GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

On débat dans les sections

Le projet est également l’occasion de réunions, de commissions qui permettent aux socialistes d’échanger sur le projet. Nous reproduisons ci-dessous le compte-rendu d’une commission qui s’est tenue le 5 mai dans la section Pierre Bérégovoy (Paris 14ème)

Compte-rendu de la commission n° 1

« Refaire de la France une nation qui compte »

Par Jean-François Claudon

Remarques liminaires :

  • 1) La commission regroupait les nombreux camarades désireux d'échanger sur la thématique n° 1 (« emploi, compétitivité, investissement, désendettement »), ainsi que ceux qui voulaient travailler sur la thématique « pouvoir d'achat, salaires, pensions », qui n'avait pas attiré les foules.
  • 2) La tournure très libre de la discussion, ainsi que l'absence de président de séance, rendent impossible toute restitution analytique des débats. La présente contribution a pour modeste objectif de rendre compte du sentiment général des camarades tel qu'il s'est dégagé à l'issue de cet échange.
  • Des camarades ont insisté à plusieurs reprises sur le caractère décisif des échéances électorales de 2012. Perdre une nouvelle fois et laisser le pouvoir échoir de nouveau à Sarkozy et à sa bande constitueraient un coup terrible pour les salariés qui n'en finiraient pas de payer la crise du capitalisme financiarisé, mais aussi un aveu d'échec dramatique pour la famille socialiste qui manifesterait une nouvelle fois son incapacité à se réunir sur un projet crédible et répondant aux aspirations de la majorité des Français. Nos ennemis sont identifiés : il s'agit bien sûr de Sarkozy en personne, ainsi que de Marine Le Pen qui surfe sur le rejet de la droite, le désespoir social grandissant dans les couches les plus précarisées de la population et sur les difficultés qu'a la gauche à proposer une alternative crédible et unitaire. Mais il s'agit surtout de l'abstention qui peut, à elle seule, nous mettre au tapis, puisqu'il est clair que cette élection sera en grande partie jouée dès le 1er tour. Et comme en 2002, on sent bien que l'abstention fait le jeu de la droite et du FN. Pour prévenir le « risque » abstentionniste, le programme socialiste se doit de susciter, presque au 1er coup d'œil, l'enthousiasme des salariés ou tout du moins l'intérêt bienveillant du peuple de gauche. C'est là sa tâche la plus fondamentale.

    Les critiques de notre commission se sont essentiellement portées sur des aspects formels relatifs à la transposition du projet dans le concret. Nous avons bien été contraints de remarquer qu'il existait de nombreuses divergences, parfois importantes, entre le 1er document de travail produit par la Commission du projet, le projet « Le changement » tel qu'il a été publié et les « 30 engagements » qui sont censés en extraire l'essentiel et le ramasser sous forme de quelques mots d'ordre. A notre sens, les « engagements », et plus particulièrement les 7 qui nous étaient soumis, pêchent par un décalage trop grand avec le contenu du projet et ils atténuent parfois de façon significative la force de nos propositions. Nous proposons donc qu'un travail de reformulation de ces « engagements », qui constituent le cœur de notre programme et le socle de notre militantisme pour les 10 mois à venir, soit engagé par le Parti. En outre, cette nouvelle mouture des « 30 engagements » pourrait être précédée d'une sorte d'exorde insistant sur la philosophie du projet socialiste : remettre la politique au centre du jeu en luttant contre la main-mise des « marchés » -c'est-à-dire des spéculateurs- sur nos vie, contre les solutions individualistes prônées frauduleusement par la droite et contre les tentations de repli nationaliste ou communautaire qui touchent une partie non-négligeable de nos concitoyens. Nous devons montrer en quelques lignes que nous sommes en capacité de réguler la mondialisation, de changer d'Europe et de remettre notre pays violenté par la droite depuis 10 ans, dans le sens de l'histoire (baisse du temps de travail sur la semaine et sur la vie, hausse du niveau de vie et d'instruction, augmentation de la part socialisé des salaires, affirmation des libertés fondamentales...)

    Un exemple de reformulation nécessaire : l'engagement n° 4 qui annonce la création de « 300 000 emplois d'avenir dans les domaines de l'innovation environnementale et sociale ». La droite et ses valets médiatiques sont déjà en train de nous attaquer sur ces « emplois-jeunes » déguisés qui sentent déjà le réchauffé... Sans entrer dans le débat sur l'emploi des jeunes, nous avons constaté que le projet, lui, indique clairement qu'il s'agit d'emplois d'insertion destinés aux jeunes qui sortent sans qualification du système scolaire et universitaire. Ces « emploi d'avenir » constituent en réalité un dispositif déterminé, ayant pour but de remédier à un problème très précis, et non une fâcheuse réédition des emplois-jeunes de l'époque de la Gauche Plurielle... Il serait bon que la formulation de cet engagement respecte davantage l'esprit du projet, ne serait-ce qu'en parlant d'emplois d'insertion professionnelle.

    Des camarades ont également déploré le caractère limitatif de l'engagement n° 7 concernant la lutte contre l'endettement. La gauche ne doit pas tomber dans le piège qui se dissimule derrière le discours apparemment technique sur la dette, ce piège que la droite nous avait déjà tendu en 2007. Contrairement à ce que crient sur tous les toits les libéraux, la forte hausse des déficits publics depuis 2007-2008 n'est pas due à une envolée des dépenses sociales, mais en réalité aux emprunts consentis pour sauver les banques et surtout à la baisse vertigineuse des recettes (dégrèvement d'impôts, bouclier fiscal, loi TEPA, exemptions de cotisations patronales, niches fiscales...). Les nantis gagnent sur les deux tableaux puisqu'ils payent moins d'impôts et peuvent accaparer une part croissante des créances publiques suscitées par cette brusque chute des ressources. Alors qu'il faut insister sur la nécessaire hausse des recettes publiques et sur le caractère illégitime et spéculatif d'une partie de nos engagements financiers, les apôtres de la dette nous invitent à baisser les dépenses sociales afin de « réduire l'endettement », c'est-à-dire de rembourser grassement ceux qui nous mènent dans le mur depuis des années. Moins promettre aux salariés pour satisfaire la base sociale de nos adversaires, ce n'est certainement pas la meilleure façon pour l'emporter l'an prochain... Pourquoi, dans cet engagement n° 7, ne pas soumettre aux électeurs un « contrat de transparence budgétaire » fondé sur un audit précis des engagements financiers de l'État, ainsi que sur l'engagement solennel que l'augmentation des dépenses publiques ne se fera qu'en corrélation manifeste avec la hausse des recettes et la création de nouvelles ressources ?

    Il faut également être plus précis dans plusieurs engagements dont les formulations pêchent par un excès de généralité. Tout le monde est d'accord pour que nous « dissuad[i]ons les licenciements boursiers ». Encore faut-il expliquer, même en quelques lignes comment ! La référence à de vagues « pénalités financières » est ici largement insuffisante. Prises telle qu'elles, les électeurs risquent de ne pas juger crédibles ces propositions ; ils s'éloigneront alors fatalement de nous et seront repoussés dans les bras de Le Pen, mais surtout vers l'abstention sur laquelle la droite mise de toutes ses forces. Tout cela est d'autant plus dommageable que le projet fourmille de propositions pour s'attaquer aux licenciements. Sur ce point précis, une reformulation de l'engagement n° 5 serait souhaitable. Par ailleurs, il ne faut pas hésiter à chiffrer certains engagements. Sur la question des salaires, pourquoi se cantonner à « revaloriser[...] le pouvoir d'achat du Smic » ? Ici encore, la droite nous attend au tournant avec sa chimérique prime de 1000 euros qui n'a aucune chance d'être versée, mais qui a la mérite d'exister en tant que proposition prétendument concrète. L'opinion influencée par les médias dominants ne nous pardonnera pas de rester à une tel niveau de généralités sur cette question. Puisque nous prônions le Smic à 1500 euros brut en 2007, il faut être cohérents avec nous même, au risque de nous renier, et défendre un Smic à 1600 euros brut dès le 1er juillet 2012. En effet, sans le moindre coup de pouce, son augmentation annuelle automatique le portera à ce niveau à la fin de la prochaine législature...

    Dernier élément de réflexion : la fiscalité. Nos propositions ne doivent pas uniquement donner l'impression que l'imposition est conçue par les socialistes comme une sanction consécutive à une réussite privée considérée comme abusive. À l'impôt répressif doit répondre l'impôt incitatif. La révolution fiscale que nous préconisons doit avant toute chose se concentrer sur les secteurs d'activité qui sont suffisamment protégés pour ne pas pâtir d'une hausse des prélèvements obligatoires. Il s'agit là essentiellement des grandes entreprises industrielles et commerciales, ainsi que des activités faiblement concurrentielles telles que la restauration. En revanche, les secteurs les plus soumis à la concurrence internationale doivent être ménagés. L'engagement n° 2 insiste sur le caractère modulable de cette nouvelle fiscalité que nous préconisons, mais il faut dire d'une façon encore plus claire que nous défendrons sans aucune hésitation les PME et les TPE en les soumettant à des exigences fiscales plus souples que les grandes groupes. L'impôt sur les sociétés devrait par exemple être modulable en fonction de la taille de l'entreprise.

    Récapitulatif des propositions du groupe de travail :

  • Rédiger une introduction aux « 30 engagements » qui fixe le cap de la reconquête : la réappropriation des affaires publiques par la politique au détriment de la finance et des « marchés »,
  • Montrer que nous disposons d'énormes marges de manœuvre en martelant sur les 10 points que le capital a volés au travail dans la partage de la valeur ajoutée depuis 30 ans,
  • Reformuler de façon plus précise les « engagements » que nous soumettrons aux électeurs en s'appuyant davantage sur la lettre du projet,
  • Chiffrer davantage certaines mesures telles que l'augmentation du Smic ou encore la défense des 35 heures,
  • Hiérarchiser les engagements en mettant au cœur de notre projet la réappropriation de la politique par la nation et les mesures d'urgence sociale,
  • S'adresser de façon plus explicite aux PME et aux TPE en leur montrant qu'elle ne seront pas les victimes du « tour de vis fiscal » que nous appliquerons aux entreprises qui ne suivront pas les nouvelles règles du jeu édictées par la souveraineté populaire librement exprimée.
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