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La monétisation de la dette est-elle une solution au problème de la dette publique ?

Il s’agirait de permettre à la banque centrale de financer directement le déficit public en créant de la monnaie afin d’acheter des titres d’emprunt d’État. C’est une pratique courante aux États-Unis où la Réserve fédérale (FED) a acquis dans le cadre de sa politique de « quantitative easing » 300 milliards de dollars de bons du Trésor US en 2009 et 600 milliards en 2010. A partir de cette branche commune, deux options différentes sont alors proposées.

Redonner à la Banque de France son pouvoir de créer de la monnaie en escomptant les titres de la dette publique

Tout le mal viendrait, en effet, de la loi du 3 janvier 1973 et de son article 25 qui affirmait que « le Trésor public ne peut être présentateur de ses propres effets à l’escompte de la Banque de France ». Article qui obligeait le Trésor public à emprunter sur le marché à obligations moyennant le paiement d’un taux d’intérêt.

Résoudre le problème de la dette publique ne serait alors qu’un problème « technique » : il suffirait d’abroger la loi du 3 janvier 1973, et de redonner à la Banque de France son pouvoir de création monétaire.

Le problème est, en réalité, éminemment politique puisque « redonner à la Banque de France son pouvoir de création monétaire » signifierait sortir de la zone euro et revenir au franc.

Rester dans la zone euro et changer la politique de la BCE

Dans cette optique, la BCE pourrait acquérir directement les titres de la dette publique des Etats-membres de la zone euro et leur éviter, ainsi, d’avoir recours aux marchés financiers.

L’important est, ici, le mot « direct ». L’article 123 du Traité de Lisbonne interdit, en effet, à la BCE d’acheter directement des titres de dettes publiques. Mais, la BCE acquiert tous les jours, indirectement plusieurs millions d’euros de ces titres.

La prudence devrait, cependant, être de mise. Car, comme le souligne Frédéric Lordon(1) « la métamorphose de l’endettement public en abus monétaire n’est pas un très beau spectacle. L’inflation « raisonnable » n’est pas un problème en soi, elle peut même avoir bien des avantages, mais son emballement hyperinflationniste laisse les sociétés dans des états de chaos social qui ne le cèdent en rien au risque systémique de la finance dérégulée ».

Le problème réel qui se pose est donc celui de savoir jusqu’où une telle pratique serait possible sans entraîner d’hyperinflation. La réponse pratique serait de modifier les traités européens pour que la BCE puisse acquérir directement des titres des dettes publiques européennes et donc monétiser une partie de la dette. Mais de limiter cette monétisation en combinant l’acquisition directe de titres des dettes publiques européennes avec d’autres éléments de solution à la crise de la dette, notamment avec une restructuration de la part de la dette jugée démocratiquement illégitime par chacun des peuples européens.

Jean-Jacques Chavigné


À paraître début octobre 2011 "La dette indigne" dix questions dix réponses, par Jean-Jacques Chavigné et Gérard Filoche (Ed. JC Gawsevitch, 14,90 euros)

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(1): Frédéric Lordon : «Au-delà de la Grèce : déficits, dettes et monnaies » - Les blogs du Diplo : La pompe à phynance, 17 février 2010. (retour)

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