Mathilde, le verbe haut et le corps vibrant
La Fête de L’Huma, c’est l’occasion de faire des rencontres politiques, d’échanger, de débattre. Cette année, sur le stand partagé L’Après - Ensemble! - GDS, il était aussi possible d’entendre une autrice, interprète de textes ciselés, avec un combat chevillé au corps : celui des droits des femmes. Retour sur le concert de la chanteuse Mathilde.
Il est environ vingt heures trente. Mathilde est attendue sur scène. Sous le barnum, une estrade à la moquette rouge, des dizaines de chaises posées çà et là, cinq jeux de lumières aux couleurs du Nouveau Front populaire. En quelques minutes, des femmes et des hommes s’installent. De la curiosité pour une partie, des convictions pour d’autres, de l’enthousiasme encore, pour celles et ceux qui, notamment les plus jeunes, connaissent l’artiste.
Temps de sororité
Le concert va commencer. Mais on veut comprendre. Qui a invité Mathilde ? Et pourquoi ? Des femmes politiques grimpent sur l’estrade, expliquent. Elles relatent leur soutien, les coudes serrés, face à la violence en politique, la violence des hommes, la violence d’une organisation politique qu’elles ont aujourd’hui quittée et qui ne leur a rien épargné. Elles nous offrent un moment de sororité suspendue. Elles nous disent l’importance des textes de Mathilde, l’importance de Mathilde, son bouleversant réconfort. Elles se tiennent tout près, font corps, un bloc uni. Et nous en face, l’émotion en bandoulière, le combat féministe en étendard.
Et alors, Mathilde chante. Mathilde se présente, présente son chemin. Elle nous prépare. Rien n’épargnera les hommes dans les paroles qu’elle égraine, la voix puissante et envoûtante. Elle dit les violences, leur systématicité. Elle dit les souffrances, leurs conséquences. Elle livre un combat au nom des filles et des femmes. De nous toutes, qui pleurons des larmes de colère, des larmes d’empathie, quand elle évoque les coups, les humiliations, les agressions. Nous toutes, qui sourions quand elle relève la tête, rend hommage aux collages sur les murs, prévient qu’on lâchera rien d’ici l’égalité, la vraie. Nous toutes, qui nous rappelons l’immensité de la tâche, après qu’elle scande, en un texte malin, l’ignominie de contenus sur les réseaux sociaux, la ciblant, la harcelant.
Habituez-vous !
Elle chante Le corps des femmes, pour qu’enfin on nous fiche la paix, Guerrières de lumière, pour battre le rappel, Il était une fille parce que la violence s’exerce avant tout dans nos maisons, chez nous, ou Je veux plus mentir pour (ré)apprendre à vivre sans entrave, à se plaire à soi, fières de nos corps et de nos choix.
Et puis, elle nous raconte l’histoire pas banale de Révolution. Une chanson pas tout à fait ordinaire, qui naît de la réplique cinglante d’une Raquel Garrido déterminée à ne rien lâcher, à qui un homme opposait justement qu’elle ne se la laissait pas compter et à qui elle a simplement répondu : « Habitue-toi ». Habitue-toi, comme un programme. Habitue-toi, comme un projet de société. On est là, on est toutes les femmes. Apprends à compter avec nous, sans quoi tu vas déchanter.
Mathilde, révélée au grand public dans le télé-crochet populaire The Voice, dont le chemin intrigue autant qu’il nous rend admiratives (voir encadré ci-dessous). Mathilde, dont on comprend que le combat est va se poursuivre, quitte à déplaire. Mathilde, une chansonnière anarcho-féministe, la rage au ventre, le poing levé haut, réchauffant l’air d’un barnum empli de personnes qui, le temps d’un instant, accordent au féminin, unies dans la lutte pour l’égalité. Mathilde, le verbe haut et le corps vibrant. Et nous tous et toutes, combatives et émues.
Cet article de notre camarade Marlène Collineau est à retrouver dans le n°318 de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).
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