Réponses aux arguments contradictoires du oui (III)
29/11/2004 |
François Hollande répète : " Il faut voter la Constitution car il n'y a aucun recul par rapport aux traités existants ". C'est faux. Il y a plusieurs reculs d'importance réelle.
Dans un article de " l'Hebdo des socialistes " daté du 5 novembre, nous défendions un Smic européen, et, en soulignant que la constitution excluait toute harmonisation sociale de ce type, nous écrivions sous le titre " Europe sociale contre Europe libérale " : «Un droit d'inventaire s'impose : à l'abri de cette pseudo constitution européenne, l'Europe sociale recule en pratique. Les textessont en retrait par rapport à ceux des années 1950-1970 et le contexte est celui d'une offensive ultra-libérale. La constitution n'est ni un " petit pas ", ni un " compromis " équilibré, c'est un piége dans lequel il ne faut pas tomber» Sans vérifier les camarades défendant le " oui " nous ont attribué une place dans leur bêtisier du " non " sur leur site " oui-socialiste ", tant il leur semblait que le projet de Constitution ne contenait que des avancées. Ils ne savent donc pas, que dans les années cinquante et même jusqu'au traité de Nice les traités européens pouvaient avoir un contenu social plus avancé que le projet de Constitution ? Citons des exemples, particulièrement d'actualité, puisqu'ils concernent le Smic, les salaires en général et l'amélioration des conditions de vie et d'emploi.La CECA (1951)
Le Traité de Paris du 18 avril 1951, instaurant la Communauté Economique du Charbon et de l'Acier (CECA) indiquait clairement comment le social était alors une préoccupation centrale de l'Europe. Le Chapitre VIII (Salaires et mouvements de main d'oeuvre) stipulait à l'article 68-1 :"Lorsque la Haute Autorité reconnaît que des prix anormalement bas pratiqués dans une ou plusieurs entreprises résultent des salaires fixés par ces entreprises à un niveau anormalement bas eu égard au niveau des salaires pratiqués dans la même région, elle adresse à celles-ci, après avis du Comité consultatif, les recommandations nécessaires." L'article 68-2 précisait :
"Lorsque la Haute Autorité reconnaît qu'une baisse des salaires, tout à la fois, entraîne une baisse du niveau de vie de la main-d'oeuvre et est employée comme moyen d'ajustement économique permanent des entreprises ou de concurrence entre les entreprises, elle adresse à l'entreprise ou au gouvernement intéressé, après avis du Comité consultatif, une recommandation en vue d'assurer, à la charge des entreprises, des avantages à la main-d'oeuvre compensant cette baisse. " Et pour que ces recommandations ne restent pas de simples déclarations d'intention, l'article 68-6 en tirait les conclusions pratiques :
"Au cas où les entreprises ne se conformeraient pas aux recommandations qui leur sont adressées en application du présent article, la Haute Autorité peut leur infliger des amendes et des astreintes à concurrence du double des économies de frais de main-d'oeuvre indûment réalisées". Ce texte permet de mesurer le chemin parcouru par l'Europe dans la régression des objectifs sociaux. Il a également le mérite d'indiquer les moyens d'action dont l'Europe pourrait se doter si elle avait la volonté de fixer des objectifs sociaux et les faire aboutir. En effet, ce n'est pas que l'Europe soit moins " dirigiste " aujourd'hui que dans les années 1950. L'Europe est tout aussi " dirigiste " aujourd'hui quand il s'agit de limiter les déficits publics. Elle sait alors (c'est l'objet du pacte de stabilité intégré au traité d'Amsterdam et réaffirmé par le projet de Constitution) fixer des objectifs et mettre en œuvre des sanctions pour les faire respecter. Mais, aujourd'hui, son objectif n'est plus d'empêcher la baisse du pouvoir d'achat des salariés. Au contraire, elle charge le marché de niveler ce pouvoir d'achat vers le bas et interdit (article III-210 du projet de Constitution) toute harmonisation par le haut des législations sociales des Etats-membres. Le dumping social est mis en œuvre et légitimé par le projet de Constitution, le projet de " directive Bolkestein ", l' " opt - out "... Les traités de Rome (1957) et de Nice (2001) En 1957, le préambule du traité de Rome, assignait " pour but essentiel " à la construction européenne " l'amélioration constante des conditions de vie et d'emploi des peuples ". Ce but essentiel avait été conservé par les divers traités. Le traité de Nice le reprenait encore à son compte. Il a disparu du projet de Constitution. Peut-on vraiment estimer que cette disparition est anodine et n'a rien à voir avec le contenu du projet de Constitution et la politique réelle de l'Union européenne ? Gérard Filoche, Jean-Jacques Chavigné
Autres reculs :
[caption id="attachment_854" align="alignnone" width="120"]L’article en PDF[/caption]