Première riposte d'ampleur à la politique de Sarkosy
24/01/2009 |
Le 29 janvier va être une journée d’action nationale interprofessionnelle d’ampleur en réponse à la crise financière et économique. Alors que, chaque jour, de nouvelles annonces de suppressions d’emploi sont faites, les réponses apportées par Sarkozy vont en fait dans le sens de la poursuite et de l’aggravation des politiques qui ont conduit à la crise.
Pour la première fois depuis longtemps, c’est l’ensemble du mouvement syndical qui s’est mis d’accord sur une plateforme économique et sociale alternative, refusant que les salariés qui ont déjà payé les profits remboursent maintenant les pertes. Pour s’opposer à la politique de Sarkozy, les socialistes doivent choisir d’être du côté des salariés, des chômeurs, des exploités. Le 29 janvier, leur place est dans la rue !La crise ne se résoudra pas sur le dos des salariés
La crise financière et la crise économique qui a suivi ne sont pas des effets indésirables de la croissance des profits. Elles sont le résultat de choix politiques clairs et persistants qui ont déréglementé le capitalisme, favorisant l’accumulation à des niveaux inégalés du capital financier. La recherche du profit maximal a abouti à ce que le marché construise des « produits » de plus en plus déconnectés de l’économie réelle et de la création de biens. En même temps, le règne des actionnaires gigantesque, dont les fameux fonds de pension ne sont qu’un exemple, a été encouragé par des choix de politique sociale reposant sur la précarisation accrue des salariés, le recul du pouvoir d’achat et le recours aux licenciements « financiers », alors même que la remise en cause de la protection sociale réduisait les capacités de résistance individuelle des salariés sur le marché du travail. La mobilisation interprofessionnelle du 29 janvier adresse un premier message au pouvoir : les salariés qui ont déjà payé les profits des actionnaires n’entendent pas maintenant rembourser leurs pertes. Pourtant, c’est précisément le sens de la politique de Sarkozy, qui reste fidèle à lui-même. Certes, il n’a pas osé allé jusqu’à suivre la proposition du sénateur Marini, maire de Compiègne, qui proposait d’utiliser l’impôt pour rembourser les rentiers qui avaient perdu en Bourse, mais toutes les mesures qu’il a annoncées se situent dans la droite file de la « politique de l’offre», d’inspiration reaganienne, qu’il promeut depuis son arrivée à l’Elysée. Dans la même logique, il n’entend pas remettre en cause les mesures de régression sociale qu’il a déjà prises. Il compte même aller plus loin, comme avec la retraite à 70 ans ou le travail du dimanche, tandis qu’il réduit encore les possibilités d’action du service public et de l’Etat dans la lutte contre les inégalités, notamment par le biais de la RGPP. La plateforme commune signée par l’ensemble des organisations syndicales pour le 29 janvier propose une solution alternative à ces choix politiques délétères. Tout d’abord, il s’agit de réorienter la politique économique en favorisant avant tout l’emploi. Elle appelle à conditionner les aides publiques à la préservation de l’emploi, condamne les entreprises qui prennent prétexte de la crise pour licencier ou flexibiliser les salariés, et exige une politique d’emploi public qui revienne sur la suppression systématique des postes de fonctionnaires. Elle propose aussi que l’usage des aides publiques dans le secteur bancaire soit réellement contrôlées par l’Etat. Ensuite, elle demande de revenir sur les choix qui ont favorisé les revenus du capital au détriment du travail, en revalorisant les salaires pour garantir, au moins, le pouvoir d’achat. Dans le même ordre d’idées, elle demande que les investissements de relance soient fait dans les secteurs porteurs d’égalité et d’avenir, comme le logement social, la recherche, le développement, l’éducation, la formation. Enfin, elle s’inscrit dans une logique de rééquilibrage entre actionnaires et salariés, en revenant sur les mesures les plus anti-sociales et en relançant le dialogue social, d’une part, et en réglementant à l’échelon international la sphère financière. A n’en pas douter, ce sont des mesures «de gauche» que les organisations syndicales qui ont initié le 29 janvier, proposent.Une riposte unitaire inédite
Et cette plateforme, il ne faut pas en minimiser l’importance. C’est la première fois que l’ensemble du mouvement syndical (CGT, CFDT, FO, UNSA, FSU, CFTC, CGC, Solidaires) se met d’accord sur des orientations économiques et sociales aussi clairement en opposition avec les choix actuels. C’est aussi la première fois qu’elles appellent ensemble à une journée d’action qui ne sera pas que symbolique. Le 7 octobre dernier, à l’appel de la Confédération syndicale internationale (CSI), dont sont membres la plupart des organisations syndicales françaises, une journée mondiale d’action était prévue. De fait, elle s’est limitée à des rassemblements symboliques, locaux, sans appel à la grève. Cette fois-ci, la donne a changé. Les fédérations de fonctionnaires ont clairement appelé à la grève et le secteur phare de l’éducation, déjà en conflit avec le gouvernement depuis la rentrée, sera sans doute largement au rendez-vous. Mais il semble aussi que, localement, la mobilisation soit en train de s’organiser dans le privé. Il faut sans doute y voir le résultat de l’évolution du paysage syndical et des dernières élections qui ont confirmé l’orientation des organisations syndicales les plus revendicatives. Ce fut évidemment le cas pour les prud’homales, mais aussi dans la fonction publique territoriale (1,8 million de salariés des mairies, départements, régions), qui ont eu pour résultat une progression nette de la CGT et un recul encore plus net de la CFDT. Mais aussi de l’éducation nationale, où la FSU a encore progressé. Alors qu’il y a peu encore, des organisations dites « réformistes», comme la CFDT ou l’UNSA, voire carrément «libérales» comme la CGC, prônaient le «compromis» et soutenaient que la recherche du profit par les actionnaires pouvait servir à l’emploi et donc aux salariés, c’est un réalignement général du mouvement syndical sur la base d’un changement radical d’orientation politique qui est en train de se faire. Face à cela, il serait suicidaire pour les socialistes de rester les bras ballants, sans comprendre que l’alternative politique est en train de se construire dans la rue, à côté, pour ne pas dire loin d’eux. La place des socialistes, c’est avec ceux qui exigent une autre politique économique et sociale, sur la base de revendications qui sont largement partagées par les salariés.La place des socialistes, c’est dans la rue, avec les salariés
Le congrès de Reims a marqué l’aspiration d’une grande partie des militants à rompre avec les logiques d’accompagnement, d’aménagement, de résignation, devant la puissance du capitalisme. Mais on est encore loin de la construction politique d’une alternative, parce que le parti reste trop fondamentalement coupé du mouvement social qui, lui, s’organise et se mobilise. D’ores et déjà, certaines fédérations du parti ont appelé à se joindre aux cortèges. C’est le cas en Haute-Loire ou dans l’Oise. Il faut évidemment que les socialistes en soient, partout, que le parti appelle nationalement à participer aux cortèges du 29 janvier. Mais il faudra, ensuite, aussi changer l’attitude du parti vis-à-vis du mouvement social, et entamer, rapidement, un dialogue constructif avec l’ensemble des organisations qui expriment, aujourd’hui, leur exigence d’une autre politique. Faute de quoi, on en reviendra dans le meilleur des cas à ce qui a fait l’échec de la dernière expérience de la gauche au gouvernement de 1997 à 2002 : accéder au pouvoir en s’appuyant sur la mobilisation sociale de 1995, et le perdre pour ne l’avoir pas entendu pendant les cinq années qui ont suivi. Hervé Le FiblecC’EST LA PREMIÈRE FOIS DEPUIS LONGTEMPS QUE L’ENSEMBLE DU MOUVEMENT SYNDICAL SE MET D’ACCORD SUR DES ORIENTATIONS ÉCONOMIQUES ET SOCIALES
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