Charonne, le 8 février 1962
DÉBUT 1962, « les événements » d’Algérie
et les « opérations de maintien de
l’ordre » s’éternisent. De Gaulle, pourtant
arrivé au pouvoir en mai 1958 sur le thème
de l’Algérie française, est maintenant
convaincu de la nécessité d’un processus
débouchant sur son indépendance. L’extrême-droite
et les militaires ne lui pardonnent pas
ce revirement et soutiennent la création d’un
groupe terroriste, l’Organisation de l’Armée
Secrète (OAS). Ce groupe fanatique de
« l’Algérie française » s’en prend aux militants
du FLN, que ce soit en France ou en Algérie,
ainsi qu’à tous ceux qui les aident
(communistes, PSU, chrétiens de gauche,
intellectuels…). Le 7 février 1962, jour de
l’explosion de 10 charges de plastic à Paris, la
gauche syndicale et politique appelle à une
manifestation antifasciste pour le lendemain.
Seule la SFIO, colonialiste et encore alliée à
De Gaulle, manque à l’appel… Un cortège
important défile le 8 février dans l’Est
parisien, mais le préfet de Paris, un certain
Maurice Papon, a déjà donné l’ordre de
réprimer la manifestation… Le bilan est
lourd : les bousculades autour de la bouche
de métro Charonne font huit victimes parmi
les manifestants cherchant à fuir la police.
L’émotion est grande et une grève générale
de fait paralyse la région parisienne le 13
février. Mais le pouvoir gaulliste a obtenu ce
qu’il voulait. Il a prouvé qu’il était un
rempart suffisant à la subversion sociale et
que la surenchère de l’OAS était inutile.
Alain Dewerpe a raison : il s’agit bien d’un
« massacre d’État ».
Pour en savoir plus :
Alain DEWERPE,
"Charonne, 8 février 1962,
Anthropologie d’un massacre d’État
",Gallimard, 2006.