Quand la défiance remplace la confiance
Le 1er mars, vingt-cinq organisations associatives et syndicales ont déposé un recours devant le Conseil d’État contre le Contrat d’engagement républicain, prévu par la loi liberticide connue du grand public sous le nom de « loi Séparatisme ».
La loi dite « Séparatisme » du 24 août 2021, qui avait soulevé d’importantes critiques de la part de la société civile au point de devoir être remaniée et renommée « Loi confortant les principes de la République », a fait l’objet, en date du 31 décembre 2021, d’un décret, entré en vigueur le 1er janvier 2022, qui interpelle de très nombreuses associations et organisations sur les atteintes à la liberté associative, les graves risques de stigmatisation et d’interprétations divergentes ou arbitraires.
Un monde associatif vent debout
Ce décret instaure notamment un Contrat d’engagement républicain (CER) qui organise une surveillance des associations, au mépris de la liberté associative. Ce CER devra être obligatoirement accepté par les associations qui solliciteront des subventions ou des prêts de salle auprès des communes, remettant ainsi en cause l’autonomie territoriale. Il prévoit en outre la mise en cause des responsables associatifs pour les manquements commis directement par eux-mêmes, mais aussi par les salariés, par les membres de l’association et même par les bénévoles liés aux activités de la structure !
Le monde associatif est vaste, divers et hétérogène, mais ce texte qui conforte et aggrave la loi du 24 août 2021 censée « conforter les principes de la République » réussit l’exploit de faire l’unanimité… contre lui ! Les associations s’engagent au quotidien pour faire vivre et défendre les principes républicains, nul besoin d’un contrat pour le leur rappeler. La loi « Séparatisme » s’inscrit dans une politique du tout sécuritaire alimentée par les discours les plus haineux.
Quand le flou autorise toutes les interprétations
Les sept engagements recouverts par ce contrat sont rédigés, dans la pure tradition macronienne, de manière suffisamment floue pour laisser libre l’interprétation administrative. Ignorant l’existence des textes déjà existants qui encadrent la vie associative (Code civil, Code pénal, Loi de 1901, Charte des engagements réciproques…), il évoque, sans les préciser, des comportements équivoques laissant ainsi à l’administration « un pouvoir de sanction très large, sans information claire sur les voies de recours possibles » (avis du Haut Conseil à la vie associative).
Par un transfert univoque, ce contrat remet fortement en cause l’autonomie des collectivités locales, contraignant les élus locaux à mettre en place un contrôle des associations et du comportement de ses membres.
Un collectif d’associations (LDH, Attac, FNLP, SAF…) et de syndicats (CGT, FSU…) vient, en conséquence, d’engager un recours devant le Conseil d’État. Un courrier a été adressé à tous les maires et présidents de conseils départementaux pour leur demander, tout en respectant la loi, de rendre ce contrat sans effet et de faire savoir qu’il est possible de lutter contre les dérives et comportements sectaires ou intégristes sans porter atteinte aux libertés de toutes et tous, à la libre expression et à l’engagement citoyen.
Cet article de notre camarade Hervé Tessier a été publié dans le numéro 294 (avril 2022) de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS)
Pour qui sont ces CER ? |