GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Faire que les jeunes vivent mieux en 2017 qu’en 2012

Ce texte est paru dans le numéro d’avril de la revue Démocratie&Socialisme. Il a donc été écrit avant le premier tour des présidentielles.

Une jeunesse précarisée par la droite comme jamais

Stage, CDD, intérim, chômage, discriminations, échec scolaire… tel est le lot quotidien d’une jeunesse qui subit depuis cinq ans les coups de massues de la droite. Jamais un président de la république n’avait autant martyrisé sa jeunesse. Non pas en lui concoctant des lois catégorielles, comme Balladur et Villepin le firent en leur temps avec le CIP ou le CPE, mais en détricotant fil après fil le pacte social et républicain qui la reliait au reste de la société. Une fois paré des pleins-pouvoirs en 2007, Sarko-Fillon-Coppé se sont payés le luxe d'ignorer pendant 5 ans une jeunesse à qui ils promettaient allocation de formation de 300 € par mois, plan Marshall pour les banlieues, emprunts à taux zéro, mutualisation des risques et service public de la caution ! Qu'il s'agisse de propositions mineures, comparé à la profondeur des aspirations de la jeunesse, n'empêche pas que ces promesses n'ont pas été tenues. Cinq ans après, les monts et les merveilles promis aux adulateurs en culotte courte de la « France d'après » se révèlent être du vulgaire toc. Mais, la politique antisociale de la droite, elle, est devenue une réalité tangible et sa déclinaison « jeune » est particulièrement crue : RSA Jeunes, autonomie des universités, apprentissage à 14 ans, réforme du BAC Pro, baisse drastique des moyens humains et financiers de l’Éducation Nationale...

Toujours présente au cœur des mouvements sociaux contre la LRU et la réforme des retraites, marchant parfois même au devant des salariés et piaffant d'impatience à l'idée d'en découdre avec ce gouvernement inique, la jeunesse s’est efforcée de prendre son destin en mains. Mais, délaissée par un État d'autant plus inflexible avec les opprimés qu'il est compatissant avec les oppresseurs, une partie de la jeunesse semble s'être résignée au sort que lui promet les libéraux et leurs zélateurs. Avec Sarko, le doux rêve du patronat n’est plus un mirage vaporeux, il est en passe de devenir réalité. Pouvoir compter sur une jeunesse fortement précarisée afin de demander encore plus d’exonérations de cotisation, de contrats de travail atypiques et de sous-emploi rémunérés en-dessous du SMIC, ne relève plus du fantasme en Sarkozie. Car la bande du Fouquet's a bel et bien l'intention de n'offrir comme perspective d'avenir à tout un pan de la jeunesse que d'aller grossir les rangs de cette armée de réserve du capital qui constitue un appui solide dans son rapport de force avec le salariat.

Dimanche dernier, Sarko a encore promis aux jeunes un avenir fait de larmes, de sueurs et de sang. Sans statut social, ils seront condamnés à en appeler à la charité chrétienne. Sans création de logements étudiants, ils pourront toujours faire jouer la concurrence dans le parc privé. Même la honteuse proposition d'une « banque pour les jeunes » vient de se réduire à n'être qu'un misérable moteur de recherche sur internet mettant le jeune en contact avec la banque qui va le plumer. Signe des temps, avec la droite, même en campagne électorale, la jeunesse en a pour ses frais ! Elle n’a rien à attendre de Sarkozy. Son bilan, c’est son programme. Et son bilan, c’est un fiasco ! Les cinq années qui arrivent seront nos pires années s’il reste au pouvoir. Il faut s’en débarrasser au plus vite. L’élection, à défaut de révolution, le permet. Saisissons-nous du bulletin de vote pour le chasser lui et son gouvernement qui a fait payer aux jeunes et au salariat un si lourd tribut.

Abstention, risque majeur

Majoritairement, les jeunes voteront à gauche. Ce n’est pas une nouveauté et pas besoin des sondages pour nous le confirmer. Le fait que les jeunes, parce qu'encore indifférenciés socialement et peu attachés à la conservation de la société capitaliste, soient majoritairement favorables à la transformation sociale doit être pour nous un axiome. D'ailleurs, lors de nos diffs devant les universités, dans les lycées pro ainsi que dans les porte-à-porte en cité U, il n'est pas difficile de sentir l'envie féroce d’en finir avec le président sortant. Sauf que… une fois encore, les jeunes risquent de se faire remarquer comme étant la classe d’âge qui s’abstient le plus. La jeunesse n’a pas le sentiment d’être interpellée, d’être entendue sur ses revendications. Elle a trop souvent impression que la classe politique l’a abandonné. François Hollande s’est engagé à relever ce défi en plaçant la jeunesse dans ses tops-priorités et en faisant la guerre à l’abstention. Car, si François Hollande -comme Ségolène Royal en 2007- reste majoritaire chez les 18-65 ans, Sarkozy conserve une bonne longueur d’avance chez nos aînés et ce sont eux qui s’abstiennent le moins. L’avenir du pays dépendrait donc des suffrages de ceux qui ont plus d’années derrière eux que devant ? Pour refuser ce scandale démocratique, il n'y a qu'une solution pour la jeunesse : se saisir du bulletin de vote François Hollande et le considérer comme le seul moyen de choisir son destin. Le seul moyen de renouer avec le sens de l'histoire. Le seul moyen de clore cet épisode funeste pour notre pays et pour sa jeunesse qu'a constitué le sarkozisme.

Pour en finir, le seul vote viable, c'est le vote Hollande

Notre candidat François Hollande a précisé le 3 avril quelles seraient les mesures prises dans l'année qui vient par un gouvernement de la gauche unie. Le contrat que le candidat socialiste propose à la jeunesse s'appuie notamment sur :

  • une caution solidaire mise en place pour permettre aux jeunes d'accéder à la location qui fera l'objet d'un décret pris après concertation avec les partenaires sociaux;
  • l'abrogation de l'odieuse circulaire Guéant sur les étudiants étrangers;
  • la création des emplois d'avenir -150 000, dont 100 000 dans l’année qui suivra l’entrée en vigueur de la loi- et du contrat de génération, dans une loi pour l'emploi et la cohésion sociale, afin de permettre aux jeunes d'accéder au marché du travail, en particulier dans les quartiers dits « sensibles ».
  • Ces mesures n'ont rien de symbolique, comme se plaît à le répéter continuellement une droite qui n'a décidément pas grand chose à dire en positif à la jeunesse de ce pays. Les propositions du candidat socialiste, appelé à devenir le candidat de toute la gauche au soir du premier tour, sont concrètes et elles sont à même de changer la vie quotidienne de millions de jeunes qui ne connaissent que la galère depuis leur départ du toit familial. Un emploi et un logement décents, c'est ouvrir la voie à la jeunesse vers l'autonomie. Concernant le contrat de génération, il est assez étonnant de voir que l'idée séduit davantage les aînés que les jeunes alors que cette mesure aura le mérite d'imposer l’embauche des jeunes en CDI. Un vrai contrat avec un vrai salaire pour réaliser ses projets de vie. Pas une solution catégorielle stigmatisant encore une fois la jeunesse et ses franges les plus précarisées.

    Une candidature qu'il faut densifier

    Un flou important demeure toutefois dans la proposition 39 de François Hollande. L’allocation d’étude sera-t-elle versée en fonction des ressources des parents ou du jeune ? Comment parler de parcours d’autonomie si le montant de l’aide versée au jeune dépend du revenu de ses parents ? Le doute doit être levé sur ce point, car nous nous approchons là de la substance de l’allocation-autonomie tel que nous la défendons. En effet, le niveau de l’allocation versée au jeune doit être en grande partie calculé par rapport au montant des revenus de transfert fourni par sa famille. Un jeune ne bénéficiant que très peu ou pas du tout des ressources de sa famille devra avoir une allocation-autonomie bien plus élevée qu’un jeune ayant des parents aisés, et qu’ils le sont d’ailleurs encore plus grâce à la demi-part fiscale. Mettre fin à cette spirale de la reproduction, c’est aussi cela la justice sociale.

    Il n’y a qu’une seule tranche d’âge qui ne bénéficie pas de statut : la jeunesse. En tant que tels, les jeunes n’ont droit à aucune protection sociale (à part la mutuelle pour les étudiants). Seule une fraction d’entre eux bénéficie du système des bourses. Mais ce système est tout à fait insuffisant : il faut être étudiant pour en bénéficier, ce qui ne concerne qu’une partie de la jeunesse. Enfin, l’enveloppe globale attribuée à l’aide sociale étudiante ne dépend que du bon vouloir de l’État, ce qui en fait un système d’assistance au budget d’ailleurs scandaleusement insuffisant. Il s’oppose à celui que nous voulons mettre en place : un système de solidarité. Être en formation, c’est être en incapacité temporaire de travailler et d’avoir un revenu, cela correspond donc à la définition que donne la sécurité sociale d’un « risque social ».

    Ce constat appelle donc la mise en place d’une nouvelle branche « jeunesse » de la sécurité sociale chargée de distribuer l’allocation d’autonomie pour toute la jeunesse en formation. En effet, nous préférons que la gauche parle à l’ensemble de la jeunesse plutôt que de la segmenter comme le font les gouvernements libéraux. N’offrir qu’aux « jeunes déscolarisés de 16 à 18 ans une solution de formation, d’apprentissage ou un service civique » (proposition 37) est à notre sens une erreur. Il n’y a pas d’un côté une jeunesse en apprentissage qui n’aurait pour s’en sortir que le contrat de génération et de l’autre une jeunesse étudiante qui recevrait de l’État un revenu d’assistance. L’apprenti et l’étudiant sont deux salariés en formation qui, quel que soit leur avenir, seront tous les deux soumis -quoiqu’à des degrés divers- à l’exploitation de leur travail productif par le capital sous la férule de la loi de la valeur. Pour unir ces deux salariés en devenir, il convient précisément de ne pas les opposer et de les rapprocher en leur attribuant un cadre statutaire unifié.

    Rien n’est joué et tout reste à faire. Pour l’instant, le compte n’y est pas forcément, malgré la bienveillance évidente de notre candidat à l’endroit de la jeunesse. Mais qu’importe ! Le salariat et la jeunesse n’ont pas attendu qu'une gauche parfaite et dotée du programme idéal arrive au pouvoir pour changer la vie. Bien entendu, la victoire électorale constitue une condition nécessaire au renversement du rapport de force en leur faveur ; elle n’est toutefois pas suffisante Si c’est uniquement en votant en masse et sans état d’âme pour François Hollande le 22 avril, puis le 6 mai, que la jeunesse pourra se frayer une issue, ce n'est qu'ensuite, une fois son ennemi public n° 1 écrasé dans les urnes, qu'elle sera en capacité d'obtenir du gouvernement de gauche issu des législatives de juin, par la mobilisation sociale, cette allocation-autonomie que nous sommes des milliers à appeler de nos vœux.

    Johann Cesa et Jean-François Claudon

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