapport Action publique 2022* (« phare libéral » comme il est parfois désigné) remis récemment au gouvernement réclame « un nouveau contrat social entre l’administration et ses collaborateurs ». Traduction : il faut développer les rapports de droit privé avec les agents en charge de l’intérêt général.

L’enjeu est d’importance : d’abord parce que, comme il est souvent entendu, un agent sans statut pourrait être perturbé par des pressions – l’argument est à manier avec prudence, l’actualité montrant régulièrement que les fonctionnaires ne sont pas immunisés... Mais peut-être aussi, tout simplement, parce qu’un agent sans statut est potentiellement un agent plus stressé et donc moins efficace. Et donc moins apte à bâtir et consolider, par son activité quotidienne au sein de la Cité, le bien-être du plus grand nombre. Un sujet qui, s’il ne rallie pas autour de lui l’ensemble des citoyens, devrait cependant parler à ce plus grand nombre.

* Le rapport est sous-titré « Service public : se réinventer pour mieux servir – Nos 22 propositions pour changer de modèle ».

Cet article de notre camarade Arno Lafaye-Moses est à retrouver dans la revue n°248 d'octobre 2018 de la revue Démocratie&Socialisme

 

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