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Palestine : la parole à Al-Shabaka

Pour la sixième année consécutive, Al-Shabaka trouve sa place parmi les meilleurs « think tanks » du monde. Selon le 2018 Global Go To Think Tank Index (GGTI) paru le 31 janvier*, Al-Shabaka se situe au 36e rang des 88 « think tanks » en réseau répertoriés, en maintenant sa position en dépit de l’accroissement du nombre de « think tanks » évalués, et pour la première fois entre dans les cent meilleurs « think tanks » dans l’aire Moyen-Orient - Afrique du Nord. Mimi Kirk, Managing director de Al-Shabaka, a accepté de répondre à quelques questions.

Qu’est-ce qu’un « think tank » ?

Un « think tank » est une organisation qui produit des savoirs et les propage en direction des politiques, au sein de la société civile et de la communauté globale. Son but ultime est d’influencer les décideurs afin de parvenir à des changements de cap dans le sens souhaité. Il le fait souvent directement, en plaidant leur cause auprès des responsables politiques, mais il peut également le faire de façon indirecte en diffusant leurs propositions au sein de la société civile, qui peut à son tour exercer des pressions sur les décideurs pour qu’ils effectuent des changements d’orientation.

Pourquoi avez-vous choisi de construire un « think tank » plutôt que de rejoindre ou de créer une organisation politique ?

Al-Shabaka a comblé un vide, car, avant sa création ; il n’existait pas d’organisation transnationale indépendante offrant une plate-forme pour les voix de la politique palestinienne. Al-Shabaka cherche à transformer la faiblesse de la dispersion des Palestiniens en une force, en regroupant les savoirs et les expériences palestiniennes du monde entier. Ses analystes politiques se trouvent dans le monde arabe, aux États-Unis d’Amérique, en Europe et au-delà. L’organisation a attiré près de 200 penseurs stratégiques palestiniens dans son réseau, allant de jeunes auteurs émergents à des analystes plus expérimentés.

Cherchez-vous d’abord à influencer la politique palestinienne ou à modifier le point de vue dominant sur la lutte palestinienne dans le monde occidental ?

Si Al-Shabaka offre une plate-forme à des points de vue palestiniens divers, elle le fait tout en soutenant les principes d’auto-détermination, de liberté, de justice et d’égalité. C’est pourquoi les membres d’Al-Shabaka peuvent débattre entre eux sur les meilleures solutions à proposer aux problèmes palestiniens, mais ils le font dans le cadre des droits de l’homme – et ceci est valable quel que soit le point discuté, que ce soit la direction politique palestinienne et les approches occidentales sur la Palestine. Par conséquent, ce sur quoi nous mettons l’accent la plupart du temps reste les thèmes sur lesquels se focalisent nos membres. Cependant, nos référents politiques (l’un basé aux États-Unis, l’autre en Palestine) et le président de notre équipe concentrent souvent leurs efforts en direction des capitales occidentales et de la communauté internationale en général.

Rencontrez-vous des obstacles ou devez-vous faire face à des ennemis dans votre travail ?

Nous sommes continuellement confrontés à l’obstacle d’une contre-offensive intense visant à calomnier et à ostraciser la communauté pro-palestinienne. Cette contre-offensive continue à dominer le discours le plus répandu, en dépit de brèches parmi des communautés locales et de quelques changements parmi les leaders de la société civile et les politiques, comme aux États-Unis Ilhan Omar, du Minnesota, membre du Congrès.

Quelles devraient être les principales tâches des sympathisants occidentaux de la cause palestinienne ?

Les sympathisants occidentaux doivent travailler en tant qu’alliés des Palestiniens dans leur lutte pour l’auto-détermination et les droits de l’homme. Ceci peut prendre diverses formes : l’adhésion à des associations pro-palestiniennes, l’écriture d’articles de journaux, la participation à des voyages en Palestine organisés par des structures palestiniennes... Mais une importance particulière doit être accordée à leur capacité d’écouter et de relayer les voix palestiniennes au sein des discours dominants et en direction des décideurs politiques. De tels alliés occidentaux devraient également agir de façon intersectorielle, comme par exemple avec des groupes comme les Afro-américains ou des Amérindiens, pour forger un front unifié contre le racisme et la violence institutionnels et structurels.

Merci, Mimi Kirk, pour ces éclaircissements. Il est possible de consulter directement le site d’Al-Shabaka (https://al-shabaka.org/en). Quelques analyses de cette organisation sont par ailleurs traduites en français sur le site Chronique de Palestine (http://www.chroniquepalestine.com/category/al-shabaka/).

Propos recueillis et traduits par Philippe Lewandowski  parus dans le numéro d'avril de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale.

* Le GGTI est publié par le University of Pennsylvania’s Think Tanks and Civil Societies Program, et est élaboré à partir des contributions de 1796 institutions et experts qui analysent plus de 8 000 think tanks répartis dans plus de 85 pays.

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