C’est une première : deuxième ville de Suisse après Zurich, Genève sera désormais dirigée par une majorité de femmes ! Lors du second tour des élections municipales du 5 avril, les Genevois ont en effet élu trois femmes au Conseil administratif, lequel compte cinq sièges. Quatre de ceux-ci seront occupés par la gauche (2 PS et 2 Verts), qui reste majoritaire, le cinquième revenant à une démocrate-chrétienne.

La victoire de la gauche et de la cause des femmes à Genève n’est pas qu’un coup d’éclat isolé, puisque, dans le canton du Jura, une élection partielle a fait apparaître des tendances similaires.

Il y a toutefois deux petites ombres au tableau. La première, c’est que la « gauche de la gauche » a perdu le siège qu’elle détenait jusqu’ici au Conseil administratif de Genève – l’organe exécutif de la commune –, essentiellement parce que ses deux composantes, Ensemble à gauche/Solidarités (trotskiste) et le Parti du Travail (communiste), n’étaient pas parvenues à s’entendre sur une liste commune. Cela pourra poser quelques problèmes au législatif, où la gauche ne sera majoritaire qu’avec l’appoint de son aile critique.

La seconde, c’est que la participation n’a atteint que 29 %. Score toutefois jugé satisfaisant en raison du contexte particulier lié au coronavirus. Par mesure de précaution, seul le vote par correspondance a été utilisé.

Les Verts en pointe

Le succès de la gauche est d’abord celui des Verts, qui ont davantage progressé que le PS dans la plupart des localités du canton de Genève. Mais, dans presque toutes les communes de plus de 10 000 habitants, c’est une majorité rose-verte qui sera au pouvoir, les Verts ayant moins empiété sur les plates-bandes socialistes que sur celles de la droite classique, surtout des libéraux-radicaux. Autre résultat fort symbolique, à Onex, l’une des plus importantes villes genevoises, l’exécutif sera exclusivement composé de femmes, au nombre de trois.

Ces résultats sont d’autant plus intéressants que partout ou presque, les deux partis nationaux-populistes, l’Union démocratique du centre (UDC) et le Mouvement des citoyens genevois (MCG) ont largement mordu la poussière.

Jura : « Femmes, je vous aime »

Les bonnes nouvelles vont parfois par deux, puisqu’au début du mois de mars, lors d’une élection partielle au gouvernement du canton du Jura, la nouvelle candidate socialiste l’a emporté sur celle du Parti démocrate-chrétien (PDC). Formé de cinq membres, le gouvernement jurassien compte désormais deux femmes, toutes deux socialistes, ce qui constitue une double première. De quoi entonner la fameuse chanson de Julien Clerc, « Femmes, je vous aime » !

Le poids des mouvements sociaux

À Genève comme dans le Jura, le succès des femmes et de la gauche s’inscrit dans le droit fil des mouvements sociaux de l’année dernière. Ces victoires électorales viennent en effet dans la foulée de la grève des femmes du 14 juin 2019, ainsi que des élections au Parlement européen et aux Chambres fédérales, toutes deux marquées par une forte progression des femmes, surtout de gauche.

Cela confirme que le combat pour l’égalité va de pair avec une émancipation sociale généralisée, mais aussi la nécessité de combiner le combat institutionnel et les luttes sociales sur le terrain. À cela s’ajoutent les grandes mobilisations de la jeunesse de l’année 2019 contre le réchauffement climatique, ainsi qu’une très forte unité des différentes composantes de la gauche.

Notre ami Jean-Claude Rennwald est ancien député (PS) au Conseil national suisse, et militant socialiste et syndical. Son article est à retrouver dans le numéro 273 (avril 2020) de Démocratie&Socialisme, le revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).