GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Écologie

Le mensonge de la « finance verte »

La soudaine passion du président de la République pour l’écologie a de quoi surprendre. Lui qui n’a que très peu évoqué le sujet lors de sa campagne électorale explique maintenant à qui veut l’entendre que, renseignements pris, il considère que c’est l’enjeu majeur des prochaines décennies. Quelle métamorphose en quelques mois !

Si nous ne pouvons lui contester l’urgence que revêt la question écologique, nous aurions tort de prendre au pied de la lettre le président Macron, en éludant complètement l’éventualité d’une stratégie politicienne qui lui permettrait, tout simplement, de trouver-là un sujet d’opposition à Trump…

Sommet... d’hypocrisie

Le 12 décembre dernier, lors du « One Planet Summit », littéralement le « Sommet de notre seule planète », Emmanuel Macron a affiché ses ambitions, notamment limiter le réchauffement climatique en deçà de 2°C d’ici la fin du XXIe siècle.

Ce sommet n’a pas simplement été un sommet de plus, puisqu’il a pris le parti d’afficher ce que la France n’avait pas l’habitude de mettre autant au cœur des enjeux, à savoir la surreprésentation des grands groupes publics comme privés, dont il nous faudrait obtenir des financements afin de préserver la planète. Si le raisonnement apparaît bien simpliste, c’est pourtant ce vers quoi veut tendre Emmanuel Macron. Exit la fiscalité écologique, il suffirait maintenant de demander aux riches industriels et à leurs cliques d’actionnaires de financer quelques projets, afin de remettre le monde à l’endroit.

Un oxymore de plus

Emmanuel Macron nous ferait presque douter. Si les capitalistes peuvent sauver la banquise par philanthropie, à quoi sert notre combat politique ?

Trêve de plaisanterie. Ce que défendent les adeptes du « nouveau monde » est un concept à la mode, la « finance verte ». Concept basique où l’on promeut les initiatives des grandes entreprises en faveur de projets écolo-compatibles ou de lutte contre les inégalités Sud-Nord, notamment en termes de bouleversements climatiques. Il manque dans cette belle idée une notion pourtant incontournable, celle du consentement à la taxation ou à l’impôt. En effet, comment ne pas être surpris par ce soudain engouement des grands groupes pour l’écologie quand ils sont souvent les premiers à dénoncer l’impôt, pire à le contourner et à frauder le fisc. Pourtant, pour remettre le monde à l’endroit et investir dans l’avenir, il nous faut une volonté politique et de l’argent public sur la table !

Qui paie décide ?

Ce même 12 décembre, Attac sortait une publication intitulée La finance verte est-elle vraiment verte ?. L’occasion de revenir sur les obligations vertes – sur le marché français depuis 2014. Une obligation verte n’est autre que le pendant écolo des obligations classiques. Ainsi, une entreprise ou une collectivité empruntent auprès d’un investisseur contre le paiement d’un intérêt, pour une durée limitée dans le temps. De son émission à son remboursement, l’obligation est cotée et échangée sur le marché secondaire. Son caractère « vert » suppose qu’elle permet de contribuer à des projets qui agissent pour la protection de l’environnement ou en faveur du climat. Attac démontre que l’absence de contrôle ne permet pas de rendre compte de la qualité des projets réellement soutenus, et notamment de leur caractère écolo*.

La finance verte est une supercherie. La vraie finance verte, c’est la fiscalité verte, celle qui donne à l’État les moyens de percevoir l’impôt et de l’affecter à des projets dont la société a défini qu’ils étaient prioritaires. Nul besoin de grande vision pour se douter que ce qui intéresse lesdites entreprises, c’est, encore une fois, de choisir quel projet sera bon… pour elle. Le fameux adage « Qui paie décide » a décidément de beaux jours devant lui !

* Lire le rapport Attac à l’adresse suivante : https://france.attac.org/IMG/pdf/rapportfinancevertevf.pdf

Cet article de notre camarade Margaux Denantes est paru dans le numéro 251 de janiver 2018 de Démocratie&Socialisme

 

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